Interview / IMOCA Macif, Charlie Dalin nous explique les choix de conception

Quelques jours avant sa mise à l'eau le 24 juin 2023, Charlie Dalin nous a reçus au chantier CDK pour nous présenter son nouvel IMOCA Macif. Il nous explique ses choix de conception, tant par rapport à son ancien voilier qu'aux derniers 60 pieds mis à l'eau.

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Un voilier issu de l'expérience Apivia

Pour son deuxième IMOCA neuf mis à l'eau le 24 juin 2023, le skipper Charlie Dalin, 2ème du dernier Vendée Globe, a pu s'appuyer sur l'expérience de son précédent bateau, comme il nous l'a expliqué lors d'une visite, quelques jours avant la sortie de chantier : "L'objectif était de garder les points forts d'Apivia et de gommer les faiblesses, principalement le portant dans la mer formée. Quant à l'ergonomie, tout a été réfléchi et testé sur une maquette à l'échelle une en contreplaqué, jusqu'à la forme de la marche de descente que l'on a refaite plusieurs fois."

Lorsqu'on l'interroge sur l'influence des choix des IMOCA neufs mis à l'eau depuis le dernier Vendée Globe, il rappelle le temps nécessaire à la conception d'un bateau : "Cela représente 60 000 heures de travail et 50 personnes. La conception a débuté à l'automne 2021 et l'usinage des premières pièces en mars 2022. Par exemple, le choix de mettre la zone de vie à l'arrière du cockpit avait été pris avant que l'on constate, à sa mise à l'eau, que Malizia avait fait le même choix."

Une carène pour la mer formée

Lorsque l'on découvre la coque du nouvel IMOCA Macif, on peut distinguer un certain nombre de différences avec Apivia, toutes tournées vers la performance, notamment dans la mer formée. Les volumes de carène ont été avancés, avec une étrave plus imposante et un arrière légèrement plus étroit. Un tulipage des formes avant limite la surface mouillée, tout en dégageant les projections d'eau. Une virure ou redan, à mi-hauteur, court sur les deux tiers avant du bateau, et dégage, là aussi, l'eau, comme sur les coques de bateaux à moteur, qui atteignent aujourd'hui des vitesses comparables. Le franc-bord est plus important, comme imposé par la jauge.

Charlie Dalin ajoute néanmoins : "Le franc-bord plus important était déjà dans notre intention pour mieux gérer la mer formée. Nous avons passé la nouvelle carène en bassin numérique virtuel avec des vagues et lorsque l'on compare avec celle d'Apivia, on diminue la traînée de 10 à 12 % lorsqu'elle est à son pic et que l'on bute dans une vague."

Le frégatage à l'avant a également été supprimé pour éviter d'embarquer de l'eau sur le pont à forte vitesse, mais a été conservé plus en arrière pour réduire les poids, à la fois des cloisons et des murailles.

Crédits : Maxime Horlaville - Disobey Macif
Crédits : Maxime Horlaville - Disobey Macif

Structure et aérodynamisme du pont

Contrairement à la majorité des nouveaux IMOCA mis à l'eau, Macif conserve un pont creux à l'avant, un choix que Charlie Dalin justifie structurellement : "La bosse est un peu plus sur le côté. Nous avons fait des calculs éléments finis qui montrent que les efforts circulent mieux."

Le roof, bas, est prolongé par un carénage en avant du mât. Celui-ci apporte à la fois un avantage aérodynamique et de volume pour les tests de stabilité du bateau. La circulation sur le pont reste proche de l'ancien bateau, même si l'accès à l'intérieur est plus avancé.

La bassine arrière, rehaussée, facilitera la manutention des voiles en solitaire, en se dispensant de l'usage d'une drisse pour les lever.

Un espace de vie et de manœuvre condensé et ventilé

L'autre évolution majeure par rapport à Apivia est l'inversion de la zone de vie et du cockpit de manœuvre. Celui-ci se position proche du pied de mât, tandis que l'espace de vie est en arrière. On accède au cockpit par 2 marches et deux panneaux avec de multiples stades d'ouverture. Charlie Dalin explique : "Lorsqu'il faisait chaud, on avait le choix entre être mouillé par la transpiration ou par l'eau qui rentrait si on laissait le panneau ouvert. On a donc ajouté une petite trappe de ventilation sur la face arrière et la possibilité d'ouvrir en protégeant la descente."

Les espaces sont condensés, afin de limiter les déplacements. Le skipper précise : "Le meuble de winch est plus compact et je peux y accéder sans me lever. On a aussi travaillé la bulle pour une meilleure visibilité en changeant les angles pour un vitrage plus grand. En avançant le cockpit, on a aussi gagné 10 cm en hauteur. Je me tiens presque debout !"

Dans la zone de vie, les mouvements sont eux aussi limités, avec une bannette sur tribord et un siège morphologique sur bâbord duquel le marin peut atteindre sa table à carte, mais aussi son réchaud. "Tout est à un seul endroit. Avant je devais matosser et passer d'un bord à l'autre. Je faisais tout en position semi-assise. Là, je mangerai assis. Et la colonne de winch n'est qu'à 1,50 m."

Du temps de mise au point

Pour Charlie Dalin, il est temps de fiabiliser le bateau, avec un objectif de 30 000 milles d'ici au Vendée Globe 2024, qui semble atteignable : " On vise une boucle complète avant le Vendée Globe pour tester le matériel. Apivia avait été mis à l'eau plus tard et il y a eu le Covid. Là, il y a une transat de plus. La majorité de l'équipe était dans l'équipe Apivia. On part donc de moins loin."

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