À moins d'un mois du départ, dans quel état d'esprit êtes-vous ?
Je suis super contente de partir, et de partir avec Fabien (NDLR : Delahaye). De partir sur une saison qui ne ressemble en rien à la dernière (NDLR : L'année dernière, les concurrents en IMOCA ont participé au Vendée Globe). Ça nous a pris beaucoup d'énergie, c'était très sollicitant et ça nous a apporté beaucoup.
Cette course, ça amène du neuf. C'est frais, plus léger parce que je navigue en double. C'est physiquement moins impactant. Fabien m'apporte un regard nouveau sur mon bateau. Ça m'oblige à changer de regard et à changer mes habitudes. Je suis chez moi à bord et on remet du neuf dans tout ça. J'apprends des choses nouvelles avec quelqu'un qui ne connait pas mon bateau, mais qui connait ce genre de bateaux.
Je suis très contente et j'ai hâte d'y aller. Je n'ai pas beaucoup navigué cette année. Il y a eu le Fastnet et le Défi Azimut, mais je me suis aussi préservée pour laisser revenir la motivation, l'envie, la forme.
Quelles sont vos ambitions sur cette Transat Jacques Vabre ?
Fabien m'aide et me coache depuis 2018. Il m'aide à travailler sur la performance, à mieux connaitre mon bateau en tant que perfomer. J'ai le feeling et l'expérience et il arrive avec des outils pour aller un peu plus loin.
L'idée c'est de gagner en compétences grâce à son parcours de performer et de régatier. D'apprendre des choses nouvelles et de clairement performer, ce qui n'est pas chose aisée sur la Transat Jacques Vabre avec le plateau que l'on a.
L'objectif c'est de laisser le plus possible de foilers derrière nous. Les bateaux plus récents que le nôtre sont nos concurrents directs. Prysmian, Maitre Coq… sont des bateaux de génération 2016. À côté, notre bateau a fait déjà 4 fois le Vendée Globe !
On va rester dans le match avec ces bateaux-là. C'est ambitieux, car ils sont plus récents et ont donc des avantages que l'on n'a pas. Mais Fabien est un très bon coéquipier. On part pour être fier de nous et nous donner à fond.
Quel a été le chantier au retour du Vendée Globe sur MACSF ?
On a passé le bateau au peigne fin. On l'a fiabilisé, révisé et optimisé des petites choses. Aujourd'hui on part avec une préparation plus détaillée, qui nous a manquée en 2020. Mais le potentiel du bateau est le même qu'avant le Vendée Globe.
Peux-tu nous parler de ton co-skipper, Fabien Delahaye et de ce choix ?
Il connait plein de bateaux différents. Il est éclectique. Il a navigué en Figaro, participé à un tour du monde avec Dongfeng, fait de l'IMOCA, du Multi50… Il m'apporte plein de choses de ce point de vue. Il est aussi très agréable à vivre, a toujours le sourire, et est toujours positif.
Quels sont les contraintes et avantages d'un format de course en double en comparaison du solitaire ?
La contrainte, c'est potentiellement de ne pas être d'accord sur un gros choix stratégique et de devoir composer. Il faut aussi accepter de faire un choix qui n'est pas le sien. C'est moins facile de se mettre d'accord à deux que tout seul. Une autre contrainte, qui n'arrive pas à tous les coups, c'est quand on fait de mauvais coups, quand une option n'a pas payé. C'est plus facile d'être déçue dans son coin qu'à deux, car on la responsabilité de l'autre.
Mais il y a principalement des avantages. Je suis contente de mon duo. On a un regard plus riche sur la situation, on échange nos points de vue, on change aussi de point de vue. Ça me sort de mes habitudes. Ça donne de la fraicheur.
Pour le côté physique aussi. Les manœuvres sont plus faciles et rapides et moins éprouvantes à deux. La course est quelque part plus punchy. On enchaine plus vite les trucs. En solitaire, quand je fais un choix de voile, je le fais pour un moment, car la manœuvre est fatigante. En solitaire, il y a une notion de gestion à moyen et long cours. En double, on est beaucoup plus dans l'action que dans la gestion. C'est bien d'alterner des saisons en solitaire et en double.
Que pensez-vous des nouveaux parcours de course ? Qu'est-ce que ça va changer ?
Je dirais que principalement, mis à part le port d'arrivée, on passe deux fois le pot au noir. C'est un endroit difficile où il n'y a soit pas de vent soit trop de vent. C'est ce côté aléatoire. Il faut passer au bon endroit pour ne pas rester coller dans le pot au noir. On peut perdre des places, c'est ce qu'il s'était passé il y a 4 ans.
C'est très énergivore de passer un endroit comme ça. En même temps les dés ne seront pas joués après le premier pot au noir. Ça va permettre un jeu très ouvert pendant un certain temps.
Ce qui est chouette c'est d'avoir conservé un parcours qui va vers le sud, vers le Brésil, même si on remonte vers le nord ensuite. Ça ouvre le jeu stratégiquement et il y a plus de variétés dans les conditions rencontrées. Ce n'est pas juste être poussé dans les alizés. On va rencontrer plein de conditions différentes. On va passer l'Équateur ce qui est sympa aussi.
Comment vous sentez-vous face à la concurrence, aussi bien en termes personnels qu'en termes matériels (bateau) ?
Le plateau est incroyable cette année. Sur le Vendée Globe, des bateaux se sont assez vite retirés de la course. Des bateaux neufs avec de gros potentiels comme Corum et Arkéa-Paprec. Des bateaux n'étaient pas présents sur le tour du monde comme les 11 th Hour Racing, mais qui sont très rapides.
C'est un plateau exceptionnel donc ce sera un peu moins facile pour MACSF de batailler avec les bateaux de dernière génération. En tout cas c'est génial d'avoir un super beau plateau. Ça tire vers le haut, ce qui ne serait pas le cas s'il y avait moins de bateaux. C'est plus chouette.
Sur le Vendée Globe, j'ai pu me dire que je finirais dans le top 5. Ici, ce n'est pas possible. On va laisser le plus de foilers derrière, et tenir compte de ce plateau et le prendre comme positif.
Après la Transat Jacques Vabre, quels sont vos projets ?
Le premier truc c'est de ramener le bateau à la maison en convoyage retour en équipage. Ensuite on va faire un chantier avec quelques travaux. On vise de repartir sur le Vendée Globe 2024 et on aimerait apporter quelques modifications. La saison va démarrer tôt avec la Bermudes 1000 puis quelques semaines après la VALS (Vendée Arctique Les Sables-d'Olonne) et puis la Route du Rhum en solitaire. En double, tout est plus léger, tout est moins pesant. Il faudra être en forme en début de saison, la navigation coute beaucoup d'énergie.