Découvrir la course au large
Passionné de bateaux et de voile depuis de nombreuses années, j'ai pratiqué régulièrement la régate inshore. Le goût du voyage m'a amené à traverser l'Atlantique dans les 2 sens, en croisière. Mais la course au large, c'est un autre rythme et une autre échelle... Alors, lorsque GPO, l'organisateur du Défi Atlantique, la nouvelle course transatlantique retour pour les Class40, a proposé de faire embarquer un journaliste de Bateaux.com à bord de l'un des voiliers engagés, je n'ai pas hésité. Préparatifs, ambiance à bord, sensations de vitesse sur un bateau poussé dans ses retranchements, nourriture lyophilisée... Je vais tâcher dans cette série de vous faire partager mon expérience d'équipier.
Horta apparaît sous les nuages
Pour ceux qui ne connaissent pas, les Açores sont des îles particulièrement vertes. Iles de l'Atlantique ne rime pas nécessairement avec shorts et torpeur tropicale. Cet archipel portugais est généreusement arrosé par la pluie, ce qui en fait le plus gros producteur de lait du Portugal. Mon atterrissage sur l'île de Faial en est une bonne illustration. Ce n'est qu'au dernier moment, après avoir traversé une épaisse couche de nuage, que la piste de l'aéroport apparaît. La mer, blanche depuis l'avion, semble bien agitée. Devant le tapis de récupération des bagages, on reconnaît à leur veste de quart la relève des équipages arrivant ce samedi par le vol quotidien de Lisbonne. Je fais la connaissance de Benoit Formet, qui embarque avec moi sur Colombre XL, le Pogo 40 S2 de Charles-Louis Mourruau. En plein préparatif de la saison en Mini 6,50 pour son projet Racing For The Oceans, il profite de l'occasion pour venir essayer le grand frère de son Pogo 3.
Horta depuis le port
Une classe et un équipage internationaux
IMOCA, Ultim, Mini 6.50, Figaro... La course au large parle beaucoup français. Le Class40 a su séduire en dehors de nos frontières et cela se voit sur les pontons d'Horta. En premier lieu dans l'équipage de Colombre XL. Alors qu'un américain et un néerlandais vivant au Portugal débarquent pour nous céder la place, l'anglais reste une langue de communication majeure à bord. Charles-Louis Mourruau, le skipper, âgé de 30 ans, a grandi entre Paris et le Sénégal. Membre d'équipage sur des grands voiliers classiques comme Mariette ou Eleonora pendant plus de 10 ans, il revendique une culture anglo-saxonne de la voile. Tom Gayford, co-skipper pour cette deuxième étape, est originaire de Toronto au Canada. Entre l'équipage 100% italien d'Andrea Fantini sur Enel, la britannique Miranda Merron ou l'espagnol Alex Pella, le reste de la flotte est elle aussi cosmopolite.
L'équipage de Colombre XL / Lost Boys (de gauche à droite) : Briag Merlet, Benoit Formet, Charles-Louis Mourruau (skipper) et Tom Gayford
Entre bricolage, tourisme et météo
La Class40 rassemble professionnels et amateurs. Budgets et préparations varient et l'ambiance bricolage sur les pontons ressemble aux escales des plaisanciers au long cours. Esprit Scout construit avec deux tubes carbones ramenés en avion par un équipier, un bout-dehors temporaire pour remplacer celui brisé lors de la première étape.
De notre côté, le bateau est prêt en ce dimanche de veille de départ. Seules les vieilles voiles déchirées aux Caraïbes manqueront pour la traversée, mais Charles-Louis est en recherche de sponsor pour se permettre une nouvelle garde-robe. Un petit briefing sécurité nous permet de passer en revue le matériel et les procédures d'homme à la mer et de mise en œuvre du radeau de sauvetage. Un passage nécessaire, même si une sorte de malaise me prend toujours en évoquant des situations d'urgence que l'on préférerait éviter.
Il est temps de commencer le tourisme ! Cela démarre par un peu d'observation des peintures, laissées sur le quai d'Horta par les bateaux en escale. Un passage normalement obligé auquel nous avons dérogé, mais honoré par Yoda. On note les signatures de célèbres prédécesseurs et le talent poétique de certains marins. Après cela, un déjeuner en terrasse au Peter's Café Sport, le bar de marin à la réputation internationale s'impose.
Il est temps d'aller au briefing. Christian Dumard, joint par téléphone, dresse la situation. Après un départ mou, les choses vont s'accélérer dès la première nuit. Il s'agit de rester devant un front froid qui devrait normalement s'occlure avant de nous dépasser. La situation en arrivant aux abords du golfe de Gascogne est plus incertaine. La position et la taille de la dorsale anticyclonique qui nous y attend varient selon les modèles. On évoque aussi l'épave du Grande America, sa nappe de pétrole et ses conteneurs potentiellement à la dérive entre deux eaux. Heureusement, l'avenir montrera que la flotte a échappé à ce risque.
Chassons les craintes par un dernier bon dîner à terre. Retour chez Peter's, pour tester son célèbre gin do mar et une feijoada locale avant de passer au lyophilisé!! Maintenant, au lit, avant le grand départ!