Rappel : Ariane et Rached embarquent sur leur Sun Odyssey fraîchement acheté à Port-Leucate pour une traversée de la Méditerranée avec leurs 2 enfants Louna et Maël. Avec l'hiver tout proche, ils se font épauler par Jean-Luc un skipper professionnel. Ariane qui nous a déjà déroulé le journal de bord du parcours revient cette fois avec les anecdotes souvent croustillantes de la vie à bord.
Ce que l'on ne vous a pas dit sur la traversée… Après cette traversée aventureuse entre la France et la Tunisie, nous vous faisons un retour sur notre vécu à bord, avec les enfants, les dents qui poussent, le mal de mer, et... une voie d'eau.
Un expert pour valider l'achat
Plus d'un mois avant la date du départ, nous nous installons à bord de notre nouveau bateau fraichement acheté. Ce temps passé principalement au port nous a permis de nettoyer le bateau, évaluer les travaux à prévoir, réparer ce qui était abîmé ou défectueux, et l'équiper du matériel de sécurité nécessaire au contexte d'une traversée en famille avec 2 jeunes enfants à bord.
Pour l'achat, nous avons fait expertiser le bateau, afin de nous prémunir de mauvaises surprises. Nous verrons que cette démarche est essentielle, mais n'est pas suffisante, et notre expérience nous a montré que nous avons échappé de justesse au pire.
Un skipper pour confirmer notre formation
Connaissant peu le voilier, et projetant de relier la France (Leucate) à la Tunisie en novembre, nous avons contacté un skipper professionnel, Jean-Luc, lui proposant de nous accompagner pour cette traversée de la Méditerranée pour nous sécuriser et nous coacher sur la prise en main du bateau. Sa présence fut une bénédiction, permettant à l'un de nous de s'occuper exclusivement des enfants de jour comme de nuit, sans avoir de quart à assurer.
Gérer des enfants en navigation
Les enfants s'étaient déjà habitués à l'espace restreint, mais ludique du bateau, au bruit du vent, des vagues et de la pluie, aux nuits d'orage et aux jours venteux nous contraignant à rester joyeusement ensemble à l'intérieur de ce huis clos à flots. Néanmoins, la gîte que nous avons eue à partir de La Ciotat, de jour comme de nuit, fut une découverte à laquelle ils ont dû faire face. Et nous aussi !
Louna s'est vite aperçue que faire des activités dans le bateau en navigation retournait son estomac. Elle a alors appris à faire des siestes en journée, sur le pont ou dans la cabine, pour calmer le mal de mer qui l'avait pris.
Maël, a appris naturellement lui aussi à dormir beaucoup plus. L'allaitement aura été un formidable moyen de gérer les moments longs et difficiles de la traversée. Mais quand une vague a fait sauter et glisser ce petit bout dans la cabine, malgré ma présence à ses côtés, le mal de mer ne l'a pas épargné.
Il fallait nous voir, Maël vomissant sur le lit, Louna vomissant sur Maël à la vue du vomi, et nous 3 pataugeant là-dedans au rythme du roulis... Mon estomac n'a pas non plus tenu longtemps avant de me faire des signes désespérants...
Chaque mouvement devenait une épreuve pour changer et nettoyer tout cela, de nuit, le bateau continuant invariablement sa danse chaloupée. Les 2 enfants, devenus grincheux, s'entraînant dans des vocalises stridentes.
Mais d'anciens souvenirs de navigation en mer d'Irlande m'ont redonné le sourire et m'ont permis de prendre cela avec philosophie. Une fois tous au propre, nous nous sommes recouchés, blottis les uns contre les autres, nous endormant profondément et laissant les heures s'écouler jusqu'au petit matin, prometteur de caresses réchauffantes du soleil.
Voie d'eau et craquements sinistres à bord !
