Patrick navigue sur un Dufour 2800 pendant 28 ans. Souvent en solitaire, régulièrement en Mer du Nord, sans peur de faire de grandes routes. Quand il rencontre sa femme Christine, naturellement il l'emmène en croisière. En croisière en Angleterre, c'est pour lui montrer comment ça se passe dans un coup de vent, qu'il décide de sortir avec 3 ris dans la GV et le tourmentin par force 8. Histoire de lui montrer comment c'est quand ça souffle. Et elle a vu le voilier couché… Ce jour-là Patrick a compris que s'il voulait partir voyager en bateau avec elle, il faudrait un multicoque, un bateau qui ne gîte pas.
Un tour du monde sur 3 ans sans passer par Panama
Le projet de Patrick et de sa femme est de partir naviguer autour du monde sur 3 ans à partir de septembre 2021 (si la crise sanitaire l'autorise). Après une transat, l'équipage a la volonté de contourner l'Amérique du Sud par le sud en visitant les canaux de Patagonie avant de remonter le long du Chili. Puis cap vers la Polynésie, traversée de l'Indien et retour en Atlantique. Un tour du monde qu'il espère réaliser sur 2 coques.
Un catamaran sinon rien !
En 2015, Patrick se met donc en quête d'un catamaran. Il n'a aucune expérience sur ces bateaux. C'est son budget et surtout le look du voilier qui lui font choisir des modèles : "Je regardais les Lagoon 40 et les Nautitech 40. J'avais éliminé les Fountaine-Pajot juste car je ne les trouve pas jolis !" Sa première expérience en cata, il la réalise en essayant le Nautitech 40 qu'il découvre en Sicile (un modèle de 2004), une sortie en mer d'une heure. À l'époque, il ne connait rien de la qualité de construction de ces bateaux. Son expérience, il va la faire sur le premier convoyage. Il faut remonter le bateau en Manche car Patrick est depuis toujours basé à Cherbourg.
Une première expérience musclée
Deux jours après l'achat du bateau, Patrick met le cap sur Gibraltar en solo bien sûr. Nous sommes en avril et la météo de Méditerranée sait le rappeler. Après 36 h de mer dans le nez et de vent refusant, Patrick fait demi-tour. Les batteries ne tiennent pas la charge, le filet du trampoline est arraché… Patrick apprendra aussi que pour gagner Gibraltar, il est préférable de faire le tour de la Sardaigne par le Nord pour éviter ce vent fort de face.
Mais cette première expérience permet à Patrick de mieux appréhender son voilier. Le reste du convoyage se passera avec moins de problèmes une fois les 2 batteries remplacées. Arrivé à Cherbourg, les grands travaux peuvent commencer.
Grosses modifications pour un changement total de comportement
Pour commencer, le marin s'est rendu compte que les 2 seuls winches du cockpit sont insuffisants. Il ne peut pas rouler le génois quand il est bordé sur le même bord que l'enrouleur. Ou bien, il doit aller border la GV sur le bord opposé au foc. C'est donc en remplaçant l'âme du pont par une pièce en monolithique qu'il vient ajouter 2 winches qu'il choisit électriques. Les manœuvres sont facilitées.
L'année suivante sera consacrée au remplacement du guindeau. Sur le Nautitech 40, la baille à mouillage est prévue dans la pointe avant de la coque bâbord. Le guindeau est installé au même endroit. Après avoir remplacé une fois le guindeau et changé 2 fois son moteur, Patrick a commencé à douter. Se pourrait-il que la baille soit envahie d'eau ? Il décide donc de reporter tout le mouillage au pied du mât, comme c'est souvent la place sur les catamarans afin de centrer les poids. Il imagine des renforts et une structure inox pour accueillir un nouveau guindeau et une belle ancre charrue. Désormais le catamaran dispose d'une ancre Vulcan de 45 kg, de 65 m de chaine de 10 (grade 70) et de 100 m de câblot en 24 mm. Un mouillage dimensionné pour visiter les canaux de Patagonie. Mais plus que la bonne tenue du bateau, il découvre surtout un tout nouveau comportement. Ce recentrage des poids et la fermeture émétique de la baille originale (qui pouvait se charger de 1,5 tonne d'eau !) Limite très fortement le tangage. Là où le Nautitech devenait un sous-marin dans la mer formée, désormais, il passe au-dessus des vagues.
Pour affronter le froid prévu pour le voyage, Patrick décide d'installer un chauffage Webasto. Il fait le choix d'un système à radiateur liquide (pas à air pulsé). Il installe 2 aérothermes dans chacune des coques espérant que l'air chaud qui monte va chauffer aussi le carré. Les premiers essais dans le froid humide de l'Écosse à Pâques ont montré que cela fonctionne. Sera-t-il suffisant ? Au cas où, Patrick a un aérotherme de réserve pour installer si besoin dans le carré.
Continuer de naviguer pour tester
Toutes les navigations depuis 5 ans réalisées avec le bateau vont servir à tout tester. Pendant ses périodes de vacances, Patrick navigue vers la Méditerranée ou le Nord de l'Angleterre. Il n'hésite pas à faire des milles, souvent seul à bord. Et ces croisières vont révéler quelques faiblesses du bateau.
Si Patrick a entièrement démonté et rénové les deux moteurs, il va avoir une surprise quand celui de tribord va tomber définitivement en panne (bielle cassée). C'est un problème de col de cygne sur l'échappement (un montage d'origine du chantier…) qui dans la grosse mer faisait siphon et permettait à l'eau de refroidissement d'entrer dans les cylindres. Ce mauvais montage qui ne se détecte que lorsque l'on navigue par mauvais temps va couter un moteur !
Autre péripétie, en 2020, malgré les vérifications et sans prévenir, l'étai va casser entrainant un démâtage. Ce sera l'occasion pour Patrick de changer le mât et le gréement, mais surtout de refaire tailler ses voiles chez Sail Concept à Vannes : Grand-voile et génois dont il est très content du résultat. Un spi (avec chaussette) et gennaker complètent le jeu de voile même si en l'absence de poutre de compression, ces voiles ne peuvent pas être gréés sur un tangon au centre du bateau.
Panneaux solaires, dessalinisateur, électronique de navigation… petit à petit, le catamaran de Patrick prend forme avec toujours en vue ce voyage autour du monde et notamment ce passage tant attendu (et redouté) dans les canaux de Patagonie. Pour cela Patrick a un principe : "À chaque embrouille, je corrige en réparant et en ajoutant un matériel supplémentaire de remplacement".