A cheval entre l'Ille-et-Vilaine (dont il dessert 16 communes) et les Côtes d'Armor (12 communes), le canal d'Ille et Rance prend naissance à Rennes pour se jeter dans la mer, via un bief maritime, entre Dinard et Saint Malo, au niveau de l'usine marémotrice sur la Rance.
Au long de ses 85 kilomètres de longueur, ses eaux passent de la salinité de la Manche à la douceur de ses nombreux affluents, avant de rejoindre la vie rennaise trépidante.
Le canal est achevé en 1832, après 28 années de travaux. Son dernier bief, qui se confond au lit historique de la Rance, depuis l'écluse du Chatelier jusqu'à celle de Dinard a été mis en place en 1961, avec l'inauguration du barrage sur la Rance.
Le canal est maintenu à niveau par 8 rigoles qui transportent l'eau de 5 retenues, dont l'étang de Boulet, à Feins.
Quatre tronçons, quatre ambiances
Le canal se divise en quatre tronçons principaux, bien distincts les uns des autres.
De Dinard / Saint Malo à l'écluse du Chatelier, le domaine maritime du fleuve Rance ouvre sur une pratique de la navigation proche de celle qu'on connaît dans la baie de Saint-Malo. Beaucoup de hauts-fonds (notamment devant Saint-Suliac) et des équipements de qualité. Domaine maritime signifie que la SNSM intervient, au besoin, sur ce bief. La réglementation maritime (armement côtier) s'applique dans cette partie, y compris pour ce qui a trait aux limitations de vitesse. Attention, les contrôles de vitesse et les verbalisations sont courants, pour protéger les nombreux pratiquants sur et sous l'eau de la Rance.
Les chenaux de navigation sont visibles et doivent être respectés, la présence du fameux barrage ayant tendance à envaser le fleuve dans ses coudes, notamment après la cale de Mordreuc.
Le port de Plouer-Sur-Rance offre 240 emplacements plus 10 pour les visiteurs. Tous disposent de l'eau et de l'électricité.
Plus en amont, dans la zone qui assèche de la Rance (fond de vase mou), La moinerie offre un havre de paix et de repos. Attention, aucun service ni commerce à proximité.
Entre la cale de Mordreuc et l'écluse du Chatelier, il est recommandé de bien longer les balises et de surveiller avec attention les niveaux d'eau. La zone est sujette à un envasement massif et il est fréquent que des bateaux, y compris à faible tirant d'eau, s'échouent.
Le second tronçon du canal prend naissance après l'écluse du Chatelier, jusqu'au pont de Dinan, premier faible tirant d'air du canal.
Quelques centaines de mètres après l'écluse, la réglementation devient fluviale, au niveau de la cale de Taden. La zone est particulièrement active. On rencontrera pèle mêle baigneurs, kayakistes, plaisanciers et pêcheurs.
Le vieux pont de Dinan offre un tirant d'air de 2,50 mètres.
Il ne faut évidemment pas manquer de s'arrêter à Dinan et visiter, après avoir remonté le Jerzual, la vieille ville et le château de Dinan, qui offre un impressionnant point de vue sur la vallée de la Rance.
Remontons jusqu'à Evran, après avoir passé une dizaine de paisibles écluses avec d'aimables éclusières et éclusiers, tous d'excellent conseil !
La remontée suivante du canal réserve une surprise de taille : l'échelle de 11 écluses de Hédé. Sur un peu moins de 3 kilomètres, à raison d'une écluse tous les 200 mètres, ce ne sont pas moins de 27 mètres de dénivelé qui sont compensés par cet ouvrage qu'il faudra une bonne journée pour franchir. Toutes ces écluses sont manuelles et mises en œuvre par des éclusières et des éclusiers.
Le parcours, qui continue jusqu'à Montreuil-sur-Ille, passe par des espaces totalement déserts où il fait bon s'arrêter, à l'ombre des arbres, pour un déjeuner fluvial.
Les 30 derniers kilomètres font passer progressivement de la douce campagne à la furie urbaine. Melesse puis Rennes méritent l'arrêt, pour sentir le saisissant contraste entre le paisible canal et les nombreux bâtiments de bureau de la capitale bretonne. C'est à l'écluse du Mail, en entrée de Rennes, que s'achève le canal. Il rejoint, alors, le lit de la Vilaine.
Peu de ports mais de bons services
Si peu de ports sont présents le long du canal, tous font des efforts pour accueillir dans de bonnes conditions les plaisanciers et leur offrir les services qui rendront le séjour mémorable. La gastronomie bretonne est toujours à l'honneur, passant des produits de la pêche à Mordreuc au traditionnel Kouign-Amann à Dinan.
L'un des principaux ports de la zone eaux douces du canal, à Dinan, offre toutes les commodités. Les sanitaires, douches, machines à laver… sont disponibles en traversant la route. Les pontons (sur catway ou en rive) sont tous équipés d'eau et d'électricité. La halte de quelques heures est gratuite, sous réserve de ne pas utiliser ces ressources.
Les conseils du guide
Ayant le plaisir de naviguer localement et de bien connaître les lieux, je serai votre guide pour cette fois.
