Aspirer et filtrer l'eau de mer
Les dessalinisateurs sont de plus en plus présents sur nos bateaux de plaisance. Mais comment fonctionnent-ils ? Passons en revue les grandes étapes de la production d'eau douce à bord, avec les spécialistes de la Compagnie Hydrotechnique.
La première étape est de pomper de l'eau de mer à travers un passe-coque situé sur les bordés de fond. La crépine permet une première filtration grossière à 150 microns. Pierre Taillefer, technicien de la Compagnie Hydrotechnique détaille : "Cela permet de retenir les algues et les grosses impuretés et protéger la pompe basse pression."
La pompe basse pression gave le circuit en eau de mer, avec une pression supérieure à 0. L'eau passe ensuite dans des filtres de 20 et 5 microns. Un manomètre permet de contrôler la pression et détecter les encrassements.
La pompe haute pression prend ensuite le relais pour démarrer le cœur du processus de dessalinisation.
Dessalinisation par osmose inverse
Comparable à une pompe de karcher marinisée, la machine aspire l'eau de mer filtrée et l'envoie dans les membranes du dessalinisateur à une pression d'environ 60 bars que l'on appelle haute pression ou pression HP. La vitesse de rotation de la pompe haute pression détermine le débit qui alimente les membranes à osmose inverse. Ce débit doit être constant car il assure l'auto-nettoyage des membranes avec le bon rapport entre le débit d'eau produite et le débit d'alimentation.
Le technicien de la Compagnie Hydrotechnique compare le fonctionnement des membranes de l'osmose inverse à la peau humaine : "La membrane est un enroulement de films polyamides autour d'un tube en polyéthylène, séparés par un tissu très fin. Le tout est ensuite vernis. Sous la peau, il y a le sang, un liquide concentré, à l'extérieur de la peau, il y la sueur qui traverse la peau par le phénomène d'osmose. La membrane se comporte comme les pores de la peau qui se dilatent avec la température et laissent passer des particules plus ou moins grandes. Elle bloque les cristaux de sel, mais aussi les bactéries et certains virus. Plus il fait chaud, plus le volume produit, à pression constante, est élevé, mais moins la filtration est fine. Au contraire, dans les eaux froides, la capacité diminue. Plus on ajoute de membranes en série, plus le dessalinisateur produit, dans la limite des caractéristiques de ces membranes."
En moyenne, pour 100 L d'eau puisée, un dessalinisateur produit 10 L d'eau douce pour l'équipage du bateau et 90 L sont rejetés en mer avec une concentration plus élevée de sel. Un dessalinisateur produisant 300 L/h doit pomper 800 L/h. Les plus petits appareils ont un rendement de 10%, les plus volumineux vont jusqu'à 30% de rendement.
Une eau bonne à consommer
Même s'ils sont souvent un complément plus que la seule source d'eau douce du bateau, les plaisanciers s'inquiètent parfois du risque lié à sa consommation en boisson. Dans les eaux tempérées, avec une fabrication à 25 °C, l'eau du dessalinisateur contient environ 400 ppm, soit dans les normes classiques. Dans les eaux très froides du grand nord, le nombre de particules peut descendre entre 50 et 100 ppm, proche d'une eau déminéralisée. Le maximum permis selon les règles de l'Organisation Mondiale de la Santé est de 1000 ppm. On commence à sentir un goût salé à partir de 1200 ppm. "Cela serait un problème si on ne mangeait rien à côté, On peut aussi ajouter un filtre de reminéralisation et des filtres à charbon" conclut rassurant le technicien de la Compagnie Hydrotechnique.
Seule la technique de dessalement par évaporation, utilisée sur les bateaux de commerce, produit une eau distillée impropre à la consommation humaine , sans ajout de sels minéraux.