On pourrait penser (à tort) que le bois est seulement utilisé pour la restauration des vieux bateaux. Mais il n'en est rien, le bois est un matériau moderne. Certes le bois est très présent dans les restaurations des coques des Riva et de quelques autres belles réalisations en bois (voiliers ou bateaux à moteur) et ces chantiers témoignent de la bonne santé de l'esprit vintage. Mais le bois est aussi très présent dans l'élaboration de certains projets récents.
Nicolas Arnoult travaille actuellement sur des projets modernes, aux lignes tendues et aux carènes incisives. Pour preuve le Kanta, ce trimaran de 12 pieds, imaginé et dessiné par 2 jeunes architectes (Francois Pérus et Romain Scolari) et mis en chantier dans son atelier récemment. Les coques sont réalisées en contreplaqué, avec des bras de liaison en lamellé collé (frêne et acajou). Ou cet autre navire, le Blue Pearl inspiré des taxis vénitiens, qui comporte 4 couchages et une motorisation électrique pour une longueur de 7 m. Si le premier exemplaire navigue déjà, Arnaud va s'occuper de produire les coques des prochaines commandes...
Un vrai sacerdoce, et une passion généreuse
Après ses études de charpente marine en Finlande (sa mère est finlandaise, et il y a vécu 7 ans), ce jeune homme certainement talentueux, arbore du haut de ses 31 ans un palmarès prometteur dans la construction ou la restauration de navires très variés qui tour à tour entrent dans son chantier afin d'y recevoir une cure de jouvence, ou une restauration plus profonde.
Ainsi lors de notre visite nous pouvions contempler une vieille coque en bois massif de 33 pieds construite sur l'Ile de White pas le chantier Woodnuts & Co. À côté un Riva Tomassi montrait ses entrailles en attendant la rénovation de son pont. De l'autre côté, le voilier Taïra de 12,10 m construit au Havre par Grivel en 1930 attend aussi le travailleur de l'art…
L'art de manier le rabot ne suffit plus pour se déclarer charpentier de marine. Il faut désormais aussi réaliser les dessins de carènes, connaître les techniques de tracé, de gabarillage. Autant de cordes à son arc que Nicolas manie avec précision.
Nicolas Arnould a déposé sa caisse à outils dans la zone de Kerran à St Philibert (56 470), dans un hangar sous toile de 200 m2 et à proximité immédiate d'autres services (mécanique, hivernage, peinture, stratification...). Pour les mises à l'eau, le chantier se situe à 5 kms de la Trinité sur mer et de ses engins de manutention. Il ne dispose pas de moyen de grutage propre, mais utilise les services d'une entreprise voisine.
De la rénovation ou du neuf
L'un des atouts du bois tient dans l'absence de moule pour la construction, donc pas de contraintes liées à cet investissement (nombre de bateaux à produire, taille…). Grâce à une ossature en bois, tous les gabarits, toutes les formes peuvent être ajustées à l'envie du propriétaire ou du charpentier, pour produire un exemplaire unique. C'est cette liberté d'action, commutée avec des tarifs plutôt compétitifs qui font l'intérêt de la charpente bois. Sans laisser de côté son aspect esthétique et chaleureux. Ajoutez à cela que le bois est un excellent isolant thermique et sonore, et vous aurez en main quelques-uns des ingrédients qui font que cette façon de faire traditionnelle reste en vogue.
Savoir choisir entre le teck ou l'iroko pour les fonds, puis entre le chêne, le pin, l'épicéa ou un résineux de l'Orégon pour les membrures et les bordées, il faut savoir adapter les variétés de bois à l'usage qui en sera fait. C'est une vraie connaissance, que peu de chantiers peuvent encore s'enorgueillir de transmettre.
D'ailleurs, même si la charpente marine n'est pas une spécialité du Morbihan, on trouve tout de même 6 d'entre eux dans le département (St Philibert, Bades, la Trinité sur Mer...). Mais il en existe aussi en Méditerranée, notamment à Canet en Roussillon.
