Un phénomène météorologique jamais vu
Il y a un an, l'ouragan IRMA dévaste les Petites Antilles, et notamment Saint-Martin et Saint-Barthélemy. Des vents de plus de 300 km/h ont traversé les îles, détruisant tout sur leur passage. À Saint-Martin — plus durement touché — 85 % des maisons sont détruites ou endommagés et l'intégralité de la flotte des bateaux présents sur l'île, a été touchée.
"Nous n'avons appris la classification d'IRMA que 3 jours avant son passage. Une semaine avant, le National Hurricane Center annonçait la préparation d'un phénomène jamais vu au nord de l'Équateur" explique Bulent Gulay, président de Métimer, l'association des professionnels de la mer à Saint-Martin.
En effet, IRMA est le plus puissant ouragan enregistré dans l'Atlantique Nord, classé en catégorie 5 — la plus élevée sur l'échelle de Saffir-Simpson. Si l'île de Saint-Martin est coutumière des ouragans, elle n'est pas préparée à affronter IRMA. "Nous savons que nous sommes en zone cyclonique, mais les habitants ne pensent pas à faire contrôler leur structure" détaille Bulent.
Dans tous les cas, il aurait été impossible de maîtriser un phénomène météorologique si puissant : "Malheureusement, il n'y a pas de solutions miracles… On sait gérer les cyclones jusqu'à force 2/3, voir un petit 4, mais après, c'est impossible de faire quoi que ce soit" réplique Bulent.
Les préparations à terre
À terre, la population s'est préparée avec les moyens du bord à affronter la plus grande tempête de l'île. Les maisons ont été barricadées et les habitants réfugiés dans les salles de bain — "les pièces les plus sécurisées, car souvent il n'y a pas de fenêtres" explique Bulent.
D'autres ont préféré quitter l'île. Des avions militaires et des bateaux ont été affrétés pour emmener les enfants ailleurs.
D'autres encore ont décidé de prendre la mer avec leur bateau, rejoignant le Sud, vers le Venezuela ou encore les Grenadines et sont revenus après. "On ne sait pas combien de personnes exactement, car il n'y a pas de contrôle quand on quitte un port. On pense qu'il y a environ 15 à 16 000 personnes qui ont fui. Et un an après, il y a environ 9000 à 9500 personnes qui ne sont pas revenues" étaye Bulent.
Il n'y a pas d'images du cyclone puisque les caméras de la ville ont toutes été détruites par IRMA. Ont suivi ensuite José et Maria quelques jours plus tard, qui ont épargné les Petites Antilles du nord, déjà bien touché par IRMA.
Les préparations en mer
Saint-Martin est un petit paradis pour la croisière et les bases de charter y sont nombreuses. Avant IRMA, l'île abritait une base de 175 bateaux de charter, répartis entre différents loueurs, dont la compagnie Sunsail/The Moorings, basée à Oyster Pond avant l'ouragan.
"Avant que le cyclone n'arrive sur l'île, on ne peut pas savoir comment ça va se passer. On se base sur les anciens ouragans qui sont passés, mais IRMA était hors-catégorie" détaille Bullent.
Et effectivement, malgré toute la préparation nécessaire, cela n'a pas été suffisant pour "sauver" la flotte de Saint-Martin. "On applique les conseils des assurances au niveau des amarres, mais leurs recommandations sont souvent impossibles à mettre en place… Essayez de glisser des pare-battages sous un catamaran…" ajoute Bullent.
Tout le monde a donc fait du mieux qu'il pouvait pour protéger les embarcations. Les bateaux ont été éloignés du quai, avec 3 amarres à l'avant et 3 à l'arrière. En mer, ils ont été amarrés sur plusieurs bouées. Les voiles ont été retirées, les bômes et les drisses attachées. "On n'a rien laissé dehors. Même les plus grosses annexes ont été enlevées de leurs bossoirs et attachées à l'avant des bateaux"
Pendant 2 à 3 jours, l'ile s'est donc préparée à affronter IRMA, chaque entité gérant ses bateaux. Certains, plus habitués que d'autres à ces protocoles — comme le Yacht Club de Saint-Martin ou encore la base de location Sunsail/ The Moorings — ont préparé leurs bateaux en ce sens. Les plaisanciers et propriétaires de bateaux qui ont quitté l'île, ont préféré laissé leurs bateaux dans des chantiers.
"Dans les iles, il y a une vraie préparation à la période cyclonique. Les plaisanciers sont sensibilisés à cette éventualité et les charters s'arrêtent" explique Bulent.
Mais malgré les préparations, une grande partie des catamarans ont été retournés. Les taquets des pontons et des quais ont sauté. Car si l'ouragan génère de forts vents, il génère également une montée des eaux — qui a provoqué un effet chasse d'eau, notamment à Anse Marcel, une marina tout confort niché dans un cul-de-sac au nord de l'île — mais aussi son lot de tornades.
Quel bilan en tirer ?
Pendant 6 heures, IRMA a quasiment tout détruit sur son passage, à terre comme en mer. "Tous les effets de l'ouragan se sont déroulés en 12 heures, mais au final, il n'aura fallu que 6 heures. Ça a commencé vers 2 heures du matin avec le plus gros des effets vers 6 heures. À 8 heures, le calme était revenu" explique Bullent.
Avant de conclure : "Avec IRMA, on a appris qu'on était tout petit. C'est impossible d'en tirer des leçons. Soit on se prépare pendant 2/3 jours à terre, soit on se dit qu'on prend la mer, mais on ne sait pas à quoi s'attendre. Pourtant, on est habitué aux cyclones. Mais chacun d'entre eux est différent."
Luis (force 3 à 4) en 1995 avait fait de nombreux dégâts aux Antilles et notamment en Guadeloupe avec une montée des eaux de 6 m, ou encore l'ouragan Lenny (force 4) en 1999 qui avait fait de nombreuses victimes.
En mars 2018, le coût du passage d'Irma est évalué à 3 milliards d'euros pour les seules îles de Saint-Martin et Saint-Barthélemy. Pourtant, depuis, les deux îles ont remonté la pente et s'ouvrent de nouveau au tourisme.