Point hebdo #10 du Vendée Globe 2020 : Une régate à couteaux tirés en tête de flotte

© Charlie Dalin / Apivia #VG2020

Voici le résumé de cette 10e semaine du Vendée Globe. Charlie Dalin est le nouveau leader de cette fin de parcours, mais rien n'est joué puisque les 9 premiers se tiennent en seulement 127 milles. Du jamais vu !

Vendredi 8 janvier : Deux mois de course

Cela fait déjà deux mois que les solitaires du Vendée Globe ont quitté les pontons des Sables-d'Olonne. À ce stade de la course, il ne reste que 5 400 milles à parcourir pour le leader de la flotte, Yannick Bestaven, soit 22 % du parcours. Quatre ans en arrière, Armel le Cléac'h s'apprêtait à franchir l'Équateur… Ce que l'on peut retenir à ce stade de la course, c'est que 80 % de la flotte est encore en course – habituellement on compte 50 % d'abandon – et qu'elle n'a jamais été aussi compacte que cette année.

Pip Hare a pu remplacer son safran bâbord dont la tête de mèche avait cassé, laissant 2 places au classement et gagnant des bleus et des courbatures. Mais elle va désormais pouvoir reprendre le fil de la course.

Ceux qui naviguent encore dans le Grand Sud, d'Alan Roura (15e) à Kojiro Shiraïshi (21e) ont hâte de laisser les conditions harassantes de ce dernier mois derrière eux en franchissant le 3e cap de leur parcours. Jérémie Beyou (18e) a constaté une déchirure sur son J2 et décrit des conditions violentes, avec du vent qui ne descend pas en dessous de 35 nœuds et des creux de 6 à 7 m.

À l'arrière du groupe, Manu Cousin a eu son lot d'embêtement, suite à un empannage involontaire, dû à une panne de pilote automatique, son chariot de latte de grand-voile s'est cassé, et grand-voile partiellement déchirée au-dessus du 3e ris.

En tête de flotte, ça bataille sévère ! Thomas Ruyant navigue de concert avec Apivia, les deux hommes chassant le Yannick Bestaven. Ce dernier a retrouvé de la vitesse au large de Buenos Aires et maintient toujours quelque 400 milles d'avance sur le duo. Mais la météo est toujours incertaine et il devrait subir divers ralentissements dans sa progression vers le Nord.

Samedi 9 janvier : Des corps épuisés, des bateaux chahutés

Les navigateurs du Pacifique sont secoués de toute part, et notamment Stéphane le Diraison, comme il l'expliquait lors de la vacation : 60 nœuds avec des vagues de 8 m déferlantes qui couchaient le bateau. Clément Giraud (24e) et Miranda Merron s'apprêtent eux aussi à subir les affres dépressionnaires dans les jours à venir.

Isabelle Joschke a passé le Cap Horn et retrouvé l'Atlantique mais doit gérer ses problèmes de quille qu'elle ne peut plus faire basculer. Cette dernière se demande comment les bateaux peuvent résister à de telles conditions de mer…

À l'avant de la flotte, Yannick Bestaven voit son avance fondre comme neige au soleil. En 24 h, le skipper de Maitre CoQ IV a perdu la moitié de son avance sur Charlie Dalin, coincé entre deux cellules anticycloniques qui forment un mur dans son nord. Ses deux poursuivants – majoritairement sur leur bonne amure (bâbord) qui leur permet de s'appuyer sur le foil tribord - avancent fort. Apivia a même fait une pointe à 21,6 nœuds quand Yannick Bestaven n'avance qu'à 9,7 nœuds.

Après constatation de la casse du faux vérin de quille de son IMOCA, entrainant une légère voie d'eau à bord, Isabelle Joschke a pris la décision d'abandonner la course. Elle pointait en 11e position et première femme du Vendée Globe.

Dimanche 10 janvier : Bataille en tête de flotte, bientôt le Horn pour 4 skippers

Avec l'abandon d'Isabelle Joschke, ils ne sont désormais plus que 26 skippers en course. 13 sont en pleine remontée de l'Atlantique Sud et 13 attendent de franchir le Cap Horn, encore dans le Pacifique.

Pour les cinq premiers de la flotte, il faut trouver les meilleures transitions entre les petits systèmes météo tout en évitant les zones de calme. Si Yannick Bestaven est reparti depuis quelques heures, il va de nouveau buter dans un front froid au large d'Itajai. Derrière lui, ils sont quatre chasseurs (Dalin, Seguin, Ruyant et Burton) qui naviguent au coude à coude et lui mettent la pression. D'ici les premières arrivées aux Sables-d'Olonne aux alentours du 29 janvier, il risque d'y avoir du suspense…

Demain, Arnaud Boissières, Alan Roura, Jérémie Beyou et Pip Hare vont successivement doubler le Cap Horn. Les conditions dans le Pacifique Sud sont encore difficiles en approche du mythique caillou.

Plus loin, en 24e position, Alexia Barrier va subir des rafales à 60 nœuds. Ari Huusela devrait rencontrer des vents moins forts grâce à sa trajectoire plus nord.

