Voie d'eau originale, l'Atlantic Intercoastal Waterway parcourt la côte Est des Etats-Unis, en parallèle du littoral, offrant un plan d'eau abrité et des connexions régulières avec l'Océan. Nous avons testé la partie sud en Floride.
ICW : Un changement de navigation dérourant après les Antilles
Pour le voyageur arrivant des Antilles, une croisière sur l'Intracoastal Waterway (ICW) succède sans doute à quelques semaines de vagabondage nautique dans les Bahamas. Il faut le dire sans détour, le contraste est déroutant. Finis les eaux turquoises et les mouillages solitaires, et bienvenue en Floride. Il peut être nécessaire de prendre quelques heures d'acclimatation avant de se lancer dans ces évolutions fluviales et champêtres si éloignées de nos habituelles journées de navigation maritime.
Quelques formalités incontournables pour entrer aux USA
Concernant les formalités d'entrée, il est officiellement nécessaire, pour un citoyen étranger, de posséder un visa B1/B2 pour prétendre s'introduire avec un navire privé. En pratique, il est envisageable de rentrer aux USA en avion ou en ferry, à partir des Bahamas (Nassau, Bimini, ou Freeport). On peut ensuite retourner chercher le bateau. Et l'on reviendra sur le territoire américain muni de l'autorisation de séjour de 90 jours que les services d'immigration ont consenti préalablement (à condition d'avoir une adresse de séjour aux USA.) Il est possible d'acquérir le Decad (vignette annuelle pour le navire) pour 30 $ en ligne. Il ne restera plus, alors, qu'à solliciter un permis de croisière (par internet) à l'arrivée en Amérique. Bien entendu, que ce soit le visa B1/B2 ou l'entrée préliminaire par avion ou ferry, tout ceci coûte quelques centaines de dollars… mais, après, à nous l'Amérique !
Naviguer sur l'ICW demande un peu de préparation avant d'appareiller
Une fois les palmes, masques et tubas bien rangés dans leur coffre, place aux nouvelles habitudes liées à l'"intracoastal water way of life". Il s'agit, à présent, de progresser dans des chenaux larges de seulement quelques dizaines de mètres et agrémentés d'une foule d'obstacles divers, dont de nombreux ponts. Il est également prudent de s'enquérir avant le départ de l'endroit où on envisage de planter l'ancre, car ce n'est pas possible n'importe où, loin de là.
Bien s'assurer de la possibilité de franchir les ponts
La journée commence par une étude approfondie de la cartographie, afin de repérer les difficultés à venir et surtout de s'assurer qu'on va pouvoir passer. Les choses sont plus simples avec un bateau à moteur, car de nombreux ponts fixes admettent des tirants d'air de 64 pieds (soit environ 20 mètres). Mais il en est aussi qui culminent à 3 mètres (rares) et ne peuvent s'ouvrir que sur demande par VHF ou téléphone.
Une navigation qui demande beaucoup de vigilance et de concentration
Une bonne concentration est essentielle dès le lancement des machines, avant même de déraper l'ancre. Pas question d'appareiller avec de la brume plein les cheveux en se donnant un quart d'heure pour être au top. Sitôt que le navire n'est plus accroché au fond, une vigilance maximum est indispensable pour éviter de s'échouer ou de caresser une pile de pont. Ceci dit, les autorités font montre, dans ce pays, d'un certain respect pour le bien de leurs concitoyens. En effet, les ouvrages en béton sont très souvent garnis de bastaings en bois massif destinés à prévenir des dommages sévères aux malchanceux qui viendraient s'y frotter…
Décors variés pour une navigation bucolique, mais pas frénétique…
Pourtant, de nombreux agréments contrebalancent les menus aspects contraignants précédemment évoqués. D'ailleurs, naviguer à la campagne, quoi de plus poétique ? Les scénographies se succèdent, avec parfois seulement quelques détails pour les distinguer. Puis c'est un changement radical. D'immenses étendues liquides ouvrent un large horizon, au détour d'une interminable rangée de coquettes maisons de vacances rehaussées de pelouses impeccables. Nombre d'entre elles sont également pourvues d'un charmant wharf en bois qui héberge un runabout surmotorisé.
Vitesse maximum et limitation de sillage : des différences d'interprétation
Les contradictions aussi fleurissent à merveille… Ainsi, telle pancarte "no wake" recommande d'adopter une vitesse modérée afin d'éviter les sillages destructeurs, cependant qu'un autre écriteau proche fixe une limite de célérité maximum à 30 nœuds !!! Consignes qui sont, d'ailleurs, parfaitement suivies. Par exemple, on croisera une vedette progressant sagement à 7 nœuds avec ses deux moteurs de 200 cv. Et simultanément, un motor-yacht de 60 pieds se rend à l'apéro familial à plus de vingt nœuds accompagné de ses vagues d'un mètre cinquante de haut.
Un faune riche sur l'ICW
La vie animale est foisonnante dans cet univers liquide. Aigrettes et pélicans semblent y faire bon ménage, cependant que sous la surface, les dauphins s'amusent du style pataud des nombreux dugongs dûment respectés et protégés.
Si les poissons sont en proportion des pêcheurs amateurs, alors on dira que l'ICW est poissonneux…
Une autre façon de naviguer
L'intracoastal waterway offre un style de navigation qui en vaut bien d'autres. La liste des petits plaisirs faciles liés à la fréquentation de l'ICW serait sans doute ennuyeuse et c'est pourquoi je conclurais sur cette simple remarque : ici, on peut stopper la navigation pour prendre le temps de déjeuner. Sympa, non ?