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Un équipage "parfait" dans tous les domaines de compétence
En janvier 2019, Philippe convoie son catamaran en Guyane pour une future croisière aux Antilles. Covid oblige, le bateau reste bloqué à la marina Jacaré, au port de Cabedelo, sur la pointe extrême Est du continent sud-américain. Début 2021, il apprend que son catamaran va être réquisitionné s'il ne vient pas le récupérer. Il prépare alors un équipage d'amis et habitués, composé d'un skipper professionnel de métier, d'un mécanicien et de lui-même, chirurgien-dentiste.
Philippe explique : "À nous 3, on était l'équipage parfait, capable de couvrir tous les besoins sur ce type de navigation : gérer le routage, la météo, naviguer, réparer et soigner ou opérer".
Décès de l'un des équipiers
Au bout de 8 jours, à 750 milles nautiques de leur point de départ, la drisse de grand-voile casse. Les conditions sont bonnes, 9 nœuds de vent et la mer est calme. Mais les réparations ne se passent pas comme prévu et le drame survient. Philippe perd l'un de ses équipiers, mais surtout l'un de ses amis. Il contacte d'abord le CCMM de Toulouse, pensant qu'il s'agit du bon contact avant de se rendre compte que c'est le CROSS qui gère ces situations d'urgence. Le premier est en fait un centre médical, qui vous conseille en cas de blessures ou de maladies survenues en mer. C'est également l'organisme à qui confier les dossiers médicaux des équipiers du bord avant un grand départ.
Philippe alerte : "Quand on navigue, on ne pense pas que ça puisse arriver. En cas d'accident grave, tout ou partie de l'équipage va perdre ses moyens, entre autres, à la vue du sang, d'une personne inconsciente, et risque une "sidération" entrainant une incapacité à réfléchir et à agir, et peut avoir une attitude négative pour la gestion de l'accident"
Prévoir les principaux problèmes qui peuvent survenir en mer
C'est pour cette raison qu'il souhaite partager quelques conseils tirés de son expérience, et détaille :
"Il faut apprendre à gérer un accident qui peut arriver. Le briefing de sécurité est indispensable, même pour les petites traversées. Il faut prévoir les principaux problèmes qui peuvent arriver : gérer une casse de drisse au milieu de l'Atlantique, aborder un cargo par 25 nœuds de vent pour récupérer du gasoil ou autre, gérer les rapports avec le CROSS en cas d'accident, avec le CCMM, gérer un décès à bord, monter dans le mât si c'est indispensable…"
Faire des choix et s'y tenir
En plein milieu de l'Atlantique, deux solutions s'offrent aux deux hommes d'équipage : repartir en Guyane à 1 200 milles sous le vent ou aller au vent vers le Cap vert, Mindelo à 750 milles, mais uniquement avec un solent, la GV et le spi n'étant pas utilisables. Après un temps de réflexion, l'équipage décide d'opter pour la 2e solution. Deux bateaux de pêche japonais se trouvent à 8 nautiques et pourront les ravitailler en carburant, leurs réserves étant bien épuisées. Mais le catamaran n'aura jamais aucune réponse. C'est finalement "escorté" par le CROSS depuis la terre, qu'il ralliera le Cap Vert après trois transbordements de gasoil et une navigation de 8 jours.
"Tant qu'on ne l'a pas vécu, on ne s'imagine pas devoir aborder un cargo immense. Souvent, les manœuvres se passent en pleine nuit. On voit les cargos arriver, mais la VHF ne porte qu'à 10 nautiques. L'AIS, lui, permet de bien voir comment le cargo arrive, voir s'il diminue sa vitesse. Il permet de voir et d'être vu."