Il faisait figure de favori au sein de 4 Multi50 en course. Il faut dire qu'Erwan Le Roux est le tenant du titre sur ce même parcours, qui a eu lieu 2 ans auparavant. Sauf qu'au lieu de l'italien Giancarlo Pedote, c'était Yann Eliès qu'il avait choisi comme co-skipper.
Le duo démanchait dans le sillage de La French Tech-Rennes Saint-Malo, puis s'engageait dans le golfe de Gascogne derrière Ciela Village. Le front actif (qui a contraint Gilles Lamiré et Yvan Bourgnon à l'abandon après avoir percuté un container et cassé le bout de leur flotteur) était négocié à vitesse réduite 48 heures après le coup de canon, mais Erwan Le Roux et Giancarlo Pedote restaient en embuscade en se décalant plusieurs fois vers l'Ouest pour rejoindre les leaders des monocoques IMOCA.
Cette route vers l'archipel des Açores ne favorisait pas leur classement par rapport au but, mais leur permettait de viser directement l'entrée dans le Pot au Noir alors distant de plus de 1 600 milles. Arkema était en effet très à l'Est, Ciela Village devait s'arrêter au Cap-Vert pour réparer son étrave et son enrouleur de gennaker : le duo franco-italien avait de la marge pour aborder un Pot au Noir peu coopératif.
Afin de contrôler le duo d'Arkema, FenêtréA Prysmian est sorti du Pot au Noir avec plus de cent milles de retard sur les trois premiers monocoques IMOCA, mais avec plus de cent milles de décalage latéral. Mais cette option a été payante puisque Erwan Le Roux et Giancarlo Pedote ouvraient la voie avec une bonne journée d'avance sur leurs deux poursuivants de la classe Multi-50, et quelques dizaines de milles sur les monocoques.
Mais leur grand-voile s'est déchirée au large de Bahia, obligeant le duo à lever le pied pour préserver leur matériel jusqu'à Itajaí, encore distant de plus de 1 000 milles. Mais l'objectif restait de finir la course en vainqueur. Une fois passé le cap Frio, l'équipage a bénéficié de conditions de mer et de vent plus douces pour renvoyer la toile et conclure ce parcours de 5 400 milles entre Le Havre et Itajaí en moins de 17 jours… C'est la troisième fois qu'Erwan Le Roux s'impose sur la Transat Jacques Vabre sur le même bateau, avec Franck-Yves Escoffier comme équipier, avec Yann Eliès en 2013 comme skipper !
" Chaque victoire est différente, celle-là a une saveur particulière surtout avec ce bateau. C'est trois victoires sur ce bateau. Ça m'a fait remonter beaucoup d'émotions. J'ai pensé à Hubert Desjoyeaux qui m'a accueilli pour construire le bateau avec Franck-Yves (Escoffier). Tous ces souvenirs remontent, c'est un bel hommage que je veux leur rendre aujourd'hui, c'est grâce à eux tout ça. Ils ont construit un super bateau, j'ai participé à la construction de ce bateau également. C'est vraiment un super bateau. Le plus bel hommage, c'est de gagner des courses. Je dédie à Hubert cette victoire, c'était un grand homme et un grand constructeur de bateau. Cette arrivée est pleine d'émotions. Ça n'a pas été facile, on a eu des moments difficiles, les 5-6 premiers jours… Nous vivions à plat ventre. C'était délicat. Vivre à l'intérieur, c'est compliqué. Les mouvements sont brutaux, on se cogne, rien que de mettre un ciré demande une demi-heure. Faire des besoins basiques, ça demande une énergie folle. Tout ça, entre deux vomis. Une première semaine compliquée. Les conditions n'étaient pas forcément dures, mais c'était long. Cinq jours dans une machine à laver c'est dur.
Avec Giancarlo, ça s'est bien passé. Nous avons réussi notre objectif. Il y avait une belle histoire à construire dès le début. C'était de lui transmettre mon expérience du multicoque et mon expérience sur ce bateau. On a travaillé là-dessus toute l'année. On a cultivé la victoire, on a gagné toutes les courses de la catégorie Multi50. Notre objectif de duo gagnant est atteint ! Contrat rempli !
Le prochain objectif, c'est au mois de mai, en solitaire sur The Transat. La course mythique en solitaire qu'il faut décrocher avec le Multi50. J'ai déjà hâte d'y être. Ce sera encore une autre histoire. Mais dans l'immédiat je profite de cette belle victoire sur cette Transat Jacques Vabre. Le lointain, on verra après !" s'est exprimé Erwan Le Roux à son arrivée au Brésil.
Giancarlo Pedote, co-skipper "C'est magique, je rêvais de cette course depuis 2001. J'étais préparateur. Tous les soirs, je rêvais sur les quais d'être au départ un jour. Et quatorze ans plus tard, je réalise mon rêve, et en plus de la gagner c'est beaucoup d'émotions. L'arrivée de ma première transat était également au Brésil, donc le mélange de tout ça m'a touché ces derniers 10 milles de course. On a échangé nos sentiments avec Erwan, c'était un bel échange, un beau moment. J'étais bien fatigué au début de la course, j'étais un peu stressé des conditions, car je n'avais aucune idée de ce que cela pouvait donner. J'avais le mal de mer. Je ne me suis pas nourri pendant 48 heures. C'était dur, je serrais les dents. Après, c'est incroyable mon corps a repris de l'énergie, s'est habitué. Cela m'a fait l'effet opposé, car après j'étais très en forme. Je ne me sens pas trop fatigué."