Quel est le bilan de l'année 2018 depuis la Transat Jacques Vabre ?
On s'était rencontré au départ de la Jacques Vabre. Après la course, le bateau est rentré par la mer depuis le Brésil et sur ce retour, on a été percuté de nuit par un chalutier sans feu, sans AIS, sans rien… Un flotteur a été cassé. Ça nous a foutu en l'air tout le programme d'entrainement. J'avais prévu cette transat retour pour m'entrainer en solo. On est retourné en méditerranée avec un flotteur à moitié cassé qu'il a fallu réparer. CDK est venu jusqu'en méditerranée pour assurer la réparation. On a remis à l'eau au mois de mai. Depuis le mois de juin, on n'a pas arrêté de s'entrainer, tester des réglages et fait le convoyage retour de la méditerranée jusqu'à Port Laforet. On a alterné les mises au point et les navigations sur le bateau pendant tout l'été. Ça a été plutôt intense.
En as-tu profité pour faire quelques optimisations ?
On n'a pas pu faire d'évolution technique. On a paré à l'essentiel : remettre le bateau en état de marche. Ce qui était important pour nous c'était d'avoir nos étalonnages de vitesse par rapport à nos concurrents pour déterminer sur quels domaines on devait travailler. On a bossé sur le réglage du mât et le réglage des voiles. Maintenant on est assez confiant, le bateau est bien prêt. On verra ce qui va se passer sur cette Route du Rhum 2018, on ne sait jamais ce qui peut arriver sur une course en solo.
Le bateau est-il à 100% de son potentiel ou reste-t-il une marge de progression ?
Tous les sportifs pensent toujours qu'ils peuvent progresser. Je pense que le bateau a encore une marge de progression. Il nous manquerait un an. Sans cet accident, on y serait peut-être arrivé. On va avoir un bon potentiel, mais je suis persuadé qu'on n'est pas au maximum du potentiel.
Quel est l'objectif pour toi sur cette route du Rhum ?
Faire un podium c'est tout à fait réalisable. Je n'ai pas de pression particulière, je suis serein et j'ai confiance dans le bateau. C'est tout à fait jouable.
Quelle va être la difficulté sur le parcours ?
La route je la connais bien, il n'y aura pas de surprise. Les points clefs vont être de bien gérer la vitesse du bateau et la performance.
Les premiers jours vont être un peu sportifs. Ils annoncent un peu d'air. Même s'il n'y a que 25 nœuds, nos vitesses maximales sont à 20 nœuds de vent. Si on est au reaching par 20 nœuds, on va débouler à 35-40 nœuds.
Peux-tu nous raconter le meilleur souvenir que tu as sur une Route du Rhum ?
À l'arrivée ! C'est un moment de joie, de se dire que tu l'as fait : toi face aux éléments. La terminer c'est déjà un challenge. On l'oublie trop souvent.
Comment décrirais-tu la Route du Rhum en quelques mots ?
Pour nos bateaux Multi50 c'est la transat "la plus engagée". Il ne va pas falloir perdre de temps dès les premières journées pour pouvoir prétendre à un bon résultat. Tout en se ménageant soit même pour qu'il ne nous arrive rien personnellement et techniquement.
Peux-tu nous présenter ton bateau et sa configuration en solitaire ?
Le plus difficile en solitaire, c'est de gérer les efforts. Les manœuvres les plus courantes ce sont les virements de bord. Même si on n'en a pas beaucoup sur une Roue du Rhum. Et les envois de gennak' qui sont les seules voiles qui ne sont pas enroulées à poste. Ça demande de la force, de la technique et de faire attention à la sécurité. On est obligé d'arrêter le bateau. On ne peut pas aller à 30 nœuds et se déplacer à l'avant du bateau. Qu'on soit en solo ou en double c'est pareil.
Dans le dessin du bateau, j'ai voulu recentrer tout le poste de barre, être hyper protégé. Quel que soit le bord, je peux faire mes réglages de voiles sans être exposé aux embruns et au vent. Je trouve que les Multi 50 ne sont pas suffisamment protégés. Les postes de barres des IMOCA ou des Ultims sont totalement carénés, c'est ce que je voulais reproduire.
Une seule colonne centrale, 4 winches pour toutes les voiles d'avant, un winch à l'arrière pour l'écoute de grand-voile.
Le bateau a été pensé essentiellement pour la Route du Rhum en solo. En équipage, n'avoir qu'une seule colonne c'est un handicap. On pourrait être deux dessus, alors que là, il n'y a pas la place.
Les pare-brise latéraux sont escamotables. Ça permet de rentrer à fond le point d'écoute du grand gennak'. Dans le petit temps, ça remplace le code 0, tu le bordes comme un Solent.
Le plan de pont est assez conventionnel. On a travaillé l'aérodynamisme. On a créé un tunnel où tous les bouts sont cachés par une bâche. Je considère que l'aéro est presque aussi essentiel que la forme de la coque. On l'a beaucoup travaillé dès l'étude du bateau avec l'archi. À 95%, tout avait été bien pensé à l'origine pendant l'étude.
Je me repose au maximum à l'extérieur, mais j'ai quand même un pouf à l'intérieur que je positionne au pied de l'échelle. Ça me permet d'avoir un visuel sur les répétiteurs et les écrans. J'ai un largueur d'écoute à l'intérieur. Toute ma navigation et les communications se font ici.