Un 23 pieds dans l'Atlantique : première grande traversée dans le Golfe du Gascogne

Pour cette première traversée hauturière, nous avons choisi de nous faire accompagner par Téo, un ami moniteur de voile et profe

En septembre 2021, nous avons quitté Granville pour un voyage d'un an dans l'Atlantique à bord d'un petit voilier de 23 pieds. La traversée du Golfe de Gascogne était la première grande navigation de notre périple.

Trois petits bleus dans le grand bain. Voilà le credo de cette traversée du Golfe de Gascogne effectuée en septembre 2021 à bord de Nordkyn, notre Etap 23. Pour Charlotte et moi, cette navigation marquait le commencement d'un voyage de plusieurs mois sur ce petit bateau à travers l'Atlantique… mais il s'agissait surtout de notre toute première sortie en haute mer. Un baptême donc, même si nous avions passé ces dernières années à fourbir nos armes en cabotant entre Granville, les îles Anglo-Normandes et la Bretagne. Pour ce morceau de taille censé nous mener du Finistère aux côtes de Galice, nous embarquons Téo, moniteur de voile et professionnel du gréement dans une voilerie. Une recrue de premier ordre bien que ce troisième larron, plutôt porté sur la voile légère, ne soit guère plus initié que nous aux arcanes des grandes traversées hauturières.

80 heures de traversée entre Audierne et le Cap Ortegal
80 heures de traversée entre Audierne et le Cap Ortegal

Météo : une stratégie petits bras

Dimanche 5 septembre au petit matin, nous quittons Audierne dans une véritable purée de pois. Autant dire qu'au moment de mettre le cap au 220, droit sur l'Espagne, nous éprouvons le sentiment de partir quelque peu à l'aventure. Côté météo, l'anticyclone sur les îles britanniques devrait faire de la résistance en nous offrant encore deux jours de brises portantes. Puis, nous devrions rencontrer un peu de pétole en approchant de la péninsule ibérique avant que le vent, tout en demeurant assez faible, bascule au Sud-ouest et nous contraigne à faire du près. Ces conditions correspondent à la stratégie que nous nous sommes fixés : jouer les petits bras en évitant tout ce qui pourrait s'apparenter à du gros temps… Mais les prévisions incertaines sur la seconde partie de la traversée nous réserveront quelques surprises.

Comme nous nous attendons à naviguer un peu au moteur, nous embarquons 80 litres de carburant ce qui dans l'absolu, nous permettrait de couvrir une distance de 200 miles : les deux tiers de la traversée. Soixante litres d'eau, trois sacs de provisions… L'avitaillement n'a rien d'une mince affaire à bord de notre petit voilier de 7 mètres où les rangements sont fortement limités. Enfin, sachant pertinemment que toute cuisine risque de s'avérer compliquée dans une mer formée, nous avons préparé plusieurs boîtes d'aliments déjà cuits. Lesquels, rapidement gâtés sous l'effet de la chaleur, sustenteront finalement les poissons.

 Au près lors de la fin de la traversée, nous essayons des grains avec des rafales à 25 noeuds. La vie à bord est alors franchement inconfortable.
Au près lors de la fin de la traversée, nous essayons des grains avec des rafales à 25 noeuds. La vie à bord est alors franchement inconfortable.

Un exercice de tirs militaires sur la route

La côte n'est plus en vue lorsque la brume se lève et avec elle, une petite brise qui nous permet d'envoyer le spi. Durant des heures, nous progressons cernés par une horde de dauphins. Puis le jour descend et nous attaquons notre première nuit de quarts, nous relayant toutes les trois heures pour veiller à la bonne marche du bateau tout en gardant un œil sur les nombreux navires croisant dans les parages. Pêcheurs, cargos, tankers, et même un trimaran Ultim qui nous passe devant à toute allure pour disparaître quelques instants plus tard dans le lointain. Avec notre vitesse n'excédant pas cinq nœuds, nous avons tout bonnement l'impression d'être à l'arrêt.

Le lendemain, c'est un appel VHF qui nous laisse perplexe durant plusieurs minutes. Un bâtiment de la Marine Nationale annonce un exercice de tir dans une zone située en plein sur notre route. Un instant plus tard, nous entendons la canonnade dans le lointain. Évidement, nous sommes bien trop loin pour gêner les artilleurs !

Comme prévu, les conditions changent quand nous parvenons à mi-distance entre les côtes bretonnes et la Galice. L'un de nos routeurs, avec qui nous échangeons par texto via le Inreach, nous explique qu'une petite dorsale est positionnée sur le Nord de l'Espagne. Un coup d'œil dans notre bible de la météo nous apprend que cette situation génère fréquemment des orages dans le coin. Et en effet, une poignée d'heures plus tard, des éclairs illuminent l'horizon… Nous décidons de modifier notre route, obliquant vers l'ouest dans l'idée de contourner ces grains orageux et de nous positionner pour la bascule de Sud Ouest. Celle-ci arrive le lendemain, rendant la dernière partie du voyage franchement inconfortable. Au près dans des rafales à 25 nœuds, le bateau tape, craque fortement et se préparer un sandwich demande beaucoup de détermination.

 La région du Cap Ortegal, en Galice, restera une étape mémorable de notre voyage avec ses paysages montagneux.
La région du Cap Ortegal, en Galice, restera une étape mémorable de notre voyage avec ses paysages montagneux.

Une première traversée pleine d'enseignements

Enfin, mercredi au petit matin, nous sommes en vue des falaises du Cap Ortegal. A bonne distance de la côte, l'odeur puissante des forêts d'eucalyptus nous assaille les narines. Nous venons de passer 80 heures sur l'eau, ballottés dans notre fluette embarcation et la pression retombe alors que Nordkyn entre dans le petit port de Cariño. Autour d'une table couverte de tapas et de cervezas frescas, nous égrenons les mémorables instants qui ont ponctué cette petite expédition : le souffle des baleines, le moineau épuisé qui se pose dans la cabine alors que nous sommes en pleine mer…

Cette première étape nous a permis de tirer bon nombre d'enseignements. Sur un bateau qui n'est pas conçu pour de telles navigations, il apparaît vital de surveiller minutieusement chaque point d'usure. En outre, nous ne nous attendions pas à accumuler autant de fatigue, le manque de confort rendant l'expérience d'autant plus éprouvante. Enfin, si cette modeste victoire nous a rendu rêveur quant aux aptitudes de notre petit voilier, les ennuis qui nous attendent auront tôt fait de nous remettre les pieds sur terre… Au moins pour quelques temps.

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Etap 23 La fiche technique
2.49 mLargeur - Bau
0.70 mTirant d'eau mini
10.60 mTirant d'air (hauteur maxi)
Voir la fiche technique du Etap 23
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