Yvon Poutriquet, arbitre de la Fédération Française de Voile, a été appelé à l'arbitrage de la Cap Martinique. Entre deux arrivées, il nous rappelle l'essence même de son métier : veiller à ce que chaque compétiteur évolue dans un cadre réglementaire juste et transparent, garantissant ainsi l'esprit sportif et la sécurité de tous les participants.
Pouvez-vous vous présenter ?
Je m'appelle Yvon Poutriquet, et je suis arbitre national de voile depuis une quinzaine d'années. Originaire des coins Dinard-Pleurtuit-Saint-Malo, je suis récemment retourné dans ce pays de mon enfance. Pendant de nombreuses années, j'ai été moniteur de voile et président d'un club de voile, ce qui m'a permis de naviguer, toujours avec grand plaisir, dans la baie de Saint-Malo.
Au cours de ma carrière, j'ai eu l'opportunité de participer à plusieurs courses au large, telles que la Route du Rhum, pour laquelle j'ai officié en tant qu'adjoint au comité de course il y a un an et demi, ainsi que la transat Paprec, dont j'ai été président du comité de course, au départ de Lorient en direction de Saint-Barthélemy. J'ai également pris part au Retour à la Base avec les Imocas, aux côtés de Jean-Philippe Cau, président de Lorient Grand Large et du comité d'organisation de la Cap Martinique. Par ailleurs, je participe tous les deux ans au Tour de Bretagne à la voile avec les Figaros. Être arbitre nécessite d'être bien actif, et à la retraite aussi !
Il y a deux ans, j'ai rejoint l'équipe pour la première édition de la Cap Martinique, où nous avons vraiment bien sympathisé ; je dirais que la mayonnaise a pris ! C'est avec grand plaisir que je suis revenu pour cette 2e édition.
Êtes-vous seul arbitre sur la Cap Martinique ?
Non, plusieurs arbitres sont présents sur la course. Il y a tout d'abord le président du comité, qui est en charge de la régularité de la course. Il donne le départ, vérifie si les participants suivent le parcours correctement, et valide les arrivées. En amont, au moment du départ, des contrôleurs d'équipements s'assurent que les bateaux respectent les normes de la classe IRC et les règles spéciales offshore (RSO) (NDLR: Règles communes aux courses au large internationales). Ensuite, il y a un président de jury et deux assesseurs chargés de traiter les infractions aux règles. Par exemple, s'ils constatent qu'un skipper doit partir avec 3 spis mais en utilise 4, cela peut entraîner une réclamation. Ils sont également là pour résoudre les éventuels différends entre les participants.
Comment s'est passée cette transatlantique ?
Il y a simplement eu un petit rappel à l'ordre, car des skippers avaient oublié de soumettre leur déclaration de voile en temps et en heure. Il n'y a pas eu de faits de tricherie. La Cap Martinique reste une course très conviviale, et les skippers respectent scrupuleusement l'ensemble des règles.
Expliquez-nous en quoi consiste le classement temps réel-temps compensé ?
L'IRC est une règle de jauge conçue pour permettre une compétition équitable entre des bateaux aux caractéristiques diverses. Pour simplifier, imaginez une course entre une 2CV et une Ferrari. Bien que les deux parcourront la même distance, admettons 1 000 km, l'un le fera en moins de 20 heures et l'autre en moins de 10 heures. Le ''rating'' de chaque bateau, son coefficient, est calculé en prenant en compte des mesures telles que la longueur, le poids, le tirant d'eau, la forme de la quille, la surface de voilure et d'autres spécificités. L'IRC prend en considération des caractéristiques variées telles que les spinnakers asymétriques, les bout-dehors, les quilles doubles-ailettes-basculantes, les gréements auriques, les ballasts à eau, les code zéros, les dérives latérales... et tente de les traiter de manière équitable.
Le résultat de cette évaluation est le TCC (Time Corrected Coefficient) du bateau, qui représente son rating. Les TCC de l'IRC vont de 0.750 à 1.900, la plupart des croiseurs-coureurs se situant entre 0.900 et 1.100. Les chiffres après la virgule sont des millièmes, un millième équivalant à 3,6 secondes par heure. Ainsi, plus un bateau est rapide, plus son temps sera ajusté par un coefficient supérieur à 1. À l'inverse, un bateau moins rapide aura un coefficient inférieur à 1.
À la fin d'une course, le temps réel de chaque bateau (le temps qu'il a mis pour parcourir la distance) est ajusté en fonction de son TCC pour calculer son temps corrigé. Ainsi, le premier bateau à franchir la ligne d'arrivée n'est pas nécessairement le vainqueur de la course ; c'est le bateau qui, une fois son temps réel ajusté, affiche le temps corrigé le plus bas qui remporte la victoire.
Pour quand le prochain arbitrage est-il prévu ?
Je serai à Lorient pour célébrer le centenaire des Jeux Olympiques avec les 6MJI et 8MJI, qui étaient des bateaux traditionnels lors des JO de 1924. Ensuite, direction Cannes et Saint-Tropez pour participer aux Régates Royales.