Toute cette histoire a commencé un dimanche soir pluvieux du mois d'octobre. Un dimanche soir comme on ne les aime pas : "Les gars, on m'a diagnostiqué un cancer au thorax. La tumeur est grosse, aussi grosse qu'un ballon de handball. Le positif dans tout cela, je suis rapidement pris en charge et commence la chimio la semaine prochaine." Je raccroche. C'était Paul. Paul qui en septembre encore nous faisait part de son intention de s'inscrire à la Mini Transat 2019 et de réaliser l'un de ses rêves, une traversée de l'Atlantique. Les jours passent, et à mesure que ses cheveux tombent, ses rêves de large, de course et d'aventures disparaissent avec. Paul a 26 ans. Il fait du sport presque quotidiennement, il ne fume pas, il n'y a pas d'antécédents familiaux. C'est simplement "un coup de pas de bol".
Je vais le voir à l'hôpital. Les yeux brillants, la voix pleine d'entrain malgré ses chimios répétées des dernières semaines, Paul me parle de François Gabart qui vient de pulvériser le record de vitesse du tour du monde à la voile à bord du trimaran MACIF. Quelques minutes plus tard, il m'annonce également que les rêves de large en solitaire, sans communication, pour lui, c'est terminé, pour un temps tout du moins. Trop dangereux me dit-il.
La Mini Transat...risquée pour un homme seul en convalescence et sans communication avec l'extérieur, je veux bien le croire. Pour avoir participé à cette même course en 2015, je sais qu'il m'a fallu puiser dans toutes mes ressources physiques et mentales pour en venir à bout. Je pense alors en boucle à ce cancer, ce projet avorté de traversée. Je pense à mon pote coincé dans son lit d'hôpital, qui garde inlassablement la pêche malgré tout. Ce pote que ma femme m'a présenté il y a dix ans quand nous étions tous deux sur les bancs de Southampton et avec qui nous avons lié depuis une solide amitié.
Pour ma part, je rêve de repartir. Le large me manque. Le solitaire, pas tellement. Début janvier, je lui soumets une idée: "Paulo, puisque tu ne peux plus partir seul, partons en double. Sur une course mythique et avec un projet exigeant, mais à notre portée à tous les deux. Nous avons deux ans, deux ans pour nous refaire une santé et nous entraîner. Partons sur la Jacques Vabre 2019 en Class40". Paul accepte immédiatement.
Ensuite, tout s'enchaîne. Entre les chimios et l'autogreffe, nous mettons au point notre projet. Nous prendrons le départ de la Transat Jacques Vabre 2019 avec la ferme volonté de montrer que tant de choses sont possibles à la seule force morale. Tant de choses, y compris une traversée en double de près d'un mois, nécessitant compétences techniques et préparation physique.
Et Paul sera notre porteur d'espoir.
Olivier Taillard
Déjà une belle histoire avant le départ
Aujourd'hui Olivier Taillard et Paul Gallet ont trouvé leur bateau. Ils partiront sur un Pogo 40 S2, un voilier qu'ils ont loué pour la saison. La location plutôt que l'achat, une solution simple pour ne pas trop impacter le budget familial de chacun. En choisissant le Pogo, ils jouent la carte de la sécurité avec un bateau très fiable, éprouvé, mais capable encore de belles performances comme ont a pu le voir sur la dernière Route du Rhum 2018.
Actuellement, le duo est à la recherche de partenaires pour boucler le budget qu'ils se fixent à 250 000 €. Kerhis, déjà le partenaire d'Olivier pour sa Mini en 2015, accepte de suivre cette nouvelle aventure.
En effet, Olivier a déjà quelques courses à son actif dont une Mini Transat en 2015 sur laquelle il se classe 11e sur un bateau dont il a participé à la construction (déjà un Pogo du chantier Structure). Ce jeune architecte naval (30 ans) n'en sera donc pas à sa première transat.
En revanche, Paul (28 ans) ne travaille pas dans le milieu de la voile. Même s'il a beaucoup navigué, ce banquier rêve tout simplement d'une première transatlantique.
À tous les deux, ils veulent mener un projet "amateur" comme des professionnels, partageant au maximum avec leurs partenaires, en leur offrant la possibilité de naviguer avec eux.