Une envie née il y a 3 ans
Gwénolé Gahinet est coureur au large dans la vraie vie : Mini, Figaro, IMOCA, Ultim... Il est même détenteur du Trophée Jules Verne aux côtés de Francis Joyon. Anne-Laure, son épouse, est co-fondatrice de la "Colloc", un espace de coworking basé à Lorient, en Bretagne. On l'a aussi découverte aux côtés de Clarisse Crémer, à l'époque de ses vidéos promotionnelles et humoristiques en Classe Mini.
Tous deux ont la mer dans le sang. Anne-Laure a appris la voile en Bretagne petite et compte quelques régates à son actif comme le Tourduf' ou le Spi Ouest France. Elle a également suivi la course Les Sables-Les Açores-Les Sables à bord d'un bateau accompagnateur.
"Elle a une bonne expérience en navigation côtière et au large. Elle est à l'aise en mer, elle n'est pas malade. Elle adore vivre sur l'eau" explique Gwenolé.
Ils sont les heureux parents de deux petites filles, Julie et Cléo.
Depuis le mois de septembre, ils expérimentent un nouveau mode de vie : vivre sur l'eau et voyager à travers la planète. Un rêve démarré il y a 3 ans.
"Ce voyage en famille va nous permettre de profiter du fait que l'on s'aime, que l'on soit bien en famille. On a envie de voir nos enfants grandir. L'idée a germé au moment du congé maternité de Cléo, il y a 3 ans. On est parti 1 mois ½ dans les Grenadines en bateau. On a adoré. L'idée de repartir était un bon projet."
Mêler la vie à bord et l'organisation d'expéditions sportives et familiales
Outre le voyage en famille, cette coupure sur l'eau de plusieurs années va aussi être l'occasion pour le couple de pratiquer de nombreuses activités : sports de glisse, kite, wingfoil, plongée… Anne-Laure et Gwenolé espèrent également organiser des expéditions sportives et familiales autour de leur projet. C'est d'ailleurs dans ce sens qu'ils ont accueilli une famille de 5 personnes sur la 2e étape de la Mini Transat.
"On voulait voir si c'était possible, combien l'on pouvait être à bord... Et finalement, c'est un bon test réussi."
Définir un programme en fonction des enfants
Si leur voyage a donc commencé en tant que bateau accompagnateur de la Mini Transat 2021, le parcours n'est pour l'instant pas vraiment programmé. Actuellement aux Antilles, ils vont profiter de ce temps pour définir justement les grandes lignes de leur navigation.
"On devrait rester aux Antilles jusqu'en février et ensuite gagner le Pacifique en passant Panama. On voudrait rejoindre rapidement la Polynésie. Ça à l'air d'être un super endroit où être avec des enfants. Pour un début de voyage, c'est ce qui nous semble être le plus facile : pas trop d'insécurité, langue française… Ensuite, on pourrait aller aux Philippines, en Indonésie. Il y a plein d'endroits à découvrir. C'est dépaysant et intéressant de changer de langage, de culture. Ça peut aussi être très chouette."
Pourtant, leur envie de base est plutôt de sortir des "sentiers battus" de la grande croisière.
"On voulait découvrir les canaux de Patagonie, réaliser des trajets plus engagés. On est finalement revenu sur des classiques. Nos enfants sont jeunes, 3 ans ½ et 4 ans. C'est un gros boulot de s'en occuper à plein temps. On commence donc par des choses faciles et accessibles. Quand on se sentira, on fera peut-être des parcours plus originaux. On aimerait aller vers ça. Ma femme a grandi du côté de Grenoble, elle aime la montagne. Mon grand-père vivait à Avoriaz. J'aime ça aussi. On voudrait mêler cette passion de la montagne à la mer en Patagonie ou en Alaska."
Un long chantier de 11 mois pour refiter un catamaran de 47 pieds
Pour ce long voyage, ils ont choisi un bateau d'occasion, un catamaran de 47 pieds – un Eclipse 472 – convoyé de Martinique en Bretagne et entièrement remis à leur goût. Il est sûr qu'il aurait été plus simple d'acheter un bateau neuf, mais l'engouement pour le secteur est tel qu'il est dur de trouver le bon modèle et de passer outre les délais de construction importants. Ce choix est aussi celui de l'éthique, comme nous l'explique le marin.
"On a participé au mouvement "La Vague". C'est un collectif qui réfléchit sur l'écologie et la course au large. Mais aussi sur la plaisance en général. Le constat est qu'il y a tellement de bateaux peu utilisés que ça fait mal au cœur d'en construire un nouveau. C'est sûr que l'occasion ce n'est pas facile. Il faut chercher longtemps, les prix ne sont pas toujours les bons. Notamment sur le marché du catamaran.
J'avais aussi très envie de préparer ce bateau. De l'adapter à notre programme. D'avoir un bateau marin, avec lequel on puisse affronter toutes les conditions. D'être autonome en énergie et en eau (NDLR : avec un dessalinisateur). D'avoir à la fois du confort pour partir longtemps sans trop de superflu. Par exemple, notre frigo est assez grand pour être autonome, mais nous n'avons pas de congélateur.
