Le Vendée Globe, une folie !
Plus habitué aux montagnes qu'à la mer, c'est lors de vacances en Bretagne que Romain Attanasio découvre la navigation. Comme beaucoup, c'est sur la Mini-Transat qu'il fait ses armes, avant d'intégrer le circuit Figaro. En 2016, il prend le départ de son premier Vendée Globe, mais l'aventure ne se passe pas exactement comme il l'avait prévu, même s'il terminera son tour du monde à la 15e place.
"Le Vendée Globe c'est une bêtise, de la folie, de l'inconscience !" s'amuse le skipper. "Pour mon premier Vendée Globe, j'avais pris en main mon bateau en février pour un départ au mois de novembre. C'était un vieux bateau et j'étais en mode aventure. J'ai percuté un OFNI au large de l'Afrique du Sud, et je pensais que la course était terminée pour moi. Pourtant, j'étais au contact de bateaux plus récents que le mien dans le Grand Sud."
Romain Attanasio réussit à réparer ses safrans, mais la compétition s'arrête d'une certaine façon pour lui. Sans concurrents à qui se confronter, il termine seul son tour du monde.
Des moments magiques
Pour cette 2e participation consécutive, le navigateur sait donc à quoi s'attendre. Il a même travaillé avec un coach mental, repéré les pièges qu'ils l'attendent sur la cartographie.
"Les parachutistes disent que c'est le 2e saut qui fait le plus peur. Je sais à quoi m'attendre, je sais qu'il y a des endroits difficiles. À Noël, en 2016, c'était dur. Un Vendée Globe ne ressemble jamais au précédent. Ce sera de toute façon très dur. Il y a des choses que je prépare mieux, et d'autres où j'ai pris de l'assurance et que je prépare peut-être moins bien. Il faut faire attention."
En dehors de l'expérience acquise, il retire aussi de son premier Vendée Globe des souvenirs qui ne le quitteront jamais. À commencer par ce nouveau départ d'Afrique après son avarie.
"Je me souviendrais de ce moment. Mon départ d'Afrique avec mes safrans réparés. 5 jours avant, quand je les ai abimés, je pensais que la course était terminée. Je savais que j'abandonnais. Ça m'a traversé l'esprit pendant 5 heures. Mais finalement, 5 jours après, j'étais encore en course, avec des safrans navigables, au près dans 30 nœuds. C'était le bonheur.
Le passage du Cap Horn était aussi incroyable, avec au loin la cordillère des Andes enneigée. C'était fou. C'était la délivrance. J'ai réussi à traverser les mers du sud. À en ressortir vivant. C'était un peu une victoire.
Bien sûr, il y a l'arrivée aussi. J'ai eu tellement de galères, j'étais tout le temps sur le fil. Je me demandais sans cesse à quel moment je serais obligé d'arrêter. Finalement, quand on passe la ligne, on a réussi. Plus rien ne peut arriver."
Hâte de retrouver la mer sur un bateau plus performant
Avec la crise sanitaire qui a retardé le programme de tous les marins, Romain Attanasio a hâte de repartir en mer.
"Le bateau est habituellement remis à l'eau en juillet, mais là, c'était un mois plus tard. Avec cette année particulière, on a moins navigué que les autres années. On a pu gérer ça parce que ça fait trois ans que j'ai mon bateau, c'est plus problématique pour les bateaux qui ont démarré tardivement. Je ne me sens pas en déficit de navigation, mais je me sens en manque d'océan, en manque de haute mer. J'ai hâte de retrouver le Grand Sud. C'est dangereux, mais envoutant. C'est comme quand on est gamin et qu'on à l'interdiction d'aller dans la maison en ruine du village. C'est un endroit où l'on navigue que quand on fait le Vendée Globe."
Pour cette édition 2020, le navigateur a récupéré il y a 3 ans un bateau plus performant. Il s'agit de l'ancien IMOCA de Fabrice Amédéo pour le Vendée Globe 2016, un plan Farr de 2007.
"Je l'ai récupéré à l'hiver 2017, après le Vendée Globe. On a eu le temps de le préparer même si on n'avait pas le budget pour faire des modifications délirantes. J'aurais aimé inverser les dérives, voir installer des foils, avoir un mât aile, inverser les ballasts… On a seulement allégé le bateau en enlever un espèce de satellite qui servait à ne pas matosser. Il suffisait de mettre tout dans le meuble et de le tourner. Il prenait beaucoup d'espace à bord. C'est un système intelligent, mais très lourd. On a aussi enlevé la grosse casquette.
On a gagné 600 kg, le bateau ne fait plus que 8,5 tonnes. C'est assez léger pour cette génération. Il est plus dépouillé. Ça me permet du coup d'emmener 150 plats lyophilisés et 50 plats sous-vides" s'amuse Romain.
Faire la course avec les bateaux à dérives
Avec un bateau – certes d'ancienne génération – mais plus performant, le skipper qui s'avoue compétiteur, va placer le curseur un peu plus haut et faire une course dans la course avec les bateaux à dérive.
"C'est un bateau d'ancienne génération. C'est un coffre-fort, il est normalement solide. Il est un peu plus vieux donc ça peut casser aussi. Mais il est éprouvé, solide, je le connais bien. Sur ces gros bateaux, il faut savoir le faire aller vite. Le gérer dans les difficultés. Ça demande de l'expérience s'il y a un souci. Il faut gérer tout de suite. C'est important de bien connaitre son bateau. J'aimerais bien avoir un bateau à foils comme les copains du Vendée Globe. Je n'imagine pas un bateau neuf, mais un bateau à foils qui me permette de rivaliser. Les entrainements à Port laf' c'est rageant. En 5 minutes je suis hors-jeu. Dans 17 nœuds, à 110° du vent, je vais à 18 nœuds, alors que Sam (NDLR : Samantha Davies, skipper de l'IMOCA Initiatives-Cœur, concurrente du Vendée Globe 2020 est aussi la compagne de Romain Attanasio) va à 24 nœuds et Charal, à plus de 30 nœuds ! C'est incroyable ! Il faut voir ce que ça donne ! C'est la première fois qu'il va falloir ralentir pour pouvoir vivre."
Encore une fois, son objectif est de terminer la course, un premier défi quand on sait que seulement la moitié de la flotte boucle son tour du monde.
"Il y a une chance sur deux de finir. Il faut gérer ça. Je vais quand même essayer d'aller doubler les bateaux à dérives, et peut-être des foilers moins bien mené. Mon objectif c'est de finir à la meilleure place."
Préparation technique et relations publiques
Comme pour son premier Vendée Globe, Romain Attanasio racontera son aventure au public par le biais de films, de mails ou encore de visioconférence à bord de son bateau.
"C'est important. C'est un sport à huis clos, ce qui nous arrange bien en ce moment. Il faut le faire partager aux gens, aux salariés. Il y a beaucoup d'entreprises qui m'accompagnent dans ce projet. J'ai envie de leur montrer qu'ils ont bien fait. Je travaille avec l'équipe technique, mais aussi beaucoup sur les relations publiques depuis mon arrivée aux Sables-d'Olonne. C'est très important. On court après les financements. J'ai acheté le bateau en propre, et j'ai une cinquantaine de partenaires qui me suivent. Communiquer, ça permet aux entreprises de se faire connaitre."
Son pronostic du podium du Vendée Globe ?
"Samantha (Initiatives-Cœur), Charlie Dalin (Apivia) et Thomas Ruyant (LinkedOut). Sam a un bateau très performant, avec des foils. Elle navigue super bien. C'est une course longue, et c'est un diesel, ça tombe bien."