Entre 40 et 50 000 spectateurs s'était donnés rendez-vous pour assister au plus grand événement voile de l'année, sous des conditions météorologiques dès plus humides. Le ciel bas, gris sombre, reflétait dans une eau gris-turquoise que les voiles multicouleurs des bateaux en stand-by. Les voiliers s'approchent de la ligne, doucement, comme s'ils étaient en mode régate. Et puis c'est le compte à rebours. A la VHF, George Pau-Langevin, la ministre de l'outre-mer donne le départ : "5, 4, 3, 2, 1 départ, bon vent".
Direction Cap Fréhel, l'unique passage obligé avant la Guadeloupe à 18 milles nautiques seulement du départ. Moment de concentration extrême chez les coureurs. Les premières minutes d'une course comme la Route du Rhum est un moment délicat. Déjà parce qu'il y a 91 bateaux qui souhaitent passer Fréhel en bonne position, ensuite parce que des centaines de plaisanciers accompagnent les navigateurs tout au long des premiers milles et que les risques de collision sont à l'esprit de chacun.
Heureusement, la VHF reste muette. Pas de faux départ. Pas de rappel. Pas d'accident.
Malgré des conditions musclées qui auraient fait renoncer bon nombre de plaisanciers, les bateaux sont partis avec la grand-voile haute, sans ris. Le spectacle est là. Les Ultimes fillent à 20 noeuds, les Mod70 sont sur 2 deux flotteurs et les monocoques Imoca et Class40 gîtent tellement que sur le Pont-Aven, le ferry presse qui suit l'épreuve, les commentaires fusent.
Sidney Gavignet a pris le meilleur départ. Thomas Coville tire son épingle du jeu et prend la tête à 14h30. François Gabart chez les monocoques est premier, talonné de peu par Vincent Riou. Loïck Peyon a, quant à lui, joué la carte de la sécurité.
Au passage au large de Saint-Malo, le vent qui pouvait amener la flotte d'un seul bord au prés est en train de tourner. Plutôt que prévu, le vent passe à l'ouest. Les voiliers vont devoir effectuer un contre bord pour remonter sur la bouée du cap Fréhel. Il va falloir exécuter deux virements de bord, une manoeuvre qui peut s'avérer très compliquée tant pour sa préparation que pour son exécution, même si les concurrents se sont beaucoup entraînés seuls à bord. Lionel Lemonchois, au vent de Sodebo avec un décalage favorable, va sans doute pousser Thomas Coville à ouvrir le bal des virements de bord, il est 15 heures.
La mer est instable, croisée et les vents sont irréguliers.
A 15 h 23, c'est Lionel Lemonchois qui passe en tête le cap Fréhel. L'Imoca de François Gabart passera la bouée 20 minutes plus tard. Il est talonné par Vincent Riou.
La flotte va maintenant chercher à quitter au plus vite la manche pour éviter les bateaux de commerce et piquer vers le sud. Ils vont aussi devoir affronter des conditions qui vont durcirent durant la nuit.