On a fait simple au niveau des systèmes. Le bateau consomme peu d'électricité et est facile à entretenir. C'était assez passionnant comme chantier, mais assez dur. Ça a demandé beaucoup de travail. J'ai trouvé une super équipe pour réaliser tout ça. Ça a d'ailleurs été le gros du sujet."
Finalement, 11 mois plus tard, ZaiZai est tout neuf – malgré ses 11 ans - et prêt à être mis à l'eau : peintures, vitrages, accastillage, électricité, révision de tous les systèmes… Il a fallu également travailler sur tous les aspects d'un bateau de voyage : aération, ergonomie…
"Finalement, on doit gérer toutes les contraintes d'un bateau et d'une maison réunie. Je ne le referais pas tous les ans, et pas comme ça. On avait la contrainte du départ de la Mini Transat. C'était une grosse pression pour tout terminer. On y est arrivé ! C'est une fierté !
C'est un peu fou. Parfois on se demande pourquoi on fait tout ça. On aurait pu trouver plus simple. Mais notre bateau est parfaitement adapté à notre programme et original. Il répond à nos besoins et à la vie que l'on peut avoir à bord."
Une première en tant que bateau accompagnateur sur la Mini Transat 2021
Mis à l'eau début août, il reste trois weekends à la famille pour naviguer et découvrir leur bateau. Les Glénan, Hoëdic, Groix… sont l'occasion de naviguer dans des conditions avec peu de vent. Puis l'heure est à la Transat !
"C'était un grand test technique. On s'est posé quelques questions au moment du degolfage. Il y a eu un passage de front au milieu du golfe de Gascogne. Des vagues de 4 m de haut, des rafales à 35/40 nœuds. Que faire des enfants ? Les emmener ? Les laisser ? On s'est rapidement dit que c'était en dernier recours. On voulait commencer cette aventure en famille dès le début. C'est ce qui est bien quand tu fais un gros effort de préparation. Tout ce que l'on a fait n'aurait pas eu de sens si on n'y était pas allé maintenant. Finalement, tout s'est très bien passé. Elles étaient stressées, mais pas malades. Au bout de deux jours, elles vivaient normalement au près, dans de la mer. L'avantage du catamaran, c'est que ça ne gite pas, ça avance correctement et on profite de la vie à bord."
Continuer à travailler, mais de manière différente
Avec un chantier couteux, le budget mis de côté au départ a largement réduit. Gwenolé et Anne-Laure pensent donc à des manières de travailler tout au long de leur voyage, tout en profitant de leurs enfants.
"On a toujours imaginé un mode de vie différent, dans lequel on travaillerait quand même. Mais travailler de manière différente. Profiter de vivre en famille. La mission sur la Mini c'était du travail. J'ai aussi travaillé en météo pour les Ministes, réalisé le briefing météo avant le départ pour Lorient Grand Large. J'aimerais d'ailleurs continuer à développer cette activité météo. J'aime beaucoup l'exercice. Je suis passionné de météo. Le routage c'est assez magique, la façon dont on prépare la navigation avec la météo et les logiciels."
Anne-Laure garde son activité de conseils pour la Colloc, espace de co-working qui a continué d'évoluer et de se développer, qu'elle a cofondé.
Développer de nouvelles activités et partager leur aventure
En parallèle, le couple pense à une manière d'utiliser son bateau pour différentes activités : accueillir des familles, organiser des expéditions sportives.
"Le bateau est un super support pour accueillir du monde. On a plusieurs hypothèses pour travailler avec et c'est intéressant. On veut bien vivre notre voyage et être à l'équilibre. Les conditions de vie, la manière de gérer les enfants, le lieu où l'on vit change. C'est l'aventure. Les filles font l'école à bord. Les temps formels restent limités à cet âge-là. On leur dédie du temps à des activités à leur faire faire comme la cuisine, les activités du bateau. C'est notre apprentissage de la vie. C'est super sympa de les voir grandir, apprendre, être plus connectés à ce qu'ils ont envie de faire. En ce moment elles apprennent à nager à une vitesse incroyable. Elles sautent du bateau. C'est assez génial."
Après un rythme très intense depuis un mois et demi, Gwenolé, Anne-Laure et leurs deux filles vont pouvoir à partir de janvier profiter à 4, se couper un peu du monde et se poser sur leur bateau. Ils ont profité de leur escale en Martinique pour saluer leurs amis marins participant à la Transat Jacques Vabre. Ils rejoignent désormais les Grenadines et vont confier les enfants à leur famille.
"C'est un super endroit pour naviguer. Il y a du vent. On va aussi préparer avec Anne-Laure ce que l'on va faire pour la suite. Définir un programme et la manière dont on va travailler avec le bateau. On va commencer à prendre le rythme du voyage. On a de moins en moins de contraintes."
Pour suivre les aventures de ZaiZai, la famille dispose d'un site Internet, sur lesquelles elle diffuse ses podcasts, mais aussi un compte Instagram. Elle compte bien créer une communauté pour les nouvelles activités qu'elle souhaite lancer. Outre les podcasts, ZaiZai aimerait trouver des sponsors pour réaliser un véritable film de leur aventure tout au long de ces années.