Un goût pour l'aventure dès son plus jeune âge
Né le 16 septembre 1943 à Clamecy dans la Nièvre, Alain Colas est élevé par un père artisan faïencier réputé et rêve d'aventures et d'évasion, le nez dans ses bouquins. Celui qui "a toujours su qu'il fallait réaliser ses rêves" est un élève studieux avec un goût pour le domaine littéraire. Il s'imagine en aventurier, à l'instar de son grand-père maternel, grand voyageur. En 1961 il obtient son baccalauréat puis étudie les lettres et l'anglais en faculté.
C'est en 1963 qu'il découvre les plaisirs de la navigation à bord d'un kayak. Celui qui n'y connaît rien en construction de bateau va apprendre auprès d'un chantier et construire les futurs kayaks de son club de canoë. Aujourd'hui le club porte le nom du navigateur disparu.
En 1965, il postule pour un poste de Chargé de cours à l'université de Sydney en Australie. N'ayant pas obtenu le poste, il part néanmoins à l'autre bout du monde en embarquant à bord d'un cargo, en 1966. Sur place, il réussit à obtenir un poste à la faculté des lettres de Sydney et devient Chargé de cours à 22 ans au St-John's College où il enseigne la littérature française. C'est ainsi qu'il découvre la voile et la course au large, dans la baie de Sydney.
La découverte de la course au large
En 1967, il fait la rencontre d'Éric Tabarly, qui dispute la Sydney-Hobart, une course de 630 milles, reliant Sydney à Hobart. Ce dernier lui propose alors de l'embarquer à bord de Pen Duick III, direction la Nouvelle-Calédonie. En compagnie d'Olivier de Kersauson, fidèle acolyte d'Éric, les trois hommes subissent un cyclone tropical qui les fait dériver vers un récif corallien. Alors qu'on les annonce disparus, les trois hommes s'en sortent indemnes. Un an plus tard, obnubilé par la voile il décide de rejoindre Tabarly à Lorient, qui se prépare pour sa transatlantique en solitaire. Il construit un multicoque expérimental géant, Pen Duick IV. De 1968 à 1969, Alain Colas participe à la saison de course au côté de Tabarly afin de se familiariser au métier de navigateur et devient par là même journaliste marin avec Olivier de Kersauson qui prend les photos. En 1970, il rachète Pen Duick IV à Tabarly et raconte ses voyages et vend des photos pour payer les premières échéances.
Pour mieux appréhender son bateau, il participe à la Sydney-Hobart puis gagne Tahiti pour y écrire des reportages sur la Polynésie. Sur place, il prépare son Pen Duick pour son retour en métropole et fait la rencontre de sa compagne en 1971, qui lui donnera trois enfants.
Un marin, aventurier et reporter
Le 17 juin 1972, il participe à la quatrième Transat anglaise, course en solitaire au départ de Plymouth, direction Newport, à bord de Pen Duick IV. Il rallie les États-Unis en 20 jours, 13 heures et 15 minutes, nouveau record (25 J, 20 heures, 33 m par Sir Thomas Lipton en 1968) qui fait de lui un héros. Éric Tabarly, son mentor, avait lui aussi participé à la Transat anglaise, décrochant la victoire lors de la 2ème édition.
Il se met alors en tête de réaliser le premier tour du monde en solitaire en multicoque à bord de Pen Duick IV, rebaptisé Manureva, "l'oiseau du voyage" en Tahitien, qui a été légèrement adapté pour affronter les mers de l'hémisphère sud. Il prend alors le départ de Saint-Malo à bord de son multicoque le 8 septembre 1973. Il fait une escale à Sydney et franchit le Cap Horn le 3 février 1974. Le 28 mars 1974, il est de retour à Saint-Malo, battant le record du tour du monde en solitaire en monocoque de Sir Francis Chichester de 32 jours.
En parallèle, une course autour du monde en équipage en monocoques se déroule pour la première fois, la Whitebread, à laquelle participe Tabarly. Les mauvaises langues ont alors reproché à Alain de vouloir s'attirer la couverture médiatique de la Whitebread, sans y participer. C'est également cette course qui a mis fin à l'amitié des deux hommes, Alain Colas bénéficiant des faveurs du public et Eric Tabarly, critiqué, avait dû abandonner.
La construction de Club Méditerranée
En 1975, Alain Colas se lance dans la construction d'un voilier de 72 mètres de long, de quatre-mâts, le Club Méditerranée, à la pointe de la technologie. Il utilisait les énergies éoliennes, hydrauliques et solaires et possédait un système de positionnement par satellite, un ordinateur et un fax. Il souhaite réaliser la Transat anglaise en solitaire de 1976 à son bord. Le 19 mai 1975, le navigateur se fait sectionner la cheville droite par le cordage d'une ancre sur Manureva. Il subit alors 22 opérations pour sauvegarder son pied. Il supervise néanmoins la construction de son quatre-mâts depuis l'hôpital de Nantes. Le 15 février 1976, le bateau est lancé à l'arsenal du Mourillon à Toulon et fait sa première sortie en mer le 21 mars 1976.
Le 5 juin 1976, Alain Colas prend le départ de la cinquième Transat anglaise en solitaire à Plymouth. Cette édition est balayée par des tempêtes sur l'Atlantique Nord qui coulent cinq navires. Club Méditerranée est touché, les drisses sont coupées. Il décide alors de faire une escale technique, arrive et écope d'une pénalité de 58 heures, le comité lui reprochant l'aide d'équipiers pour hisser ses voiles lors de son arrêt. Il est rétrogradé à la 5e place.
Après la course, il représente la France sur Club Méditerranée au défilé des navires sur l'Hudson pour le bicentenaire des États-Unis. De retour en France en 1976, il organise "Bienvenue à bord", des visites et des navigations à bord de son quatre-mâts qui rencontrent un vif succès.
En 1980, Bernard Tapie rachètera alors Club Méditerranée à l'abandon, qui deviendra Phocéa.
Une dernière course qui en fera une légende
En 1978, Alain Colas participe à sa dernière course et prend le départ de Saint-Malo le 5 novembre pour la première édition de la Route du Rhum. "Le bateau marche à merveille, j'ai retrouvé le contact avec Manureva… je le mène plus doucement qu'autrefois et je pense qu'il m'en sait gré… Manureva et moi faisons bonne route… Salut à toute l'équipe." Alors qu'il passe les Açores, au large du Portugal, il envoie son dernier message radio le 16 novembre 1978 "Je suis dans l'œil du cyclone. Il n'y a plus de ciel ; tout est amalgame d'éléments, il y a des montagnes d'eau autour de moi" Alors qu'il fait partie de la tête de la course, il est enseveli par une tempête en n'en sortira jamais… Il disparaît en ce triste jour, à l'âge de 35 ans. À cette époque, les multicoques ne sont pas insubmersibles et sont construits en aluminium, qui est plus lourd que l'eau. De nombreuses recherches vont être menées mais personne ne retrouvera jamais ni le marin, ni le bateau.
De nombreux hommages
En 1979, Serge Gainsbourg écrit une chanson en hommage au navigateur disparu, la célèbre "Manureva" qui sera composée et chanté par Alain Chamfort. Quand la famille l'entend à la radio c'est un déchirement mais après tout elle a aussi permis de conserver le mythe d'Alain Colas et de son célèbre "oiseau du voyage". Plusieurs rues, bâtiment, lieux portent aujourd'hui le nom d'Alain Colas.
Crédit photos : alain-colas.com
Alain Colas Officiel
Alain Colas navigateur de Manureva