Dans le Midi de la France, on parle d'un grau pour désigner une ouverture sur la mer. Celui-ci débouche à Port-la-Nouvelle (Aude), au coeur de l'ancien estuaire de l'Aude, par lequel les marins de l'antiquité remontaient à Narbonne. Le delta s'est comblé laissant place aux vastes étangs lagunaires de l'Ayrolles et de Bages et de Sigean. C'est dans cet environnement méridional et lacustre que le Canal de la Robine a été tracé. Il manquait 5 km pour réaliser la connexion avec le Canal du Midi, ce qui fut fait en 1787 avec le creusement d'un canal de jonction.
Une belle allée bordée de pins
Avec son pont en arche et ses bateaux colorés, le Somail constitue le point de départ idéal. C'est un village emblématique du Canal du Midi, au point que le plaisancier ne peut se défaire d'un certain malaise à faire ainsi partie de la carte postale... Tout près de là, à Port la Robine on oblique sur la droite vers la très belle allée nautique du canal de jonction. L'enfilade des écluses offre une superbe perspective bordée de pins et de chênes verts. Les écluses sont en self-service et il faut débarquer un équipier qui commande la manœuvre depuis une borne. Les murs des bassins, les bajoyers, sont arrondis pour mieux résister à la pression de l'eau.
Le canal emprunte le cours de la rivière
Il est possible de faire escale entre les joncs, pour aller visiter le parc musée Amphoralis, installé sur un important site de potiers romains. Les quais de Sallèles-d'Aude sont agréables et semés de palmiers. Le bassin est délimité par une écluse particulièrement haute (plus de 5 mètres) qui amène au niveau de la plaine alluviale. Pour poursuivre vers Narbonne, il faut emprunter le cours de l'Aude sur quelques centaines de mètres. On y accède par la belle écluse de Gailhousty. Elle est bordée par un bâtiment épanchoir, c'est-à-dire qu'il laisse passer le trop-plein d'eau. Elle est constituée de deux bassins dont l'un forme une cale sèche où il est possible de poser un bateau le temps d'un carénage.
Narbonne, comment ne pas lui rester fidèle ?
Le passage en rivière est bref, mais mérite attention pour ne pas s'écarter du chenal non balisé, d'autant que le courant peut être fort. La suite du canal serpente agréablement au milieu des vignes. Il est étroit et forme un long méandre au bout duquel pointent les tours de Narbonne. L'écluse du Gua, marque l'entrée dans la ville. Traverser Narbonne par voie fluviale est une expérience qui se savoure au ralenti : chaque pont, chaque passerelle ouvre sur un paysage nouveau qui se déroule jusqu'au Pont des Marchands. Ce pont couvert portait autrefois la Via Domitia, la voie romaine qui reliait l'Italie à l'Espagne et dont on peut admirer des vestiges parfaitement mis en valeur sur la place de l'Hôtel de Ville. Il est étonnant de passer en bateau sous les boutiques !
Une escale au goût méridional et cosmopolite
Avec ses quartiers historiques et son port en plein centre-ville Narbonne est une escale enchanteresse. La population y est cosmopolite, l'urbanisme harmonieux et on y ressent une vraie et belle atmosphère, surtout lorsque le marché prend possession des belles esplanades de part et d'autre du canal... Des étals à perte de vue portent des produits au goût de soleil et aux parfums méridionaux. Charles Trenet y est resté fidèle, et on le comprend ! Les quais de la sortie sud de la ville sont bordés de bateaux logements. La plupart sont de taille modeste et reflètent la personnalité de son propriétaire : fleurs, sculptures, enseigne de thérapeute… il y en a pour tous les goûts.
Le canal serpente au milieu de rizières jusqu'à Mandirac, où l'on peut voir les rails et les chariots d'un chantier naval traditionnel. Yann Pajot y anime des chantiers d'insertion qui restaurent ici les plus anciens bateaux de nos côtes. À l'aval de l'écluse, le canal est souvent envahi d'herbes qui « bourrent » les hélices. C'est fort dommage, car il est creusé dans une langue de terre entre 2 étangs qui forment un vrai paradis pour la faune lacustre. La réserve naturelle de l'ile Sainte-Lucie est un site boisé et peuplé d'oiseaux, que l'on peut parcourir librement entre étangs et canal avant de rallier Port-la-Nouvelle.
Trucs et astuces locaux
- Les 6 écluses du canal de jonction sont suffisamment proches pour que l'équipier en charge de l'éclusage aille à pied ou à vélo préparer la suivante pendant la bassinée.
- À hauteur de l'écluse de Truilhas, un maraicher bio, cultive et vends des fruits et légumes gorgés de soleil.
- Les quais de Sallèles-d'Aude ne disposent ni d'eau ni d'électricité.
- L'écluse de Gailhousty est un lieu de rassemblement de la jeunesse locale qui n'hésite pas se baigner dans le bassin. Il faut parfois s'imposer pour faire respecter les plus élémentaires règles de prudence…
- Il faut bien arrondir la pointe qui marque l'entrée dans l'Aude. La ligne électrique est un repère commode de l'endroit où il est possible de prendre le lit de la rivière.
- La traversée de l'Aude est interrompue lorsque le niveau de celle-ci excède le niveau + 70.
- Le pont des Marchands à Narbonne est bas et voûté. On l'abordera avec précaution !
- En aval de l'écluse de Mandirac, le canal est souvent encombré d'herbes. Il convient de se renseigner auprès de VNF ou de la capitainerie du port de Narbonne avant de s'engager.
- Le Port de commerce de la Nouvelle n'est pas accessible aux bateaux fluviaux. Attention au courant qui se forme sur le déversoir de l'Etang de Bages et de Sigean.
Le canal de la Robine en résumé :
- Longueur 36 km
- 12 écluses en self-service, commandées par des bornes automatisées
- Vitesse limitée à 8 km/h
- Vignette et taxe de navigation : oui
- Établissement gestionnaire : VNF
- Gabarit : 40,50 x 6,00 m
- Tirant d'air mini : 3,20 m
- Tirant d'eau mini : 1,30 m
- Loueur : Nicols au Somail
- Période de chômage : consulter le site de VNF
- Application smartphone : non