Comment est perçue la voile en Espagne ?
En Espagne, c'est assez difficile de trouver des sponsors pour des projets professionnels. Pourtant, en huit ans, il s'y est déroulé deux Coupes de l'America, une coupe Louis Vuitton, cinq départs de Volvo Ocean Race, quatre Barcelona World Race, un départ de Velux…
Malgré ça, le grand public ne s'intéresse pas à la voile. Pour susciter l'intérêt, il faut un projet sensationnel. Un projet en 40 pieds par exemple n'intéresse pas. D'ailleurs, ça n'existe pas.
C'est quand même incroyable pour un pays qui a participé à de telles courses !
Victoire sur la Route du Rhum 2014 ©A.Courcoux
Aujourd'hui, où en es-tu professionnellement ?
Ma situation est spéciale. J'ai désormais une certaine reconnaissance dans mon pays après les succès obtenus entre 2014 et 2017. J'ai gagné toutes les épreuves auxquelles j'ai participé. Notamment la Route du Rhum en 2014, que j'ai gagnée sans sponsor (NDLR : Alex est devenu le premier espagnol à remporter une transat).
Plus récemment, on est parti sur le Trophée Jules Verne avec un petit bateau (NDLR : Alex Pella faisait partie de l'équipage de Francis Joyon sur Idec Sport) et on a explosé le record. J'ai par la suite remporté la Jacques Vabre 2017 en Multi50 avec Lalou Roucayrol.
Finalement, je pars toujours sans être favori et je termine victorieux. J'en suis fier ! Malgré ça, je ne trouve pas de projet pérenne.
J'ai vraiment apprécié ces dernières années. J'ai fait du Mini, la Route du Rhum, la Volvo, le Trophée Jules Verne… J'ai pris un plaisir énorme. Ces deux dernières années passées avec Francis étaient incroyables.
Lalou Roucayrol et Alex Pella vainqueur de la TJV 2017 en Multi50 © Jean-Marie Liot / ALeA / TJV17
Pourquoi ne pas monter un projet en France ?
En France, je ne pense pas avoir la reconnaissance qu'ont d'autres marins. Je n'ai pas essayé non plus. Je pense que j'ai plus un rôle de remplaçant, que ce soit sur des courses ou au sein de grosses écuries, grâce à mon palmarès.
J'ai cherché deux fois à courir le Vendée Globe, en 2012 et 2016, mais je n'ai pas trouvé de budget. À chaque fois, je m'y suis consacré entièrement et je n'ai plus rien fait à côté. Quand j'ai compris que je n'y participerai pas, j'ai pu me consacrer à de nouveaux projets.
J'ai navigué avec de nombreux skippers en quatre ans : Armel le Cléac'h, Francis Joyon, Kito de Pavant, Sydney Gavinet, Bilou (Roland Jourdain), Lionel Lemonchois, Jean-Pierre Dick. C'était un vrai plaisir et ils m'ont offert une super formation. J'ai beaucoup appris avec eux.
Kito de Pavant et Alex Pella (Made In Midi) avant le départ du Défi Atlantique ©Bateaux.com
Quelles sont tes ambitions ?
Aujourd'hui j'ai envie d'avoir un projet personnel. Rien que pour pouvoir gérer mon calendrier personnel (rires). Depuis 15 ans, je ne sais pas mon planning à l'avance, or, j'ai désormais une famille.
La voile est un travail qui nous permet de vivre, mais c'est aussi une passion dans laquelle on s'amuse. Et j'ai envie de continuer à m'amuser, à me faire plaisir. J'aime ça et je voudrais continuer sur cette lancée 10 ans de plus avec des projets divers et variés.
Alors que l'Espagne n'a pas cette culture voile, je me rends compte de la chance que j'ai. Aujourd'hui, tout ce que je peux faire en plus c'est du bonus !