Début août, nous avons quitté la Sicile de Taormine, magnifique cité accrochée à la roche, noyée de verdure et surplombant la mer au pied de l'Etna. Nous nous sommes élancés au-delà du détroit de Messine, pour atteindre la côte italienne. Le décor était surprenant et plus joli que ce qu'on nous avait décrit. L'eau était transparente, et le sable volcanique lui donnait une teinte d'un bleu vif et lumineux.
Loin des zones touristiques, nous avons apprécié pouvoir avancer paisiblement vers l'Est, et contempler le paysage roussi par le soleil. Pour faire face à la chaleur écrasante de la Calabre, nous passions notre temps dans l'eau, et nous improvisions des douches en navigation à coups de grands seaux d'eau de mer.
Pour nous protéger d'un fort coup de vent, nous sommes allés à la marina di Roccella, ou l'accueil était parfait. La marina, bordée d'une pinède, nous a offert de l'ombre et de la fraîcheur.
Cap direct sur le Grèce
Nous en avons profité pour établir notre plan de navigation pour atteindre la Grèce en 4 à 5 jours, en remontant progressivement la côte sud-est de l'Italie. Entre temps, nous avons rencontré Danny et Max qui projetaient de faire une traversée directe du bassin méditerranéen pour arriver en Grèce via l'île de Paxos, située au sud de Corfou. Le vent était bon et permettait de faire la nav' à la voile en 1,5 jour (environ 190 M).
Actuellement, nous évitons les navigations de nuit, devenues difficiles avec Maël (1,5 an) qui garde un sommeil léger, et qui rend l'alternance des quarts compliquée. Mais nous avons été séduits à l'idée de gagner la Grèce aussi rapidement, avec la garantie de naviguer à la voile !
Une navigation sans souci
Nous sommes donc partis avec eux le lendemain, sur un bord direct vers Lakka, baie sublime au nord de l'île de Paxos. La navigation était confortable, régulière et sans houle. Le vent s'est mis à forcir, et nous avons pris des ris dans nos voiles. Nous avons pu voir qu'avec nos deux voiles sur enrouleur, la manoeuvre était bien plus simple pour nous que sur le voilier de nos amis.
Nous n'avons quasiment pas perdu de temps dans la manœuvre et avons maintenu notre cap. Contrairement à nos amis qui ont dû enrouler leur génois avant de se mettre face au vent pour prendre un ris dans la grand-voile.
Dès ce moment, nous les avons largement devancés et au soir couchant, leur bateau ne devenait plus qu'un point sur l'horizon. Malgré que notre Maelouna soit légèrement plus petit, il est plus rapide que le leur, ce qui était aussi à notre avantage. Le vent a molli avec la tombée de la nuit. Mais nous avons gardé 1 ris dans chacune de nos voiles pour éviter les manoeuvres sur le pont, au cas où le vent se remettrait à forcir.
Rached a assuré quasiment toute la navigation de nuit. Nous nous organisons d'ordinaire en roulement de quarts toutes les 2 heures, mais le coucher des enfants a été plus long que prévu. Rached m'a alors laissé dormir, et je n'ai repris la veille sur le pont que vers 3 h du matin.
Prévision orageuse
Aux premières lueurs du soleil, j'ai réglé les voiles pour reprendre de la vitesse. Nous devions arriver en milieux d'après-midi. Mais un avis d'orage venait d'être annoncé exactement là où nous devions atterrir. Nos amis connaissant la violence des orages en Grèce, nous ont conseillé de changer comme eux de cap, et de descendre plus vers le sud pour nous mettre à l'abri dans la baie de Preveza, une baie située sur la côte continentale de la Grèce, à 30 milles de Paxos. Ce changement de destination rallongeait la navigation de 5 heures, et nous faisait arriver de nuit dans un endroit que nous ne connaissions pas.
Nous avons hésité. Des orages, des coups de vent, nous en avons vécu. Mais jamais au mouillage. Ni en Grèce. La fatigue se faisait sentir, se rajoutant à la gestion des enfants qui commençaient à se chamailler sérieusement. Maël avait une poussée dentaire qui le rendait grincheux. Nous comptions les heures avant d'arriver au mouillage.
Nous avons recherché une destination plus proche où nous aurions pu être à l'abri. Mais aucune ne nous satisfaisait. Alors que faire? Rached a pris la décision de mettre le cap lui aussi sur Preveza. Et c'est au moteur que nous avons fini cette descente, le vent étant parti se coucher avec le soleil.
Soulagement à l'arrivée
Nous étions l'un et l'autre rincés par cette navigation. Non pour sa difficulté, mais par manque de sommeil. La vitalité de nos deux enfants ne nous a guère laissé de temps pour nous reposer.
L'arrivée dans la baie de Preveza, si belle même de nuit, nous a finalement retiré tout sentiment de fatigue. Un vrai cadeau scintillant sur une mer d'huile. Paysage vaste et accueillant dont nous avons profité encore davantage le lendemain, en contemplant la baie remplie de lumière d'orage.
Car orage il y a bien eu. Pas à Preveza où nous étions, mais là où nous aurions dû être, sur Paxos.
Forts orages évités !
Il y a eu plus de 40 nœuds de vent et une pluie diluvienne dans la petite baie de Lakka, pleine à craquer en cette période estivale. Plusieurs bateaux au mouillage se sont retrouvés dans les rochers. Un spectacle affolant nous a rapporté Didier, un ami qui était là-bas et qui n'avait pas vu l'avis d'orage annoncé sur la région.
Rached était vraiment heureux d'avoir fait le choix de fuir la zone à risque malgré la fatigue de cette longue navigation. Notre arrivée en Grèce nous restera en mémoire et ne nous fera plus hésiter sur la conduite à tenir en cas d'avis d'orage. Nous sommes donc restés quelques jours à Preveza laissant la météo redevenir clémente.
Le plaisir des rencontres du voyage
Comme à chaque fois sur notre route, nous avons fait connaissance avec des gens adorables. Ici, c'est Vincent et Julia, qui nous partagé les bonnes escales à ne pas manquer dans les iles ioniennes. Après 4 jours à Preveza, nous avons remis le cap sur les îles au sud de Corfou. Et nous avons découvert là-bas un pur joyau de la Méditerranée !
Ariane & Rached