Le premier conseil à donner est d'aller imprimer le graphique des niveaux de l'eau mis à disposition par EDF. Ils fournissent, au niveau du marégraphe de Saint-Suliac, les niveaux prévus. Ce ne sont que des prévisions. Le sondeur et l'indication de profondeur (avec un pied de pilote raisonnable) demeurent vos meilleurs alliés au cours d'une navigation en Rance.
Les horaires de sassement de l'écluse du Chatelier dépendent du niveau d'eau sur la Rance. Grossièrement, il faut a minima quatre mètres au seuil de l'écluse pour passer au Lyvet. Ici encore, il est nécessaire d'appeler les éclusiers (02 96 39 55 66) pour s'assurer des horaires d'ouverture et, à la basse saison, s'annoncer montant comme avalant.
Les cales de mise à l'eau ne manquent pas le long du canal. Une grosse dizaine est disponible sur la zone maritime (avant le Chatelier), pour seulement 5 sur la zone fluviale. Toutes, sans exception, sont accessibles aux voitures sans manœuvre particulière.
Il n'est pas nécessaire d'aviser les éclusiers du parcours envisagé, même si cette information permet d'aviser les écluses suivantes et offre une remontée plus fluide pour tous les usagers.
Les rives et haltes nautiques tout au long du canal, sont entretenues par les communes. La plupart mettent à disposition (comme à Evran par exemple) gracieusement l'eau et l'électricité. En contrepartie, elles attendent que les plaisanciers respectent les lieux (en rapportant leurs déchets par exemple) et participent à la vie économique locale (boulangerie, bouchers…).
Trucs et astuces locaux
A la fois urbain et touristique, le canal d'Ille et Rance n'est plus exploité comme voie de transport de marchandise depuis bien longtemps. De nombreux services et lieux de tourisme se sont développés sur les bords, dont certains assez surprenants.
Pour une coupe de cheveux, on peut prendre rendez-vous avec le coiffeur de l'écluse du mail, à Rennes.
A Hédé, pour comprendre à la fois l'histoire du canal, le fonctionnement d'une écluse et découvrir le patrimoine local, la maison du Canal se visite et propose une aire de pique-nique très bien équipée.
Chaque année, le premier dimanche du mois d'août, se tient "A dimanche au canal". Au cours de cette journée, toutes les communes traversées par le canal proposent animations et restauration aux usagers du canal et aux habitants. La mise en avant de ce patrimoine est l'occasion de découvrir des aspects méconnus de cette artère de navigation, certaines maisons éclusières sont ouvertes et proposent de découvrir le travail présent et passé de leurs habitants.
Après Dinan, il faut absolument se laisser bercer par les falaises, à droite (avalant) qui contrastent avec la forêt sur l'autre rive, puis se laisser charmer par Léhon et son abbaye. Il est possible de mouiller, gratuitement, après le pont, sur la rive gauche.
A noter, les mouillages qui sont en face sont privés et leurs propriétaires sont très peu enclins à laisser d'autres personnes utiliser ces emplacements qu'ils paient et entretiennent.
L'amarrage, à Léhon, se fait sur les quatre bollards en béton disponibles.
Poursuivant la route, c'est au Quiou, à quelques kilomètres avant Evran, qu'il faut s'arrêter. Charmant village qui réserve quelques surprises, notamment les ruines d'une église qu'il faut absolument visiter.
A Evran, le restaurant à ne pas manquer est sans doute "Le vieux chien noir". Il propose une restauration franco-britannique aux accents maritimes et bretons. Le tout est servi en portions généreuses et dans une ambiance de pub.
C'est aussi à Evran qu'on trouvera le plus facilement du carburant, à quelques centaines de mètres de la rive du canal. Un autre point de ravitaillement en carburant est disponible, à Montreuil-sur-Ille.
Le canal d'Ille et Rance ne présente aucune difficulté de navigation. Le franchissement des écluses se fait toujours en compagnie des agents du département, sous leurs conseils et leur contrôle.
Il faut, néanmoins, prendre garde au courant qui peut attirer les bateaux les plus légers vers les barrages qui sont présents sur le canal. En cas de difficulté, il suffira de battre en arrière ou, au pire, de mouiller son ancre pour revenir contre le courant.
Dernière précaution, tout au long du parcours fluvial, l'envasement flagrant de la Rance. Il nécessite une attention particulière et une navigation à vitesse réduite, pour limiter les impacts d'un échouement éventuel. La précaution la plus sage est de longer les balises.
Le Canal d'Ille et Rance en résumé
- Longueur 85 kilomètres
- Écluses : oui, 48
- Vitesse limitée : 8 kilomètres par heure
- Passage de frontières : Non
- Vignette / taxe de navigation : Non
- Établissement gestionnaire : Etat sur la partie maritime, Région puis Département
- Loueurs : Le Boat (Dinan) - Locaboat (Melesse)
- Départements : Ille et Vilaine et Côtes d'Armor
- Tirant d'air mini : 2.50
- Tirant d'eau mini : 1.50
- Période de chômage : de mi-octobre à mi-avril