Plus qu'un simple vaisseau de fiction, La Licorne incarne un pont entre réalité historique et imaginaire collectif. Cet emblématique bateau issu des Aventures de Tintin continue d'inspirer des générations de passionnés, aussi bien des amateurs de BD que des aficionados de la mer, et reste l'un des plus beaux exemples de la manière dont l'univers nautique peut nourrir la fiction et l'aventure.
D'une maquette à l'aventure
La maquette originale de La Licorne fut réalisée par Gérard Liger-Belair à la demande expresse d'Hergé, autour de 1942. Elle a servi au dessinateur pour ses croquis alors que la prépublication en noir et blanc de l'album débuta le 11 juin jusqu'au 14 janvier 1943. D'après la maquette réalisée par Gérard Liger-Belair, la hauteur du mât d'artimon est de 21,66 m, celle du grand-mât est de 41,66 m tandis que celle du mât de misaine s'élève à 37,66 mètres. Le mâtereau de beaupré mesure quant à lui 10 mètres.
Dans l'œuvre d'Hergé, La Licorne joue un rôle central dans l'intrigue des albums Le Secret de La Licorne et Le Trésor de Rackham le Rouge qui composent un arc narratif captivant et mythologique. L'histoire commence lorsque Tintin, en visitant le Vieux Marché de Bruxelles, acquiert une maquette d'un bateau qu'il souhaite offrir au capitaine Haddock. Cette maquette se révèle être celle du vaisseau La Licorne, commandé par l'ancêtre du capitaine, le chevalier François de Hadoque. Après un vol mystérieux, le capitaine Haddock se plonge dans les archives familiales et découvre ainsi l'histoire de ce navire légendaire capturé en 1698 par le pirate Rackham le Rouge lors d'une bataille épique en mer des Caraïbes. Le chevalier de Hadoque, dernier survivant de l'assaut, parvient à s'échapper, à tuer Rackham le Rouge et à faire exploser le navire avant de fuir sur une île.
L'intrigue prend un tournant lorsqu'il est révélé que le chevalier de Hadoque avait conçu trois maquettes de La Licorne, chacune renfermant un parchemin avec des indices menant à un trésor enfoui. Tintin et Haddock, emportés par la quête, mènent une enquête à travers une série de péripéties : ils découvrent finalement l'épave de La Licorne et poursuivent leur recherche du trésor enfoui.
La Licorne : un vaisseau aux inspirations réelles
La Licorne n'est pas qu'une embarcation de fiction. Avec sa proue majestueuse et sa coque allongée, ce trois-mâts en bois incarne à la perfection le style des navires du 18e siècl. Sa décoration, pleine de dorures et de sculptures en bois, fait écho aux grands vaisseaux de l'époque alliant sophistication et fonctionnalité. Mais à quoi la Licorne doit-elle réellement son design ? Plusieurs sources historiques sont évoquées par les chercheurs et les passionnés de Tintin pour expliquer les inspirations d'Hergé. L'un des candidats les plus probables est le vaisseau Le Brillant, un navire construit en 1690 par le maître charpentier Salicon, dont les lignes et la structure auraient influencé la conception du bateau.
Cependant, la figure de proue de La Licorne, cette créature mythologique à corne unique, semble également s'inspirer d'une frégate anglaise réelle : The Unicorn, lancée en 1745. Ce navire, connu pour sa robuste construction et son efficacité en mer, pourrait avoir guidé l'imaginaire d'Hergé dans l'élaboration de cette emblématique proue.
D'autres théories suggèrent que Hergé aurait puisé sa première inspiration d'après une photographie du modèle réduit d'un trois-mâts suédois du 17e siècle reproduit sur la couverture du numéro 167 de novembre 1936 de la revue Wandelaer et sur l'eau.
Pour dessiner la tenue des matelots, Hergé s'inspire de costumes de matelots de l'époque de Louis XIV présentés dans un ouvrage d'Alfred de Marbot datant de 1854. Les matelots portent une veste bleue, une culotte bouffante blanche rayée rouge et une écharpe de même motif à la ceinture. Ils portent tous un bonnet, ce qui les distingue des pirates coiffés de foulards ou de chapeaux.
À travers ce navire légendaire, Hergé a su capturer la fascination de certains d'entre nous pour les trésors cachés, les grandes épopées maritimes et l'héritage des navires à voiles du 17e siècle. Symbole d'aventure et de mystère, La Licorne incarne l'âme même des récits qui font rêver lecteurs et passionnés de mer depuis des générations.