"Une édition exceptionnelle !", "Gravé dans les annales !", "Du jamais-vu !"… Sûr que cette édition du Vendée Globe restera à jamais gravée dans les esprits de tous les passionnés du tour du monde en solitaire. Si le tour du monde s'est transformé en régate au contact, les 8 arrivées en 24 h en attestent… On regrettera cependant de n'avoir pas justement pu les voir ces arrivées, la météo étant trop mauvaise pour réaliser des prises d'images…
Malgré les conditions sanitaires, l'organisation avait réussi à obtenir une autorisation pour qu'une haie d'honneur de 300 personnes (volontaires, bénévoles…) puisse accueillir les marins sur le chenal. Sono à fond, feu d'artifice ! La fête était bien là, mais les spectateurs derrière leurs écrans avaient du mal à s'y retrouver, le live des arrivées laissant à désirer…
Premier, mais pas vainqueur !
Mercredi 27 janvier, 20 h 35 min 47 s, Charlie Dalin (Apivia) boucle son premier tour du monde en 80 jours, 6 heures 15 minutes et 47 secondes. Malheureusement, les conditions météo sur zone sont trop mauvaises, les hélicos cloués au sol et les bateaux au port… On ne verra pas Charlie passer la ligne… Marée oblige c'est également sur un semi-rigide qu'il brandira sa pyro en remontant le célèbre chenal pour célébrer cette victoire…
Mais le chrono le tient… Chrono qui lui a d'ailleurs fait prendre cette route Sud pour le finish, préférant batailler avec Louis Burton (Bureau Vallée 2) plutôt qu'avec les "bonifiés" comme il l'expliquera par la suite en conférence de presse. Car s'il est le premier à terminer la course, il sait aussi que la victoire est loin d'être acquise.
Derrière lui, deux skippers peuvent encore lui voler la vedette. Yannick Bestaven (Maître Coq) et Boris Herrmann (SeaExplorer Yacht-Club de Monaco) bénéficient d'une bonification de temps pour le sauvetage de Kevin Escoffier dans les mers du Sud. 10h15 pour le premier, 6h pour le 2e… En somme, si Yannick Bestaven ralliait Les Sables-d'Olonne avant 6h51, il l'emportait…
Charlie profite donc de ses moments de "vainqueur" et révèle avoir subi de gros dégâts sur le bateau… D'abord son foil bâbord – dont il a dû réparer la cale, y perdant une journée et sa place de leader en tête de flotte – mais ce qui le marquera le plus c'est d'avoir réussi à affaler une voile de 160 m2 décrochée du bout-dehors, sur le pont de son bateau après des heures à se battre…
Car le Vendée Globe, c'est aussi ça… On ne dévoile pas ou peu ce qu'il se passe en course… Heureux et fatigué, il annone avec fairplay comprendre ses bonifications, ce qui arrivera, arrivera, mais préfère ne pas jeter un œil sur la carto, ce qui scellerait son sort…
Coup du sort pour Boris Herrmann
Alors que le skipper d'Apivia est arrivé depuis à peine 15 minutes, un rebondissement vient de se jouer à 90 milles de la ligne d'arrivée… Boris Herrmann se reposait tranquillement dans son bateau quand il a heurté un bateau de pêche, dont l'AIS n'était pas allumé…
Le marin n'a rien, mais le bateau est en sale état, le foil tribord fortement touché, obligeant l'allemand à réduire le rythme pour continuer… Pour passer coute que coute cette ligne d'arrivée…
Hilare comme un beau comme 2e
04 h 09 min et 24 secondes après Charlie Dalin, Louis Burton déboulait à la 2e place du classement sur son Bureau Vallée 2 "complètement détruit" comme il le confira en conférence de presse. La tête brulée de marin a forcé comme un fou sur son bateau pour s'assurer ce podium, subissant de très nombreuses avaries, l'obligeant d'ailleurs à faire escale à Macquarie pour grimper en tête de mât.
À 00 h 45 min et 12 s il devait donc le 2e à franchir la ligne d'arrivée des Sables-d'Olonne, après un tour du monde bouclé en 80 jours, 10 heures, 25 minutes et 12 secondes.
"La prochaine fois, c'est moi qui gagne le Vendée Globe !" s'amusait-il en conférence, après avoir remercié l'organisation pour la délicieuse entrecôte et la bouteille de vin qui allait avec.
Fin du suspens…
Jeudi 28 janvier 2021, à 4 h19 m et 46 secondes, le sort des deux premiers était scellé ! Yannick Bestaven franchissait à son tour la ligne d'arrivée après 80 jours, 13 heures, 59 minutes et 46 secondes. Arrivé 7h 43min 59s derrière Charlie Dalin, sa bonification de temps lui permettait ainsi de devenir le grand vainqueur de cette édition ! Le skipper d'Apivia prenait la 2e place et Louis Burton la 3e.
