Ce jour là, tout allait bien. Belle mer, beau temps. Température idéale. En fin de matinée, un sentiment diffus de malaise s'installe chez l'un de vos passagers. Sa situation vous inquiète ...
Demande d'assistance
VHF Basculée sur le canal 16. "Mayday Mayday Mayday." Le silence se fait sur les ondes. Vous avez l'oreille du CROSS. Vous exposez les faits. Rapidement, votre interlocuteur vous demande de basculer sur un canal de travail, que vous ne quitterez que sur ordre. Le militaire qui vous répond vous posera un grand nombre de questions sur l'état de ce passager. A un moment, par téléphone ou par VHF, vous serez mis en relation avec un médecin. Ici encore, l'opérateur demeurera en ligne, c'est lui qui se chargera de faire le "tampon" de votre stress dans l'échange avec le professionnel de santé.
Selon la gravité de la situation, plusieurs scénarii peuvent s'envisager. Le CROSS vous demandera de vous dérouter vers le port le plus proche. C'est un indice que la situation n'est pas si catastrophique qu'il n'y paraît. A terre, à votre arrivée, l'ensemble des moyens de sauvetage sera en place : ambulance, civière… seront à quai. Dans certains cas, pour optimiser l'intervention, le CROSS vous communiquera même un emplacement à rejoindre. Respectez les consignes, c'est pour permettre à votre passager d'être pris en compte au mieux que ces instructions vous sont données.
Le CROSS dirige la manoeuvre
Dans des cas d'extrême urgence, on parler d'une EVASAN, évacuation sanitaire. Le médecin avec lequel vous avez échangé, un professionnel toulousain du Centre de Consultations Médicales Maritimes (CCMM) a considéré qu'il n'y avait pas le temps nécessaire pour faire appel au SAMU de Coordination Médicale Maritime (SCMM) et qu'il serait dans l'intérêt du patient de projeter une équipe non médicalisée. Cette équipe ne sera pas pour autant moins compétente. L'objectif est de transporter au plus vite votre passager vers un centre hospitalier disposant du plateau le plus qualifié pour l'affection visée.
Lorsque le temps est un peu moins compté, une EVAMED - évacuation sanitaire - sera envisagée. C'est alors que le CROSS contactera le SCMM le plus proche de votre zone (le SCMM est implanté à Brest, Bayonne, au Havre et à Toulon) pour la partie médicale. Il fera usage du moyen de transport le plus proche lui aussi, gendarmerie marine ou sécurité civile. Jamais des pompiers ni du SAMU, leurs appareils ne sont pas aptes à voler au dessus de l'eau.
Une seule chose à faire ... ne rien faire
Les moyens sont déclenchés. Le CROSS vous a expliqué quels moyens allait être déployé, à quel fin et dans quel délai ils seraient sur zone. Dès lors, la seule chose dont vous allez avoir besoin est de la patience et … ne rien faire. Les pilotes d'hélicoptère sont équipés pour détecter et voir de très loin votre embarcation. Pas besoin, sans instruction, de tirer de fusée ou de déclencher quelque signal que ce soit. Au contraire, cela pourrait s'avérer contre productif voit dangereux. Dans le cas où une personne aura chuté à l'eau et qu'il sera nécessaire de la repérer depuis l'hélicoptère, allumez le maximum d'éclairage vers cette personne. Si vous êtes celui qui a chuté, allumez autant de moyens lumineux que possible (lampe flash, bâtonnet de cyalume …).
Lorsque l'hélicoptère arrive sur zone à proximité de vous, le CROSS et le pilote vous demanderont de basculer sur une fréquence de travail, que vous ne devrez quitter que sur ordre. Encore une fois, il ne faut réaliser aucune opération de quelque sorte que ce soit. Ne touchez rien ni personne qui puisse descendre de l'hélicoptère (notamment le cable de décharge électrostatique). C'est alors que le pilote pourra vous donner quelques instructions, si nécessaire, d'orientation du bateau par exemple.
L'objectif est que l'appareil puisse descendre au plus bas et au plus proche du pont de votre bateau. C'est la raison pour laquelle, dans certains cas, il vous sera demandé de percuter le radeau de survie ou de mettre l'annexe à l'eau, pour éviter, dans le cas d'un mat de grande hauteur, les manoeuvres trop risquées pour l'aéronef.
Plongeur à bord de votre bateau
Un plongeur va venir à bord de votre bateau. Il va prendre le contrôle de toutes les opérations sur le bateau, le déplaçant si nécessaire, selon les besoins de l'intervention. Selon les cas (evasan ou evamed), il sera rejoint par un médecin et par un infirmier, qui pourront apporter les premiers soins au blessé, le mettre en conditions pour le transport par exemple.
La civière sera montée à bord de l'hélicoptère. Dans certains cas, par exemple si le skipper est blessé et que personne ne sait, ou ne peut, prendre le contrôle du navire, il pourra être laissé sur zone. Il sera de la responsabilité du propriétaire du bateau d'aller le récupérer.
Fin de l'intervention
A proprement parler, c'est à ce moment que l'hélitreuillage sera achevé. Cela ne signe pas la fin de l'intervention en elle même. En effet, le CROSS demeurera au contrôle de l'opération jusqu'à ce que le blessé soit déposé à terre, dans un hôpital.
Vous venez de vivre un hélitreuillage virtuel. Souhaitons qu'il sera le seul de votre carrière de plaisancier !
Les recommandations des autorités
Lorsqu'on échange avec elles, les autorités nous expliquent qu'il faut… ne rien faire. Le plaisancier, le plus souvent, ne fera naturellement rien. L'administrateur en chef de 2e classe Sophie, chef du bureau sauvetage et navigation de la division de l'action de l'Etat en mer de la préfecture maritime de l'Atlantique nous explique : "Le bruit du rotor, le souffle, le stress de la situation... feront que, naturellement, le plaisancier qui a demandé de l'aide ne prendra aucune responsabilité Et c'est exactement la chose à faire ! Chaque pilote a sa propre approche de l'intervention, certains demanderont que les aériens soient déposés, d'autres préfèreront un débarquement sur l'annexe du navire. Il y a autant de stratégies d'hélitreuillage qu'il y a de cas d'hélitreuillages."
Enfin, la millitaire nous donne des chiffres : "En 2019, 4 766 opérations de recherche et de sauvetage en mer ont été conduites sur la façade maritime (et coordonnées par les CROSS Corsen ou Etel). 504 ont impliqué un ou plusieurs moyens aériens, pour un total de 645 heures de vol cumulées."
Un chiffre relativement faible, mais qui montre, s'il était nécessaire, que la disponibilité des moyens de sauvetage est primordiale, et que chaque demande d'intervention doit être mesurée et justifiée. L'administrateur nous explique : "Il est fréquent que des navigateurs subissant le mal de mer ou, simplement, une grande fatigue demandent une assistance médicale, notamment dans la traversée du Golfe de Gascogne. Dans ces cas aussi, les moyens de l'état sont mis en oeuvre pour leur préter assistance sur une situation qui, sur le fond, ne présentait aucun péril ni aucun risque aux personnes."
Précision importante : Lorsqu'il est réalisé par les autorités Françaises, un hélitreuillage sera toujours gratuit, car il concerne la sauvegarde de la vie en mer (La convention SOLAS). Cependant, dans le Golfe de Gascogne notamment, si un plaisancier demande assistance et que le secours est apporté par les autorités Espagnoles, il faut s'attendre à une facturation, qui sera le plus souvent supportée par l'Etat Français.