C'est finalement le 22 août, un dimanche matin que nous prévoyons de rejoindre la mer au Grau-du-Roi. De ce port de pêcheur, l'accès à la Méditerranée se fait aux horaires d'ouverture du pont tournant : 4 fois par jour. La météo annonçant une dégradation dans l'après-midi, nous voulons utiliser cette matinée pour profiter de cette première navigation en eau salée.
A 7h00 nous mettons en route pour nous mettre en attente devant le pont et profiter de la première ouverture. Mais à nouveau la mécanique nous rappelle à l'ordre : pas de démarreur sur le moteur bâbord… Après 2 heures de mécanique peu accessible, le fautif reprend du service. Et c'est finalement à 9h30 que nous partons, le pont ouvrant à 10h15. Cette fois ca sent la mer !
Une navigation en mer pleine de bonnes surprises
Depuis le Grau-du-Roi nous visons à l'origine le port de Sète. C'est le point d'entrée le plus proche pour embouquer le Canal du Midi. Mais Gipsy, tellement heureux de retrouver l'élément salé, nous pousse à poursuivre. C'est finalement au Grau d'Agde que nous choisissons de prendre l'Hérault qui rejoint le Canal à Agde.
La bonne surprise vient du comportement du bateau en mer. En effet, avec les 2 moteurs lancés à 1500 tr/mn, il navigue tranquillement à 8,3 N (nous nous attendions à une navigation autour de 7 N). Des essais sur un seul moteur lui aussi à 1500 tr/mn donne une vitesse de 6,7 N. Finalement nous mettons 5 heures pour réaliser les 35 milles du voyage, soit 7 nœuds de moyenne.
Avec un vent de face et un petit clapot, le bateau a un comportement très sain et à part saler le pont et les vitres du carré, il donne envie de mettre le cap vers le large. La Corse ou les Baléares semblent à portée d'étrave… mais ce sera pour une autre croisière.
Découverte de la navigation en canal
C'est par l'écluse ronde d'Agde que nous gagnons le Canal du Midi. Une écluse très particulière puisqu'elle possède trois portes. En partant depuis la mer (le point le plus bas) pour regagner Toulouse, nous allons monter toutes les écluses avant d'atteindre le point haut (dit du partage des eaux) avant de redescendre vers l'Atlantique. Ce qui veut dire concrètement que nous nous présentons devant des écluses vides qui se remplissent quand nous sommes dedans pour nous faire monter.
Ceci implique donc de débarquer un équipier avant l'écluse pour qu'il puisse prendre nos amarres une fois le bateau rentré dedans. En effet, le dénivelé de chaque écluse (entre 2 et 3 m) ne facilite pas la manœuvre depuis le pont de votre bateau.
Ceci étant précisé, les écluses du Canal du Midi, toutes électrifiées et parfois même automatisées sont pour chacune l'occasion de découvrir un paysage nouveau. Si les éclusiers (du personnel VNF) se sont toujours montrés courtois et arrangeants, le grand nombre d'écluses finit un peu par lasser. En effet, nous en avons franchi près de 60 pour gagner Toulouse en 6 jours de navigation (soit environ 200 km de navigation).
La rançon du succès
En attaquant le Canal du Midi dernière semaine d'août, nous espérions trouver la voie libre, tout au moins pas trop encombrée. Mais visiblement, les locataires amateurs de croisières fluviales ne l'entendaient pas de cette oreille et nous avons souvent partagé le sas de nos écluses à 2, 3 voire même 4 bateaux. Quand il ne fallait pas prendre la queue et attendre la possibilité de passer. Au plus fort de la fréquentation, nous nous sommes retrouvés 10 bateaux à attendre devant le sas de l'écluse double de Péchlaurier…
De même, les successions d'écluses, nous donnent parfois l'impression d'être les vedettes du Festival de Cannes. La célèbre échelle de 7 écluses de Fonseranes (Béziers) est un haut lieu touristique visité et nous l'avons franchi sous le crépitement des appareils photo. Idem à l'approche de Toulouse où l'on comprend bien que le canal est une zone agréable pour les promeneurs du dimanche venus là pour prendre l'air, faire courir leurs enfants ou sortir leur chien…
Des paysages qui méritent le détour
Il faut dire que les paysages du Canal du Midi sont parfois magnifiques. Hélas, la maladie qui frappe les platanes (le chancre coloré) a obligé à de nombreux abattages (26 000 arbres abattus et brulés depuis 2006). Heureusement, un plan pour les replanter est en cours, mais il faudra attendre de nombreuses années avant que les nouveaux venus atteignent des hauteurs de plus de 20 m comme les platanes qui restent encore debout actuellement.
C'est la partie la plus méridionale qui est la plus touchée par la maladie avec de longues portions sans aucun platane. À l'approche de Toulouse, le Canal est encore indemne et présente toujours les paysages qui ont forgé l'image du Canal du Midi.
Une arrivée sans tambour ni trompette
Nous avons atteint Port Saint-Sauveur au centre de Toulouse le dimanche 29 août vers 19h. Juste à temps pour répondre présent au travail le lundi matin ! Notre loch enregistre alors la distance de 927 km depuis le port de Savoyeux. Une belle ballade au travers de la France réalisée en 18 jours. Nous n'avons pas chaumé, pas pris beaucoup de temps aux escales et fait ce trajet en mode convoyage.
Notre Amerglass qui affiche presque 50 ans de navigation n'avait subi aucune vérification avant le départ, d'où sans doute les petits désagréments mécaniques que nous avons subis. Mais le fait d'avoir réalisé tout ce parcours sans jamais être bloqué montre bien la faisabilité de notre projet futur.
Reste maintenant à reprendre tout le bateau à zéro, à le remettre en état, à le fiabiliser pour le préparer pour le grand voyage autour de l'Europe.
À suivre…