Route du Rhum, analyse d'un parcours en 5 étapes

La Route du Rhum - dont le départ se fait dans des conditions hivernales peut se décomposer en 5 phases principales. Avec un départ dans les frimas de l'automne en France et une arrivée après la période cyclonique en Guadeloupe, la route est variée et souvent difficile. Zoom sur les différentes phases de la course.

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Une course d'hiver

D'un point de vue météorologique, au mois de novembre, l'Atlantique Nord est parcouru d'Ouest en Est par des régimes dépressionnaires, apportant dans le golfe de Gascogne un vent essentiellement d'ouest sud-ouest assez consistant avec une mer souvent forte.

Au sud — proche de l'équateur — souffle un régime de vent d'est — les alizés — qui propulsera à grande vitesse les concurrents vers la Guadeloupe. Les skippers de la Route du Rhum traverseront donc un temps hivernal avant de rencontrer des conditions tropicales chaudes et humides.

Les phases de la course

Phase 1 : la descente de la Manche

En général

À cette période de l'année, le vent, de dominante ouest lève une mer assez forte pour ce début de course. La sortie de la Manche se fait souvent au près, car en hiver à la latitude de l'Europe, la période des régimes dépressionnaires offre des vents à tendance ouest, donc du près pour nos concurrents.

La route à faire est plein ouest et le courant est alternatif d'est en ouest. Ainsi, cela lève souvent une mer très courte à affronter, que l'on qualifie de mer casse-bateau. Durant cette première phase de course, il faudra placer le curseur de façon à être dans le bon paquet de bateau à la sortie de la mer d'Iroise, mais surtout ne rien casser avant d'attaquer le golfe de Gascogne.

Phase 2 : la traversée du golfe de Gascogne

En général

À cette saison, les régimes dépressionnaires balaient régulièrement le Golfe de Gascogne. C'est souvent à cette occasion que les premières options capitales se prennent. Nous l'avons vu, une ou plusieurs dépressions hivernales se présenteront aux concurrents de la Route du Rhum. Pour les négocier au mieux devront-ils les contourner par le Nord, par le sud, ou bien oser les traverser au plus court ?

La puissance du phénomène, sa position sur la route des concurrents, les capacités du bateau et du marin à endurer le mauvais temps sont les facteurs qui détermineront la meilleure route à suivre. En tout cas, la réputation du golfe de Gascogne en hiver n'est plus à faire.

Phase 3 : gagner le sud

Avant de gagner le Sud, il faut se décider à tourner à droite, puisque la Guadeloupe est à l'ouest. Mais à quelle latitude le faire ? Espagne, Canaries ou Cap-Vert ? Le choix de ce virage à droite est capital !

Faudra-t-il chercher la route la plus courte avec souvent un régime de vent moins portant, où faut-il chercher des alizés bien établis avec une route très sud, mais en allongeant considérablement la distance à parcourir ? C'est la position de l'anticyclone des Açores, et le potentiel de vitesse du bateau qui guideront le choix à faire et il existe 3 options :

  • Option 1 : Si l'anticyclone est positionné plutôt au nord, on pourrait être tenté de choisir une route assez directe. Les avantages seront un vent plus fort et une route plus courte. Les inconvénients seront une allure assez proche du vent, puis un vent souvent assez faible pour regagner le sud et attraper les alizés.
  • Option 2 : À l'opposé de la 1re, l'idée est d'aller directement très au Sud pour attraper les alizés bien établis, "les Alizés profonds">Option 3 : La voie du milieu. Un compromis savamment dosé pour aller au sud, mais pas trop, en allongeant la route, mais pas trop, sur des alizés établis, mais moyennement.

C'est à l'arrivée en Guadeloupe que l'on pourra constater la pertinence de l'option.

Phase 4 : la traversée de l'Atlantique et l'arrivée sur l'arc antillais

Ainsi après avoir tourné à droite, les marins se dirigeront vers l'ouest. Les vents portant offriront de belles moyennes de vitesse. Souvent, la nuit le vent souffle plus fort que le jour. Les oscillations du vent et son orientation sur la fin du parcours offriront à nos coureurs gains ou pertes de places en fonction de leur latitude.

En arrivant près de l'arc antillais, les phénomènes de grains vont se multiplier. Ces masses nuageuses très actives perturbent les alizés avec parfois de très violentes rafales et d'autres fois des calmes plats. Il faudra éviter les pièges et optimiser la vitesse, car sur cette phase de la course, il y a des places à gagner… ou à perdre.

Phase 5 : le contournement de l'île de la Guadeloupe

Enfin, alors que la vision de l'île de Guadeloupe laisserait penser que la course est finie, il faudra en faire le tour. Le contournement de l'île réservera de nombreux pièges. La Guadeloupe est une île montagneuse que les alizés vont contourner par au-dessus et sur les côtés.

Derrière l'île, sous son vent, il n'y a plus de vent ou un vent différent des Alizés. Il faudra donc s'éloigner suffisamment des reliefs de l'île pour éviter la zone de calme, ce qui rallongera la route. Ou, au contraire, il faudra naviguer au plus proche de la côte en réduisant la route, mais aussi en réduisant considérablement la vitesse, au risque même de tomber dans un trou de vent.

Ce choix sera aussi conditionné par l'heure d'arrivée, en fonction des variations des vents thermiques entre le jour et la nuit. La lucidité et les ressources physiques pourront faire gagner ou perdre aux concurrents des places précieuses.

Enfin, les derniers milles se joueront au près jusqu'à la ligne d'arrivée. Les alizés seront canalisés et souvent renforcés par les reliefs de l'île. Enfin, après avoir tout donné et même plus, les coureurs couperont cette ligne d'arrivée.

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