Un vrai duel, une vraie bataille entre les deux premiers Class40, qui s'est joué sur ce final. Depuis le départ du Havre, Maxime Sorel et Sam Manuard, sur un bateau tout neuf, tout juste sorti du chantier, ont bataillé ferme. Après avoir avalé la Manche plutôt rapidement, les 1000 premiers milles ont été toniques et ont permis au duo de réussir parfaitement leur entrée dans le match.
Si bien qu'au large des Açores, le bateau vert n'était qu'à quelques milles du Conservateur, quand le vent soufflait à plus de 35 nœuds d'Ouest. Malgré quelques soucis techniques, le bateau a tenu bon. Mais Le Conservateur en profitait pour prendre le large, mais l'écart restait encore minime au vu du parcours à suivre. Jusqu'à ce qu'une dorsale vienne par-derrière et sérieusement ralentir la progression. Devant, Yannick Bestaven et Pierre Brasseur arrivaient à passer tandis que derrière, Solidaires en peloton ARSEP, Carac-Advanced Energies et TeamWork40 étaient encore fort présents.
Au large des Canaries, lorsqu'il fallut engager l'empannage vers l'équateur, VandB accumulait 130 milles. Un écart qui ne faisait que croître surtout lorsque Maxime Sorel et Samuel Manuard décidèrent de piquer vers l'archipel du Cap-Vert pour se protéger de la houle afin de monter dans le mât pour réparer la girouette. Avec 320 milles de retard et un autre concurrent au contact, le succès à Itajaí semblait sérieusement compromis. Mais le Pot au Noir relançait le match quand le duo leader resta enferré dans les vents erratiques pendant trois jours…
À seulement trente milles du meneur de jeu, le duel était de nouveau au programme, surtout que le reste du parcours semblait avant tout une course de vitesse pure. Louis Duc et Christophe Lebas ne pouvaient d'ailleurs pas suivre le rythme imposé par les plans Verdier et Manuard et VandB grignotait les milles jusqu'à Recife pour ne plus avoir qu'une dizaine de milles d'écart… Et il y avait encore 1 500 milles jusqu'à la ligne d'arrivée ! Alors chacun à son tour tenta de petits coups tactiques, des décalages latéraux qui mettaient la pression et relançait la confrontation, particulièrement au passage du Cabo Frio.
Au golfe de Rio, les concurrents n'étaient toujours pas départagés. Avec une quinzaine de milles d'écart dans une brise qui gonflait la nuit précédant le finish avant une journée de vent decrescendo en atterrissant dans la baie d'Itajaí. Puis la nuit qui tombait au même moment en apportant ses grains de pluie et ses orages. Rien n'y faisait : Le Conservateur conservait sa marge d'avance, mais VandB dut en finir dans une brise de plus en plus instable et mollissante. Les quinze milles de retard se transformaient ainsi en près de deux heures d'écart, mais Maxime Sorel et Samuel Manuard pouvaient savourer cette arrivée de la Transat Jacques Vabre avec une place de deuxième qui n'avait pas toujours été espérée au fil des rebondissements de ce long parcours plein d'embûches…
"On a stressé jusqu'au bout parce qu'on se disait : la tactique est là, on est bien placé, mais est-ce que ça va être comme on l'a imaginé ? Et au dernier moment, on a vu que Le Conservateur était très proche de la ligne… La cohabitation était super, alors qu'on ne se connaissait pas avant la construction du bateau : avoir l'architecte à bord, c'était la garantie que le bateau était solide ! Mais surtout, c'est un excellent marin et j'ai appris beaucoup sur cette transat. On s'est tout de suite bien entendu et les choses se sont faites simplement. Je suis vraiment content d'avoir fini cette course et deuxième en plus… C'est top ! Et on a eu de très bons moments, la première nuit déjà et quand on est revenu sur Le Conservateur au Pot au Noir" a déclaré Maxime Sorel à son arrivée au Brésil.
"On y a cru jusqu'au bout, jusqu'à 4-5 heures de l'arrivée ! Les conditions étaient quand même très incertaines avec des orages et pas trop de vent à la côte… Toutes les opportunités étaient envisageables. Mais finir derrière Yannick et Pierre, c'est vachement bien : c'est un superbe équipage, deux très bons marins qui connaissaient parfaitement leur machine. Ils ont été efficaces tout le temps. Nous, il nous a parfois manqué d'expérience, notamment au portant où on a eu du mal à trouver nos repères. En plus, on a cassé notre anémomètre en tête de mât dès le deuxième jour de mer, alors on a fait toute la course sur les sensations. Le bateau étant neuf, mis à l'eau à peine deux mois avant le départ, on n'a pas eu le temps de s'entraîner : c'est ce qui nous a le plus pénalisés…" a déclaré Sam Manuard.