Les mariniers n'emploient jamais le terme de péniche, à part pour des chaussures notoirement surdimensionnées ! Ils parlent de bateaux de commerce, ou de 38 mètres lorsque leur bateau est au gabarit Freycinet, du nom de l'ingénieur qui a établi cette norme pour la longueur des écluses. Auparavant, celles-ci dépassaient rarement les 30 mètres. Quand le mouillage (tirant d'eau admissible) le permet, ces bateaux peuvent charger jusqu'à 350 tonnes de fret.
Du halage à la motorisation
Les gabares et chalands du passé étaient halés à col d'homme ou par des bœufs ou des chevaux. Plus tard, des services de touage à l'aide de petites locomotives et tracteurs ont été mis en place le long de certaines voies d'eaux, jusqu'à la motorisation qui a rendu les bateaux automoteurs. Cet âge d'or de la batellerie artisanale n'a pas duré. Le métier a périclité, vaincu par la concurrence du rail et il faut bien l'avouer par une tradition de coulage qui consistait trop souvent à se servir sur la cargaison.
Jusqu'à 3000 tonnes de fret
Si quelques 38 mètres subsistent, ils sont minoritaires face aux grands gabarits, comme les automoteurs rhénans longs de 95 mètres et qui circulent jour et nuit et peuvent charger 3000 tonnes de fret. Les convois poussés que l'on voit sur les grands fleuves sont constitués d'un pousseur et de barges accouplées. De nombreux "commerces" ont été convertis en péniche-hôtels qui proposent des séjours nomades à des passagers fortunés. D'autres, les plus nombreux ont été vendus comme bateaux-logements pour échapper au déchirage (destruction).
La tradition de l'élégance
Si la cale des 38 mètres offre un superbe espace pour y aménager un logement, les bateaux les plus populaires sont sans conteste les Luxemotor. Leur étrave fine et leur arrière rond leur confèrent une ligne particulièrement élégante. Plus ronds mais tout aussi élégants sont les Tjalk, ces voiliers traditionnels hollandais à dérives latérales. L'espace y est mesuré mais leurs dimensions raisonnables leur permettent de passer partout, aussi bien pour naviguer que pour stationner.
La coche de plaisance, une catégorie récente
Désormais aux écluses, on voit surtout des bateaux de plaisance. Des vedettes hollandaises en acier, mais aussi et surtout des coches de plaisance, une catégorie administrative créée pour désigner des bateaux fluviaux jusqu'à 15 mètres. Ces coches peuvent être nolisées, c'est à dire exploitées sans permis par les loueurs fluviaux. Dans ce cas, leur usage est limité à des voies d'eau maniables. Après une mise en main complète, le locataire se voit délivrer une carte de plaisance à la validité limitée. Il peut ainsi circuler librement pour la durée du séjour et sur le parcours prévu.
On embarque à pied ou en voiture
On croise également sur les canaux de surprenants bateaux anglais, les Narrow boats, très étroits pour s'adapter au gabarit local. A l'inverse, les imposants paquebots fluviaux fréquentent les grands fleuves, tandis que l'on peut croiser ici et là des reconstructions de gabares traditionnelles qui assurent des sorties de quelques heures comme bateau à passagers. Enfin, sur la Loire et la Seine en particulier, des services de bacs sont assurés pour pallier le manque de ponts.
Un convoyage sous protection
Certains canaux constituent des voies de liaison commodes entre deux mers. On peut par exemple rallier l'Atlantique à la Méditerranée par le Canal des deux mers, ou la Manche à l'Atlantique par le Canal d'Ille et Rance et la Vilaine. De nombreux marins choisissent ce mode de convoyage lorsque leur tirant d'eau le permet. Il importe de préparer son bateau en conséquence pour le préserver des abrasions et salissures en plaçant des défenses horizontales et en étendant des prélards, des bâches de protection le long des bordés. Le mieux reste d'ajouter des glissoirs, des pièces de bois suspendues par deux bouts qui transforment pour un temps son coursier des mers en bateau de servitude prêt à tout endurer.
Signe des temps, le tourisme fluvial est également devenu fluvestre. Un néologisme qui désigne toutes les activités de loisir qui se déroulent le long des voies fluviales. Il n'empêche que même si on ne fait que les suivre à vélo, connaître la variété des bateaux qui y circulent permet de mieux les comprendre.