Le lendemain, la mer était plus calme, et le soleil bien présent. Idéal pour le moral des troupes, mais un bruit étrange se fait entendre sous les planchers. Un drôle de clapotis qui ne venait pas du dehors, mais du dedans... Alors que j'étais soulagée que le mal de mer nous ai quitté, me voilà blême.
Je soulève l'un des planchers et trouve une quantité importante d'eau dans les cales. Je garde mon calme et appelle Rached et Jean-Luc qui est sur le pont, pour qu'il constate la quantité d'eau présente.
Sans équivoque, c'est de l'eau de mer, salée et chargée de sable. Nous actionnons la pompe de cale pour retirer le maximum d'eau. Nous inspectons tous les passe-coques, soulevons tous les planchers. La gîte entraine l'eau partout. Pour l'heure, nous ne parvenons pas à déterminer la provenance de cette eau.
De plus, le bateau fait un bruit de craquement étrange à l'avant à chaque vague sur laquelle nous passons, sans que nous parvenions à définir non plus qu'elle en est la raison. Nous sommes entre la Sardaigne et la Tunisie. Pas de repli possible. Le calme et la bienveillance de Jean-Luc nous permettent de garder notre sans-froid. Sans doute dû à l'inquiétude, le mal de mer me reprend. La traversée enjouée et audacieuse devient pénible et laborieuse. Heureusement les enfants vont bien et profitent du soleil sur le pont avec leur papa. Ils jouent ensemble tranquillement, et Jean-Luc se montre incroyablement bienveillant avec eux. Nous gérons au mieux ces heures à double lecture.
Une fin de traversée sous le signe de l'inquiétude
Je m'applique à faire de bons petits plats malgré la gîte et la nausée, nous rions ensemble et savourons le positif de cette expérience. En parallèle, nous actionnons autant que possible la pompe de cale. Cela nous rassure symboliquement, car nous ne voyons plus le volume d'eau réel entrant dans les fonds.
La côte tunisienne est en vue. Plus question évidement de poursuivre jusqu'à Monastir comme prévu, nous choisissons de nous abriter au plus vite et faisons cap sur Gammarth.
Soulagement. Sourire aux lèvres, nous prenons plaisir à nous imaginer être de vrais aventuriers qui, finalement, à la nuit tombée, se retrouveront au sec devant un bon feu de cheminée.
Pour gagner du temps, nous actionnons le moteur à pleine vitesse. Cela devient un vrai calvaire pour moi, mes oreilles n'en peuvent plus, et je crains pour celles des enfants.
Heureusement, nos corps se sont adaptés à ce contexte. Nous passons la fin de la navigation à dormir tous les 3, laissant Rached et Jean-Luc gérer la navigation… et la voie d'eau.
Une expérience éprouvante, mais un bilan positif pour toute la famille
Le moteur qui s'arrête me réveille : fin du voyage. Jean-Luc, égal à lui-même, le sourire radieux, mais le visage fatigué, manifeste aussi un vrai soulagement. Il s'est porté garant en nous accompagnant dans cette traversée qui aurait réellement pu tourner au drame.
Rached a les larmes aux yeux, émus de ce que nous venons de traverser, avec ces moments fantastiques et ce pire que nous avons évité. Louna, merveilleuse, aura su vivre cette expérience de manière positive, malgré la limitation dans les activités, les contraintes liées à la traversée, les règles de sécurité, et le mal de mer qui l'aura prise 2 fois. Maël lui, aura eu 3 dents de sorties pendant la traversée ! Cela faisait des mois qu'elles le titillaient, qu'elles commençaient à apparaître sans percer, et le faisait chanter dans les aigus comme jamais. Le soulagement maintenant est au complet.
À la recherche des causes de nos tracas
Reste cette voie d'eau à trouver et la raison de ce bruit suspect dans la cabine avant. Le bateau mis à sec révèlera l'avarie. Heureusement, notre bon sens et le professionnalisme de Jean-Luc nous ont permis de gérer ces problèmes avec raison.