Un outillage précis pour gagner du poids et de la rigidité
La construction du Dehler 30 OD a pour objectif d'obtenir un voilier à la fois très rigide, pour éviter les déformations sous charge, et de respecter un devis de poids léger afin d'être performant dans le petit temps et au portant.
On sait que la production industrielle en grande série est peu compatible avec les exigences de performance, c'est pourquoi le constructeur allemand s'impose un mode de fabrication sophistiqué qui se rapproche des chantiers semi-artisanaux.
Tout d'abord, le moule est façonné avec une extrême précision grâce à leur outillage, en l'occurrence une machine de fraisage numérique à 5 axes. C'est un immense bloc de polystyrène qui sera sculpté par une fraise rotative. De ce bloc, sortiront les préformes de coque, de pont, et de structures internes qui respecteront les plans d'architecte au millimètre près.
C'est sur ces préformes que seront fabriqués les moules en composite d'où sortiront de très nombreux exemplaires en tous points identiques.
La précision de ces outillages est déterminante. Dehler veut innover dans ses méthodes de construction en assemblant l'ensemble des pièces structurelles dans la coque encore maintenue dans son moule. C'est un gage de rigidité permettant d'affronter le gros temps et de solliciter le voilier en course. Le respect des cotes est primordial si l'on ne souhaite pas combler les vides avec une forte épaisseur de colle.
La multiplication des éléments rapportés évite l'emploi d'un contre moule global comme c'est souvent l'usage. Ce choix s'avère beaucoup plus léger, mais c'est aussi nettement plus complexe et couteux en termes d'heures de production.
Une mise en oeuvre et des choix de matériaux de qualité
Un bateau de course efficace n'est pas forcément tout en carbone. Les Class40 en sont la démonstration, à tel point qu'ils rivalisent souvent avec des Imoca d'ancienne génération, pourtant construits comme des pièces d'orfèvreries tout en carbone.
C'est ainsi que le chantier Dehler a opté pour une fabrication se rapprochant des Class40, à savoir un composite en sandwich de fibre de verre, une résine vinylester infusée, et une âme de sandwich en mousse PVC.
Rares sont les chantiers qui poussent ce processus de fabrication à chaque cloison, aux pièces structurelles ainsi qu'au moindre capot. De plus, certains éléments en monolithique comme les varangues sont renforcées de carbone pour assurer une légèreté optimale et éviter de trop importantes épaisseurs de fibre de verre.
Une quille en composite pour abaisser le centre de gravité
L'ambition de légèreté s'accompagne d'un objectif d'abaissement du centre de gravité. Ce travail est une longue addition d'optimisations allant de la tête de mât et s'achevant au bulbe de quille. Et justement, le chantier a opté pour la fabrication d'un voile de quille en composite profilé portant un lest en plomb en forme de torpille.
Cette méthode de construction, associée au tirant d'eau de 2,20 m assure un centre de gravité très bas pour cet appendice. Ce choix, en comparaison d'une quille en fonte ou en tout en plomb, permet de réduire le poids global de la quille tout en conservant un couple de redressement important. Difficile de faire plus optimisé.
Là encore, cette démarche technique est peu visible et coûteuse, mais on ne peut plus efficace pour atteindre les objectifs de performance une fois sur l'eau.
Le cercle vertueux de la légèreté
Si le bateau est léger, le gréement recevra moins d'effort. Ce n'est pas pour autant qu'il faut arrêter l'optimisation au niveau du pont. Afin de réduire les poids dans les hauteurs, tellement nuisibles à la raideur à la toile, le mât est en carbone ce qui assure une grande légèreté.
En effet, pour faciliter l'usage d'une grand-voile à corne, Dehler a opté pour des barres de flèche très poussantes. L'angulation des barres de flèche induit une compression importante dans le mât. Un espar en aluminium serait trop épais donc trop lourd pour supporter cette compression.
Enfin, le mât carbone - et son drapage de fibres qui peut être optimisé sur toute la hauteur selon les contraintes - permet d'arborer un seul étage de barres de flèche. C'est ainsi qu'on peut réduire encore le poids et abaisser le centre de gravité de l'ensemble du gréement dormant.