Une transat sur un voilier de série quasi neuf
Le 30 décembre 2018, Stéphane Mifsud part de Hyères à destination des Antilles françaises pour livrer du matériel de plongée. Sa mission : faire découvrir le milieu sous-marin en fournissant du matériel et aider à la collecte des déchets accumulés dans la zone côtière à la suite du passage des ouragans.
Pour ceux qui ne le connaissent pas, Stéphane Mifsud est multiple champion du monde d'apnée et détient depuis 11 ans, le mythique record en apnée statique : 11 minutes et 35 secondes ! Pour rendre sportive cette odyssée, il a décidé de partir en solitaire sur son voilier « 11-35 Explorer », un Bénéteau Océanis 55 de série, acheté neuf un an plus tôt, et sans préparation technique spécifique.
Plongeur avant d'être marin
Parti pour un voyage avec escales, Stéphane ne s'est finalement pas arrêté et a fait la traversée d'une traite à l'aller (26 jours en janvier 2019) et au retour au mois d'avril 2019 (27 jours).
« Je ne suis pas un navigateur aguerri. J'ai juste 2 ans de pratique de la voile. Mes interrogations pour ce périple étaient avant tout personnelles : quelles sont mes capacités de marin ? Comme vais-je tenir mentalement et physiquement ? Quelle sera ma gestion du sommeil ? Mais j'avais que très peu de doute sur la qualité et la résistance du matériel. »
« Entouré de spécialistes pour le routage, la technique, l'électronique, les communications et le médicale, restant en contact permanent grâce aux moyens de communication satellites. Seul sur l'océan, je me sentais épaulé. »
« Après 10 000 miles de navigation, je suis en mesure de faire un bilan technique et tirer des conclusions pour mes prochains challenges. »
Le bilan technique et humain
« Le bateau a peu souffert malgré des conditions difficiles. Pour franchir Gilbratar à l'aller, je me suis retrouvé face à une succession de front avec une mer, du courant et du vent fort. Idem à mon retour, dans le Golf du Lion, juste avant l'arrivée à Hyères, où j'ai dû remonter contre des vents à 50 nœuds… C'est certain que dans ces situations, j'ai tiré sur le bateau. »
« L'Océanis 55.1 s'est avéré performant : 7,5 nœuds de moyenne sur l'ensemble du parcours. Il est sécurisant, et ne souffre que de quelques petits bobos au retour. Je note du jeu dans la barre tribord (pas dans celle bâbord), sans doute une usure de l'axe. La capote s'est déchirée suite au ragage des écoutes. Les chandeliers ont aussi pris du jeu. Petit détail, le système de verrouillage du cardan du four a cassé.
Ce sont le gréement courant qui a le moins supporté le voyage. Les écoutes de génois et de grand-voile se sont usées rapidement. J'ai même une écoute génois qui a cassé, pas de chance juste quand je passais à proximité. J'ai gagné un bel hématome à la cuisse qui m'a bien fait souffrir quelque jour.
Plusieurs taquets coinceurs du piano ne bloquent plus par usure de la came et des bouts.
Enfin les chariots de grand-voile n'ont pas supporté ma navigation un peu extrême (usure à la limite de la casse). »
Le retour d'expérience
« Si c'était à refaire, avant de partir je confierais mon bateau à un professionnel pour une préparation spécifique à une navigation intensive pour gagner en sérénité. Quant aux questions sur mes capacités, une meilleure gestion du sommeil s'avère nécessaire. J'ai été sujet à des hallucinations après 4 jours de navigation par manque de sommeil avec seulement 3 fois 40 minutes par 24 heures. » En sportif aguerri, Stéphane a su s'appuyer sur un mental fort et des capacités physiques hors norme pour supporter ces moments et mené à bien son 55 pieds.
« De cette expérience, je dirai que ce bateau a une âme, il m'a ramené à bon port et j'ai beaucoup appris de cette aventure extraordinaire », précise Stéphane.
Les conseils de Stéphane.
Si vous planifiez de traverser l'océan, voici les conseils de Stéphane :
- une préparation spécifique par un professionnel
- un bon système de communication avec la terre
- se préparer physiquement en fonction de ses ambitions sportives