Lui qui espérait seulement finir le tour du monde ira donc jusqu'à le remporter ! Heureux, sous le choc, il profite de cette victoire entourée de ses proches, de son équipe devenue sa famille ! Il n'en revient pas, mais à une pensée pour Charlie… "On est deux vainqueurs sur ce Vendée Globe"
Il confiera en conférence de presse avoir été très choqué par le naufrage de Kevin… Ne plus croire à la victoire au niveau du Brésil, perdant ses 400 milles d'avance… Lui aussi a subi de gros dégâts sur son bateau, ne disposant plus d'autant de voiles qu'il le souhaitait… C'est d'ailleurs pour ça qu'il choisira une option nord pour terminer sa course.
Le trio étant réuni et la marée au plus haut, les skippers pouvaient enfin s'offrir une remontée du chenal sous les applaudissements de la haie d'honneur, bercés par la sono à fond et des lignées de feux d'artifice !
Un Ruyant épuisé et ému
À 5h42 et 01 secondes, c'est Thomas Ruyant (LinkedOut) qui franchissait à la 4e place la ligne d'arrivée de la course après 80 jours 15 heures 22 minutes 01 seconde, 11 heures 37 minutes 15 secondes, après le premier (en temps compensé), Yannick Bestaven.
Le gars du nord aura subi une dernière avarie sur son bout-dehors, mais aura ramené son bateau blessé jusqu'à bon port. En effet, le nordiste avait subi une grosse avarie de foil bâbord, obligé de le couper et de naviguer "amputé"… Tout au long de la course, il aura mené une belle bagarre avec Charlie Dalin, restant toujours dans son sillage à le menacer… Charlie viendra d'ailleurs l'accueillir à son arrivée.
Cette arrivée laissera néanmoins un goût amer au public, Yannick Bestaven recevant son trophée de vainqueur au même moment, sous le feu de tous les projecteurs…
En conférence de presse, le skipper de LinkedOut laissera éclater son émotion, ému jusqu'aux larmes…
Pas le temps de souffler !
Du jamais vu vous a-t-on dit ! Quelques heures plus tard, Boris Herrmman franchissait enfin la ligne d'arrivée sur son bateau amoché à 11h 19min 45sec, après 80 jours, 20 heures, 59 minutes et 45 secondes. Grâce à sa bonification de 6h, il détrônait néanmoins Thomas Ruyant de sa 4e place.
Le premier des bateaux à dérives
À 12 h 18 min 20 sec, Damien Seguin (Groupe Apicil) devenait le premier des bateaux à dérives à rejoindre les Sables-d'Olonne. Après 80 jours, 21 heures, 58 minutes et 20 secondes, il devenait aussi le premier skipper handicapé à boucler un Vendée Globe, pour rappel le skipper est né sans main gauche.
Il assurait d'ailleurs le show dans le chenal, déguisé en capitaine crochet pour célébrer son arrivée, sa victoire.
Giancarlo Pedote passait la ligne en 7e position à 13 heures 02 minutes et 20 secondes après 80 jours, 22 heures, 42 minutes et 20 secondes, devant ainsi le premier italien à réaliser une si belle performance sur un Vendée Globe.
Rien n'est encore joué !
Mais à ce stade du jeu, rien n'est joué justement ! Car le Roi Jean – attendu dans la soirée – pourrait bien venir bouleverser le classement. Pensant terminer à la 8e position, puis à la 6e, c'est sa femme Anne qui lui dira "Tu peux encore terminer 4e !"
C'est donc un Jean Le Cam, le regard perdu dans la mer qui franchira la ligne à 20 heures, 19 min et 55 secondes après 80 jours, 13 heures, 44 minutes et 55 secondes. Un Le Cam dansant sur le roof de son bateau au son d'une mélodie de Johnny Hallyday et savourant un verre de vin – et non pas la traditionnelle bouteille de champagne offerte par l'organisation à chaque arrivée de skipper – une fois au ponton.
Avec sa bonification de temps de 16h15, le Roi Jean prend donc la 4e place du podium. Il confiera en conférence de presse avoir calé son arrivée sur la marée, ce qui lui donnera finalement l'opportunité de grimper dans le classement.
On apprendra aussi qu'il a vécu un Vende Globe "insoutenable"… Son bateau s'est délaminé et chaque jour, il survivait à un potentiel naufrage. Il en profitera également pour féliciter ses "poulains", Damien Seguin et Benjamin Dutreux, auteurs d'une course incroyable ses des bateaux à dérive droites, glissant des tacles aux grosses écuries de course au large et aux foilers, qui n'ont pas lieu d'être sur un tour du monde selon lui.
Le classement des premières arrivées
1 – Yannick Bestaven – 80 j 03 h 44 min 46 s
2 – Charlie Dalin – 80 j 06 h 15 min 47 s
3 – Louis Burton – 80 j 10 h 25 min 12 s
4 – Jean Le Cam – 80 j 13 h 44 min 55 S
5 – Boris Herrmann – 80 j 14 h 59 min 45 s
6 – Thomas Ruyant – 80 j 15 h 22 min 01 s
7 – Damien Seguin – 80 j 21 h 58 min 20 s
8 – Giancarlo Pedote – 80 j 22 h 42 min 20 s
9 – Benjamin Dutreux – 81 j 19 h 45 min 20 s
