Une préparation méticuleuse
Cette expérience a eu lieu au large de Marseille, sur un radeau de survie de 16 places. 12 naufragés volontaires ont pris place à bord : 10 élèves en école de Marine Marchande et 2 pompiers du CETIS, le centre de formation des marins pompiers.
Pour des raisons de sécurité, il a été convenu que le radeau serait relié à un mouillage, et non laissé à la dérive. Une veille constante par VHF permet de signaler un éventuel problème et la SNSM peut intervenir en moins de 20 minutes.
Hormis quelques vêtements et une combinaison par naufragé, aucun équipement supplémentaire n'a été embarqué à bord du radeau. L'objectif était de survivre uniquement avec le matériel obligatoire, dont le listing est défini par la SOLAS (norme professionnelle), sur laquelle se base la division 240 (norme qui régit la plaisance).
Les préétudes ont démontré que les trois premiers jours étaient les plus difficiles. Le corps et l'esprit doivent s'adapter un environnement confiné et hostile. Une fois ce cap dépassé, la survie dans un radeau peut (en théorie) dépasser les 10 jours.
La préparation physique et mentale a été assurée par une équipe composée de médecins, de psychologues et de marins pompiers. Des analyses ont été effectuées avant et après, afin d'étudier les conséquences d'un tel séjour sur le corps humain.
Toutes les conditions météo
L'expérience a eu lieu dans des conditions météorologiques variées. La mise à l'eau a eu lieu dans 30 nœuds établis, et la fin du séjour s'est déroulée dans une jolie pétole méditerranéenne.
"Dans le mauvais temps, nous étions un peu amorphes, souligne Romain Burgos, à cause du Mercalm [NDLR Médicament anti-mal de mer], alors que quand il faisait beau, notre ennemi, c'était l'ennui". Les participants ont discuté, beaucoup dormi, et se sont également permis quelques brasses à la nage autour du radeau, autant du moins que la température encore fraîche de l'eau et leurs forces un peu diminuées par le régime de survie le leur ont permis.
"En tant que formateur, j'ai cru que ce serait beaucoup plus facile", avoue David, l'un des marins-pompiers, "Je me suis rendu compte que rien ne valait l'expérience dans le gros temps". Il remarque cependant, avec une pointe de fierté : "Quand une vague nous a submergé, à 1h du matin, tous les passagers du radeau ont suivi ce qui est enseigné en cours : ils se sont activés ensemble, pour vider le radeau et rester en sécurité, signe que le message pédagogique est bien passé.".
Dure vie de naufragés
Lorsqu'ils évoquent les éléments qui leur ont semblé durs à supporter, reviennent souvent l'humidité, le manque de confort ("bataille de pieds au milieu de la nuit") et la saveur des rations de survie. De son côté, le second marin-pompier, Jean-Marie, raconte avoir particulièrement souffert de la mauvaise qualité de sommeil, et de la soif. "J'ai choisi à un moment donné d'arrêter de m'alimenter pour diminuer cette sensation de soif". Quelques aléas extérieurs sont aussi venus déranger l'expérience des naufragés. Des bateaux, curieux, se sont approchés, un voilier s'est même emmêlé dans le mouillage du radeau, mettant en péril l'ancrage de l'embarcation.
Jean-Marie poursuit ainsi : "Ce vécu, pour des formateurs, ça n'a pas de prix. Dans les histoires de naufrage racontées a posteriori, on n'a jamais les détails. Or, dans la survie, ce sont les détails qui font la différence." Du côté des élèves, les naufragés, unanimes, saluent la cohésion qui a prévalu au sein de cet étrange équipage malgré les conditions difficiles. "On n'a pas perdu ce lien qui existait entre nous", souligne Hermine Piriou-Courson, "on l'a renforcé."
Le bilan matériel et humain
Globalement, le bilan matériel est très satisfaisant. La structure du radeau a parfaitement rempli son rôle. Les divers détails à améliorer ont été transmis au fabricant. Côté humain, une perte de poids a été constatée sur tous les volontaires. Ils ont également souffert de problèmes de peau à cause du sel et de l'humidité.
Une autre expérience du même type est programmée en 2020, sur un canot de sauvetage rigide au large de Saint-Malo. Il reste des places disponibles : avis aux amateurs !