Lundi 11 janvier : Le jeu du bluff

En ce 64e jour de course, tous les scénarios sont possibles, tant les conditions météo brouillent les pistes. L'avance de 400 milles dont disposait Yannick Bestaven le 7 janvier s'est réduite comme peau de chagrin. À moins de 40 milles, Charlie Dalin, Thomas Ruyant, Damien Seguin et Louis Burton pourraient rejoindre le leader aux commandes de la course depuis 17 jours. Certes, le skipper de Maître CoQ dispose d'une bonification de temps de 10 h 15 pour son implication dans le sauvetage de Kevin Escoffier.

Thomas Ruyant, privé de données précises de vent, a pu grimper en haut de son mât (sa 5e ascension depuis le début de la course) pour réparer son aérien.

Avec cette configuration de course, où les dix premiers pourraient être regroupés, le bluff s'installe. Personne n'en dit trop sur l'état des voiles, le potentiel général des bateaux. On sait qu'Apivia et LinketOut sont privés de foil bâbord, que les soucis de hook ont été légion depuis le départ, que des voiles ont été réparées, mais aux vacations, chaque skipper indique être à "100 %".

Arnaud Boissières a doublé son 4e Cap Horn à 12 h 35. 1 h 30, c'était au tour d'Alan Roura. Bientôt, ce sera au tour de Jérémie Beyou – aux alentours de 17 h – puis de la Britannique Pip Hare. Stéphane Le Diraison pointe à 450 milles du rocher, heureux d'être enfin sorti de la dépression.

Mardi 12 janvier : 127 milles d'écart pour les 9 premiers

C'est une course dans la course qui se joue dans le peloton de tête composé de 5 skippers – Dalin, Seguin, Bestaven, Ruyant et Burton - seulement séparés de 25 milles. Et c'est sans compter leurs 4 poursuivants – Herrmann, Dutreux, Pedote et Le Cam. Au total, ces 9 marins se tiennent en seulement 127 milles.

Au total, la flotte s'étire sur moins de 7 000 milles et désormais, 17 IMOCA naviguent en Atlantique Sud depuis que Pip Hare a doublé le Cap Horn la nuit dernière. Deux concurrents se font encore secouer, Romain Attanasio et Alexia Barrier à 800 milles dans l'ouest du point Nemo. Du côté du Cap Horn, les prochains à franchir le cap seront Stéphane Le Diraison et Didac Costa.

Après son abandon, Isabelle Joschke navigue prudemment dans des conditions de mer très difficiles et cherche le bon endroit pour faire escale.

Mercredi 13 janvier : Un match plus que serré en tête de flotte

Le groupe de 9 en tête de flotte navigue par 12-15 nœuds de vent d'Est-Nord-Est et entame une course de vitesse qui ne devrait plus les arrêter jusqu'aux Sables-d'Olonne. Les 4 premiers sont groupés en 34 milles : Apivia, Maitre Coq IV, Bureau Vallée 2 et LinkedOut.

Dalin, nouveau leader, est décalé dans l'Est et a probablement plus d'opportunités pour jouer sur les angles et aller vite. Bestaven, dans l'Ouest est plus contraint et se voit dans l'obligation de serrer le vent sous peine se rapprocher de trop près des côtes brésiliennes. Le vent pourrait adonner – tourner vers l'Est – et donc favoriser ceux décalés dans l'Est.

À 14 h 3, Stéphane Le Diraison doublait enfin le Horn. Les prochains seront Didac Costa, et Kojiro Shiraïshi cette nuit. Manu Cousin a passé la distance symbolique des 500 milles devant le Horn.

Jeudi 14 janvier : Duel de titan entre Dalin et Burton

Sur cette remontée vers l'Équateur, le vent varie brutalement en force et en direction. Au classement de 15 h, Charlie Dalin, en tête, devant de 20 milles Louis Burton. Yannick Bestaven se voit relégué en 6e position, derrière Thomas Ruyant, 3e, Damien Seguin, 4e et Boris Herrmann, 5e. Tous se tiennent en moins de 100 milles ! Un incroyable scénario !

Malgré tous les problèmes qu'il a rencontrés, Louis Burton a fait une magnifique remontada ! Il se livre à une véritable bataille avec Charlie Dalin, dont le foil bâbord l'empêche d'être en totale efficacité. Le plus rapide du groupe est Boris Herrmann, qui avec près de 17 nœuds revient dans le Top 5.

Jusqu'à Recife, il va falloir composer avec les lignes de grains, dont le vent se montre puissant en bordure et nul sous les nuages. Yannick Bestaven, décalé dans l'Ouest a tout perdu. Avec 6,3 nœuds de vitesse moyenne ces dernières 4 h, le voilà relégué à 96 milles de la tête de flotte.

Cette course de vitesse se déroule exclusivement en tribord amure et les grandes manœuvres ne sont pas au programme. Seulement des réglages fins et l'étude la carto : pot au noir peu actif, anticyclone dans le sud des Açores, puis grosse dépression. Encore 12-13 jours avant de connaitre le grand vainqueur de la course.

A l'arrière, les groupes et duels formés depuis la fin du Pacifique Sud ont créés des liens forts. Ainsi, Clarisse Crémer (13e) échange avec Armel Tripon et Jéremie Beyou (15e) discute avec Arnaud Boissières et Alan Roura.

Miranda Merron et Clément Giraud ne sont plus qu'à 1 000 milles du Cap Horn.

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