Alain Maignan, facteur résidant en Ille-et-Vilaine a consciencieusement économisé ses jours de congés pendant quatre ans afin de concrétiser son rêve : effectuer le tour du monde en solitaire à la voile, sans escale ni assistance, à bord d'un simple bateau de plaisance. À 52 ans, Alain Maignan, homme ordinaire et amateur de voile, incarne l'exception.
Pas une vocation pour la mer
Issu d'une famille d'agriculteurs, il n'a pourtant rien d'un "marin-né". C'est vers l'âge de 30 ans qu'il acquiert son premier voilier, à seulement 45 kilomètres de Saint-Malo, sa ville natale. À cette époque, l'idée de réaliser un tour du monde ne traverse pas son esprit, bien que les récits d'Eric Tabarly aient toujours nourri ses rêves marins. Son apprentissage de la navigation se fait "en lisant des bouquins" et en naviguant aux côtés d'autres skippers. Progressivement, il développe une passion pour ce sport, jusqu'à devenir un navigateur aguerri.
Une Route du Rhum en pirate
Son parcours le conduit à participer en 2002 à la Route du Rhum en tant que "pirate", intégrant la course de manière non officielle. Cependant, pour Maignan, ce n'est pas la fin du périple. L'idée d'un tour du monde par les trois caps, à la manière du Vendée Globe, germe en lui. Après avoir partagé son projet avec sa femme - une étape cruciale pour lui - et obtenu son accord, l'aventure commence réellement.
Pas de vacances pendant 4 ans
Dépourvu de sponsors, Alain Maignan, facteur besogneux, sacrifie ses vacances pendant quatre ans pour disposer d'environ 180 jours nécessaires à la réalisation de son tour. Son périple débute le 7 octobre 2006, une semaine après avoir quitté son travail le 1er octobre, avec une échéance de retour au travail fixée au 16 avril 2007. La préparation est loin d'être optimale : son bateau, un Sun Rise de 10 mètres âgé de 20 ans, est amélioré les week-ends, et la préparation physique se limite aux conseils d'un médecin généraliste. Quant à la nourriture, faute de moyens pour du lyophilisé, il embarque 1,3 tonne de conserves, compromettant le poids idéal. Il explique avoir optimisé l'espace à bord en retirant plusieurs couchettes pour accueillir la cargaison substantielle de nourriture nécessaire à son expédition.
Pas de record, mais un retour dans les temps
Le jour du départ du port de La Trinité approche. Pour Maignan, le but n'est pas de battre un record, mais de revenir à temps pour reprendre son travail. Trois semaines après le départ, Alain Maignan se retrouve à affronter une mer agitée où il se casse des côtes en tombant sur la barre. Malgré ces péripéties, il grimpe en haut du mât pour réparer des drisses défectueuses, mais se retrouvant coincé en haut. Il se rappelle : "J'étais coincé là-haut, je ne pouvais plus redescendre ! Quand je suis descendu, je me suis dit 'Tu vas réussir ton tour… Mais je n'en avais pas fait la moitié !'"
Les épreuves physiques se multiplient, avec plusieurs chavirages dans l'océan Indien et le Pacifique. Dans ces moments difficiles, seul en mer et hors de toute compétition officielle, Alain Maignan partage ses pensées avec son bateau, envisageant même la possibilité de sombrer ensemble : "J'ai chaviré plusieurs fois : trois fois dans l'Indien, quatre fois dans le Pacifique. Là, ça a été dur. J'étais tout seul, pas dans le cadre d'une course. Je me disais 'Si on doit couler, on coule tous les deux (en parlant à mon bateau) et puis c'est terminé.'"
185 jours plus tard, il réussit son pari en rentrant dans le port de La Trinité.
