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A partir de Genève, le Rhône court à travers de profondes vallées qui s'élargissent à l'approche de la cité lyonnaise. De leur jeunesse glaciaire, les eaux du fleuve gardent une teinte laiteuse bien particulière. Un aspect de torrent de montagne, l'impétuosité en moins tant les barrages ont assagi son cours. Ce sont justement ces barrages qui font le Haut-Rhône. Qui le rendent navigable, mais qui aussi l'isolent du commun des voies d'eaux.
Les barrages de la CNR
Ces ouvrages régulent le cours du fleuve mais sont autant d'obstacles à la navigation. En effet, la Compagnie Nationale du Rhône y a établi des ouvrages permettant la production d'hydroélectricité. La CNR a pour triple mission la production d'énergie, la préservation de la ressource en eau et la navigation. Cette dernière n'est encore que partiellement accomplie.
Ah la carte...
Même pour la partie navigable, aucune carte de navigation n'a été publiée. Il existe bien un Guide du plaisancier disponible en ligne et dans la plupart des offices du tourisme. Il référence les haltes et facilités riveraines, mais ne comporte pas de véritable carte. On trouve sur le site de VNF des planches illustrées détaillant les abords des barrages. C'est finalement le dépliant destiné aux vélos et canoës et édité par le Syndicat du Haut Rhône qui est le document le plus utile pour visualiser l'ensemble du parcours.
Le vélo est d'ailleurs l'autre bonne façon de découvrir le Haut-Rhône : le fleuve est bordé par la ViaRhona, une belle voie cyclable qui longe le Rhône sur une majorité de son parcours entre Genève et la Méditerranée, et qui offre un accès privilégié à des sites difficiles à rallier en voiture.
Un portique transbordeur
De Sault-Brénaz à l'usine de Brégnier-Cordon, un long bief non balisé est accessible, mais les haut-fonds sont nombreux. Le barrage de Brégnier-Cordon est doté d'un transbordeur : un portique roulant qui descend une rampe et sort le bateau de l'eau, pour l'y remettre de l'autre côté de l'ouvrage. Cet équipement est limité à des bateaux pesant moins de 3,5 tonnes.
Des barrages éclusés
En amont, le Rhône est navigable sur 52 km entre Brégnier-Cordon et Seyssel, grâce à des barrages dotés d'écluses. Cette partie permet de rallier le lac du Bourget par le canal de Savière. Plus en amont, les barrages de Seyssel et de Génissiat ne sont pas franchissables. Par contre il est possible d'aller en explorer les retenues à bord d'un bateau transportable, même si aucun balisage n'est mis en place.
Un monde à part !
Le fait que la section navigable du Haut-Rhône soit coupée du reste du réseau en fait un univers particulier et d'une variété attachante : des lacs ont été formés par les retenues d'eau. Les parties sauvages alternent avec des liaisons en canal, mais ces canaux sont d'une largeur telle qu'ils ne parviennent pas à altérer l'impression d'espace. Les villages riverains ont chacun une personnalité affirmée qui prévient la monotonie. L'un est voué aux loisirs, l'autre à l'artisanat, quand le suivant est riche d'histoire...
De Bugey en Savoie...
Le petit port de Murs-et-Gelinieux ouvre sur le plan d'eau de Cuchet. Les paysages s'escarpent ensuite au point de devenir réellement montagneux. Le Vieux Rhône s'enfonce entre les parois de profondes gorges tandis que le chenal principal suit le canal qui mène aux écluses de Belley. Le port de Massignieu-de-Rives est niché dans une anse du lac du Lit au Roi. C'est un site qui nous a littéralement enchanté : tout y est, la douceur de vivre, le paysage, sans oublier les oiseaux d'eau par centaines.
Chanaz, porte du lac
Les plaisanciers locaux se pressent pour emprunter l'écluse de Savière et le canal qui conduisent au lac du Bourget. On comprend qu'ils aient hâte d'aller se mêler à la belle plaisance qui dore ses vernis sur les rives du lac, mais c'est oublier un peu vite les richesses du parcours. Chanaz est un petit village quasiment lacustre. C'est une destination courue par des touristes qui viennent y séjourner dans des chalets sur pilotis, y pratiquer les loisirs nautiques ou simplement goûter à la douceur de ce village au bord de l'eau. Chanaz est de ces escales dont on se rappelle : un lieu attrayant, mais qui a su éviter les pièges habituels du succès et garder son âme !
Seyssel la batelière
A Chautagne, deux écluses jumelées permettent d'accéder au bief de Seyssel, un haut-lieu de la navigation locale. Aux meilleurs temps de la batellerie, un volume important de fret était chargé à bord des seyssines, des embarcation ouvertes de 25 mètres de long, qui étaient souvent vendues à Lyon pour le bois d'œuvre ou de chauffage. L'on s'évitait ainsi le long et pénible halage de retour.