Bien qu'il s'agisse avant tout d'une voie de liaison entre l'Europe du nord et la Méditerranée, le canal du Rhône au Rhin présente bien des attraits, à commencer par sa manière d'emprunter la vallée et le lit du Doubs chaque fois qu'il le peut. Une intimité que le navigateur complice partage à plaisir, passant de l'un à l'autre à chaque méandre. Ce n'est qu'en aval de Dole que les 2 se séparent. Le canal débouche en Saône à Saint-Symphorien, tandis que le Doubs conflue avec elle à Verdun-sur-le-Doubs.
Sous les murailles du quartier historique de Dole
Le port de Dole jouxte le quartier des tanneries. Ateliers et moulins d'antan sont désormais convertis en restaurants et galeries qui bordent un joli canal fleuri. On se perd à plaisir dans les caves ouvertes et les passages voûtés. En jouant les passe-muraille on trouve là un lavoir, ici la maison natale de Louis Pasteur. La ville est accueillante et ses rues pavées agréables et animées. Le soir venu en rentrant au bateau, on ne manquera pas de traverser la passerelle pour aller profiter de la lumière rasante qui a coutume de dorer les bateaux amarrés devant la vieille ville et le clocher de la collégiale.
Une navigation au doigt et à l'oeil
Les premières écluses se passent en canal. A la première qu'il franchit, le navigateur se voit remettre une télécommande qui permet de déclencher la manœuvre depuis le poste de barre, en pressant simplement "Montant" ou "Avalant". Certaines ont leurs 2 portes ouvertes en permanence. Ces "écluses de garde" ne sont fermées qu'en cas de crue pour éviter l'envahissement du canal par le flot du Doubs. En temps normal, on les passe donc simplement en ralentissant. Faisant halte en rivière au pied de la superbe falaise de Roche-sur-Nenon, on ne manquera pas d'emprunter le chemin qui mène au plateau et à la chapelle d'où la vue s'étend fort loin sur la vallée.
On suit le chenal à l'estime
Sur cette portion naturelle, on découvre la signalisation en rive : au lieu du balisage traditionnel, des panneaux à terre indiquent la distance du chenal par rapport à celle-ci. Ce système est d'autant plus surprenant pour le néophyte que la transparence de l'eau laisse souvent apercevoir des bancs de roche de part et d'autre d'un chenal aussi étroit que théorique... Les portions de canal sont encombrées d'herbiers et de nénuphars qui n'incitent pas à s'approcher des berges. Les clochers que l'on aperçoit inciteraient à faire escale dans les villages, mais l'absence de ponton et les fonds incertains découragent de tenter l'aventure d'un accostage sauvage.
Le canal et la rivière se suivent et parfois se confondent
De fait, on croise surtout des bateaux de plaisanciers en transit, souvent des scandinaves en route pour la Méditerranée. Pourtant, les paysages sont forts et attachants comme à l'amont de l'écluse 62 du Moulin des malades où le canal n'est séparé du Doubs que par un muret courbe sur lequel hérons et martin-pêcheurs ont leurs postes de pêche. L'effet d'escalier est somptueux ! Joli également, le souterrain de Thoraise curieusement occulté par un rideau liquide qui s'interrompt seulement au passage du bateau. Il reste juste assez de gouttes pour une petite douche, mais des jeux de lumière et de miroirs agrémentent la traversée qui débouche à angle droit sur un très beau bief bordé de falaises et dominé par les ruines du château de Montferrand.
La boucle se boucle au dessous de la citadelle
Mais bientôt, l'imposante silhouette de la Citadelle annonce Besançon. La vieille ville est enserrée par une boucle du Doubs que l'on peut suivre si son tirant d'eau le permet. Sinon, on coupera par le tunnel de Tarragnoz, creusé dans la roche, 118 mètres au dessous de la Citadelle. A l'autre extrémité du tunnel et face à la Cité des Arts, le port est agréable et on y ressent l'atmosphère jeune, étudiante et des plus agréables qui baigne la ville. Le long de la boucle, les hautes façades se mirent dans les eaux du Doubs, tout comme la statue de Jouffroy d'Abbans, le premier au monde à avoir construit un bateau à propulsion mécanique en 1776 !
Une vallée aux rives boisées et escarpées
En amont, la nature reprend ses droits alors que la Citadelle pointe encore son nez au dessus du relief. Plus on remonte et plus la navigation requiert d'attention : les herbiers et les bancs de roche visibles en transparence confirment et complètent les marques de chenal. Le port de Deluz est géré par Claude Lorand du chantier Doubs plaisance, installé dans une ancienne papeterie. Le paysage est étagé et les prairies à vaches se perdent en falaises et forêts d'altitude. Au coeur de cette nature préservée, on poursuit jusqu'à la halte de Baume-les-Dames, agrémentée d'un restaurant qui tient terrasse directement sur le canal.
Dans cet environnement on ne peut que trembler rétrospectivement en pensant aux bouleversements qu'auraient provoqué le creusement d'une liaison Rhin-Rhône à grand gabarit, un temps envisagée. Même si cette voie d'eau est notoirement sous-équipée en pontons et que les attraits touristiques se concentrent dans les villes, le Doubs et le canal constituent une belle expérience fluviale à vivre !
Trucs et astuces locaux :
- La Fromagerie comtoise est une institution doloise. Les Garnichet y proposent Comté, Mont d'Or et autre Cancoillotte, mais également du vin, de la charcuterie et des biscuits. Rien que du local !
- La télécommande qui commande le passage des écluses est géo-localisée. Il est recommandé de l'allumer 1 ou 2 minutes avant d'arriver à l'écluse afin que le GPS se situe.
- Attention à ne pas se tromper de touche... Dans ce cas, l'écluse se prépare dans le mauvais sens et le système ne détectant pas de bateau, se met en sécurité.
- Il n'est pas toujours aisé d'estimer sa distance par rapport à la rive pour situer le chenal. On peut se baser sur la longueur du bateau pour étalonner son pifomètre.
- Les haltes sont peu nombreuses et certains villages qui paraissent séduisants depuis l'eau sont difficiles d'accès. Les quais et pontons les plus praticables sont ceux de Rochefort-sur-Nenon, de Ranchot et de Thoraise.
- Le souterrain de Thoraise est barré par un rideau liquide qui s'interrompt dès que le bateau s'avance.
- La boucle de Besançon vaut le détour mais les tirants d'eau importants devront emprunter le tunnel de Tarragnoz.
- La citadelle mérite largement que l'on fasse l'effort d'y grimper pour une visite !
- Juste en face du Musée du temps de Besançon, on ne manquera pas d'aller découvrir les créations horlogères de P. Lebru à la boutique Utinam.
- Le chantier Doubs plaisance à Deluz peut sortir des bateaux jusqu'à 20 tonnes.
Le Canal du Rhône au Rhin en résumé :
- Longueur : 110 km de Saint-Symphorien à Baume-les-Dames
- 36 écluses électrifiées télécommandées par l'usager
- Vitesse limitée à 10 km/h en rivière et 8 km/h en canal
- Vignette et taxe de navigation : Oui
- Gestionnaire de navigation : VNF
- Gabarit : 38,70 x 5,20 m
- Tirant d'air mini : 5,20 m
- Tirant d'eau mini : 1,80 m
- Loueur : Nicols à Dole, Le Boat à Saint-Jean-de-Losne, Les Canalous à Pontailler-sur-Sâone
- Période de chômage : le canal est navigable toute l'année, hors crues du Doubs
- Application smartphone : non