Le gréement de jonque, un gréement mal connu, mais pourquoi pas le gréement idéal ?

Le gréement de jonque a ses aficionados. Si ses origines viennent des temps anciens sur les mers d'Asie. Ce type de gréement avec ses voiles lattées a franchi les siècles pour être encore utilisé sur des voiliers modernes. Découverte de cette traversée du temps.

Les origines du gréement de jonque

Les jonques font partie des plus anciennes embarcations créées par l'homme. Originaires de la mer de Chine et de la région de Java, elles existeraient, au moins, depuis le IIe siècle. Leur lente évolution, basée sur le modèle de la transmission orale entre le maitre et son disciple, a produit des navires aux gréements adaptés aux conditions de cette mer, caractérisées par la mousson et des vents dominants stables et alternatifs.

En général, c'étaient des bateaux à faible tirant d'eau et des voiles plates adaptées au portant. Elles furent connues en occident vers le XIIIe siècle, avec les premières grandes navigations vers l'extrême orient et les récits de Marco Polo. Jonques militaires lourdement armées, jonques de pêche ou de commerce, de mer ou de rivière, ou jonques de redoutables pirates, leur gréement aux voiles fortement lattées asseyait leur suprématie sur la mer de Chine.

Hormis pour les navires militaires, les tissus des voiles étaient souvent fabriqués à base d'herbes tressées ou de toiles très bon marché. L'usage de lattes de bambous horizontales assurait la résistance de la voile, tout en permettant l'utilisation de ces tissus peu coûteux. C'est une des caractéristiques dont jouissent encore aujourd'hui les voiles de jonque modernes.

Le gréement de jonque occidental, avec un déclencheur : Blondie Hasler

Né à Dublin en 1914, le Lieutenant-Colonel Herbert Hasler avait rejoint les Royal Marines en 1932. Sa moustache blonde lui valut le surnom de "Blondie". Homme de caractère, intelligent, créatif, volontaire, rationnel et méticuleux, Hasler cultivait de nombreuses passions alliant l'art, la mécanique et la navigation. Ses états de services au cours de la Seconde Guerre mondiale incluent notamment un héroïque raid en canoë contre des navires allemands basés à Bordeaux. Il fut l'un des deux seuls survivants sur les 12 hommes engagés.

Après la guerre, Blondie Hasler a continué à imaginer des solutions pour améliorer la navigation en solitaire. Il fut le premier à mettre au point un régulateur d'allure à pale immergée et engrenage différentiel, dont plusieurs évolutions sont encore produites aujourd'hui. Il est aussi l'inventeur du winch self-tailing.

En 1956, il fut l'instigateur de la première course transatlantique en solitaire avec comme concept : un homme, un bateau, un océan. La course n'a pu exister que lorsque qu'un sponsor a été trouvé : le journal l'Observer. La première édition a eu lieu en 1960 sous le nom d'OSTAR (Observer Single-handed Transatlantic Race) qui ralliait Plymouth à New York.

Pour y participer, Hasler a cherché à concevoir un bateau et un gréement qui lui permettraient de ne jamais sortir sur le pont ; c'est ainsi qu'est né "Jester". Un Folkboat à quille longue de 7,50 m, modifié, sans cockpit, avec deux descentes latérales au niveau du mât et deux trous d'homme fermés par des paupières en toiles orientables pour pouvoir assurer la veille et barrer depuis l'intérieur du bateau. Il était équipé du fameux régulateur et... d'une voile de jonque. Grâce à ces équipements, dit la légende, Hasler a effectué la course en pantoufles sans jamais sortir sur le pont ! Il rejoignit New York en 47 jours, terminant deuxième derrière Chichester, sur les 5 bateaux engagés.

Il s'en est suivi un engouement, en Grande-Bretagne principalement, pour le gréement de jonque avec la participation d'architectes comme Alex Primerose (à l'époque les voiliers se construisaient à l'unité) et ensuite lors de l'industrialisation de la construction des voiliers, l'offre en option de bateaux de série gréés en jonque comme le Corribee Coromandel, ou les Sunbird.

Une bible du gréement de jonque : "Practical Junk Rig"

Pendant cette période, Blondie Hasler et Jock McLeod ont aidé le monde du gréement de jonque en prodiguant des conseils aux professionnels et aux amateurs, notamment en publiant le fameux "Practical Junk Rig" en 1988 : un ouvrage encyclopédique synthétisant 25 ans de recherche et développement sur le gréement de jonque, adapté à la construction occidentale.

Ce travail a été salué par un nombre croissant de plaisanciers et de constructeurs amateurs à travers le monde qui profitaient déjà des avantages du gréement de jonque ou qui souhaitaient le faire. Practical Junk Rig explique en détail la conception et la théorie aérodynamique des gréements de jonque et de leur mise en œuvre, le tout assisté par une multitude d'illustrations précises. Cet ouvrage de référence a été réédité et reste toujours disponible.

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