Une semaine de nav pour prendre en main son bateau
La prise en main d'un bateau nécessite plus qu'une simple navigation de 2 h avec le chantier. Surtout lorsque l'on passe à un bateau plus grand, plus sportif et puissant.
C'est avec un équipage de 4 personnes que nous sommes partis naviguer en Mer d'Iroise, tester les capacités du Pogo 36. L'objectif de cette navigation ? Découvrir les limites du bateau et mettre en place les routines nécessaires aux manœuvres pour un équipage réduit, voire très réduit (solitaire ou semi-solitaire).
Pour ce faire, nous avons pu naviguer avec 15 à 30 nœuds de vent, dans des conditions de mer agitée, voire très agitée avec un environnement caillouteux important. Au programme, le passage du canal du Four, l'ouest d'Ouessant, le Fromveur et les Abers… Des endroits qui nécessitent préparation et anticipation.
Escales et mouillage en mer d'Iroise
En plein mois de mai, c'est pourtant sous la pluie, dans le froid et le brouillard avec de nombreux passages de grains que s'est déroulée notre navigation. Autant dire que les cirés étaient de rigueur et les casquettes rangées au fond des équipets.
Après un départ de la baie de Douarnenez, nous avons mis cap sur l'Aber Wrac'h, distant d'environ 50 milles. Avec des conditions forcissant - un avis de grand frais est annoncé pour le lendemain - une bonne partie de la journée s'est déroulée sous trinquette, 1 ris.
Mercredi, nous avons rejoint l'Aber Ildut, situé à 14 milles. Pour corser un peu la nav' nous avons fait un détour par le nord et l'ouest de l'île de Ouessant. Nous avons passé le Fromveur sur un tapis roulant à 14 nœuds en vitesse de fond avec un courant de 4 nœuds. Passage devant le phare de Nividic, de la Jument et de Kereon, des phares que l'on ne rase pas si souvent ; ces zones de navigation demandant de l'anticipation et un bon timing pour ne pas se faire prendre par le jus. La navigation qui avait débuté dans la pétole et sous la pluie s'est éclairée à l'arrivée à La Jument. C'était magnifique ! Solent et trinquette étaient de sortie.
Jeudi, après un mouillage à Molène pour une session de plongée en apnée, direction l'ouest de l'île de Quéménès pour rejoindre la passe de la Chimère au sud. Cette navigation entre les cailloux, accompagnés par une vingtaine de Grands Dauphins avait quelque chose de magique. On est ressorti des îles entre le phare des Pierres noires et Kervouroc, situées au large de la pointe Saint-Mathieu. En fin de journée le sémaphore de la pointe Sainte-Matthieu a souhaité être rassuré sur nos intentions concernant le couvre-feu. Un des avantages de l'AIS c'est que les autorités connaissent tous de nos agissements !
Vendredi, c'est rade de Brest. C'est l'unique solution pour avoir une chance de tester spi et gennaker. C'est donc sous gennaker que nous avons passé le goulet. Après un passage entre la pointe des Espagnols et la Cormorandière, roche à l'entrée du goulet où deux phoques guettaient le passage de poissons dans le courant, nous avons piqué sur l'île des Morts. Que les distances sont courtes ! Nous sommes ensuite entrés plus profondément dans la rade, entre l'île ronde et la pointe de l'Armorique distante d'environ 30 à 50 m, à la vitesse de 8 nœuds. On s'est ensuite fait un petit plaisir avec un passage entre les deux Ducs d'Albe. Ce sont de gros blocs de béton vides, tractés par les Allemands pendant la Seconde Guerre mondiale pour créer un point d'amarrage des cuirassés dans la rade.
Un bateau marin et sûr
Nous naviguions dans une zone de cailloux, de courant, avec la côte qui arrive vite. On parcourt un mille plus rapidement que le temps de prévoir un changement de voile ! Le Pogo 36 est un bateau rapide, qui demande de l'anticipation pour ne pas se faire déborder. D'une part parce que le bateau est puissant, et d'autre part parce que l'équipage n'est plus aussi endurant qu'avant…
Parmi les options choisies, on appréciera le winch électrique ! Ce n'est en aucun cas superflu pour hisser la grand-voile full batten à corne, lourde et qui demande un effort long.
Retour vers Camaret, avec le courant du goulet de face. Le Pogo 36 est un bateau technique, mais qui tolère beaucoup d'erreurs. Nous avions 18 nœuds à la sortie du goulet, nous nous sommes finalement retrouvés à naviguer par 28 nœuds, surtoilés, à la sortie. Mais encore une fois, le bateau l'autorise. On a régulé la grand-voile avec le Cunningham pour passer en force les derniers milles. Finalement, même surtoilé le bateau reste parfaitement gérable et plutôt sécurisant.
Notre croisière s'est achevé le samedi avec un retour un Crozon. Nous avons quitté Camaret, passé la pointe du Toulinguet, les tas de Poix et le cap de la Chèvre. On s'est pris un bon 30 nœuds, idéal pour finir le baptême du bateau ! Avec 2 ris dans la GV et la trinquette arisée, nous étions profitions de l'apéro. Certes, sous-toilé au début, mais les conditions ont forcées après la pointe de Pen-Hir.
Le Pogo 36 est un bateau sûr, avec une stabilité de route impressionnante, tout en étant extrêmement confortable à la barre, dans le cockpit et dans le carré. Il est tolérant, mais nécessite de l'anticipation : c'est souvent grisant de profiter des quelques minutes ou les conditions sont proches de la limite, mais la puissance et la vitesse du bateau demandent un peu de préparation.