Il n'est pas toujours facile de dénicher un équipier au moment où la météo et notre emploi du temps nous invitent irrésistiblement à prendre la mer. La navigation en solitaire s'impose alors comme l'ultime solution. Pour certains marins, elle est même un plaisir en soi.
La préparation d'un voilier pour le solitaire requiert un peu de réflexion. Le pilote électrique apparaît alors souvent comme un élément incontournable de l'équipement. Cependant sur de petits voiliers sans circuit électrique, son installation risque de s'avérer coûteuse. Il faudra en effet ajouter une batterie, des coupe-circuits, des câbles, un tableau électrique, et prévoir un moyen de recharger ladite batterie. Si nous sortons 2 fois dans l'année en solo, le jeu n'en vaut probablement pas la chandelle.
Par ailleurs quand ce pilote existe, il se peut, sans pessimisme exagéré, qu'il tombe en panne. Ou qu'un problème électrique nous en interdise l'usage. Allons-nous solliciter les secours ?
S'entrainer à naviguer sans pilote
Peut-être pas si nous nous entraînons à naviguer sans pilote. Cela est possible grâce à un avantage propre aux bateaux à voile : l'équilibre sous voiles. Une fois que les voiles sont bien réglées, les voiliers ont tendance à conserver leur cap sans qu'il soit nécessaire d'intervenir sur la barre.
Ceci est particulièrement vrai du près au travers. Aux allures portantes, les bisafrans et peut-être les multicoques équipés de dérives latérales resteront stables plus longtemps. Par contre aucun voilier ne saura se maintenir tout seul très longtemps plein vent arrière.
Un bout pour amarrer la barre
Ainsi entre le près et le travers, par mer plate, vous pourrez vous contenter d'amarrer la barre au vent avec un simple bout. Divers systèmes permettent ensuite d'améliorer cette installation de base, si nécessaire, par exemple dans une mer un peu formée où il faudra aussi retenir la barre sous le vent. L'astuce est de laisser un peu de jeu dans la barre afin de laisser le voilier rectifier lui-même son cap. Certaines personnes utilisent des sandows pour obtenir cet effet.
Un temps de demoiselles pour s'essayer
En débutant votre entraînement dans des conditions idéales : 8-10 nœuds de vent au près sur une mer calme, vous pourrez tester les variations de cap de votre bateau selon que vous choquez ou bordez l'une ou l'autre voile. Il faut retenir que border la grand-voile fait lofer et que border le foc fait abattre. Commencez par la grand-voile, puis essayez avec le génois.
Une fois l'équilibre trouvé, promenez-vous (avec une brassière) sur le pont pour prendre de l'assurance. Si votre bateau est léger, vous constaterez également une influence de vos déplacements sur le cap.
Cet exercice est absolument génial, car il va vous faire faire un bond en réglage de voile. Mais en plus il va vous permettre de naviguer SANS pilote !
Réaliser des manœuvres sans pilote
Ensuite si vous avez besoin de changer de voile ou de prendre un ris, vous avez plusieurs possibilités.
La première est de mettre le bateau en cape courante. Assurez-vous d'abord de ne pas avoir d'obstacle immédiat sous le vent. Puis roulez un peu de génois et bordez le à contre. Dans la foulée, choquez la grand-voile pour éviter un virement. De plus vous en aurez besoin pour prendre ou larguer votre ris. Bloquez éventuellement la barre sous le vent.
Pour hisser ou affaler un génois, vous pouvez également vous mettre à la cape, grand-voile bordée aux deux tiers et barre attachée sous le vent.
Si vous naviguez entre le près et le travers, il est probable que vous n'ayez même pas besoin de vous mettre à la cape pour ces 2 manœuvres. Calez votre bateau sur une allure de bon plein et il devrait y rester pendant toute la manœuvre. Attention simplement pour affaler une voile à l'avant au bon plein : votre bateau une fois privé de génois aura peut-être tendance à abattre. En effet au bon plein, vous pouvez être amené à amarrer la barre un peu au vent pour contrer la tendance du bateau à lofer. À partir de là si vous affalez le génois, le bateau moins toilé gîtera moins et donc aura moins tendance à lofer. Si la barre est toujours un peu au vent, il va abattre.
Avec un génois endraillé vous pouvez également vous permettre d'affaler au moment ou vous virez de bord. Il vous suffit de laisser filer toute la drisse d'un coup depuis le cockpit quand vous vous trouvez face au vent. Ensuite, laissez le bateau dériver en allure de cape courante sous grand-voile seule le temps d'amarrer le génois dans les filières. Cette manœuvre est très efficace avec des voiles de dimensions modestes. Un génois à fort recouvrement aura peut-être tendance à passer à l'eau. A vous de tester d'abord par petit temps puis par vent plus fort pour trouver ce qui vous convient le mieux ainsi qu'à votre voilier.
Ainsi vous l'aurez compris : l'allure de cape est la seconde amie du navigateur solitaire, quand celui-ci est privé de pilote. Même pour préparer votre retour au port. Installez tranquillement vos amarres et vos pare-battage, ensuite seulement roulez le génois, puis réajustez votre cape sous grand voile seule, barre amarrée sous le vent. Démarrez le moteur, affalez la grand-voile, ferlez là et hop, retour au port !