Comment t'est venue l'idée de monter ce projet ?
Ca me trottait déjà dans la tête quand je suis devenu bénévole chez Passe-Coque : je viens initialement de la location de bateaux, et j'ai vu de près la fréquence à laquelle les professionnels renouvellent leur flotte. Je ne comprenais pas que l'on continue à fabriquer de nouvelles unités plutôt que d'entretenir celles qui existent déjà, j'avais cette frustration.
En arrivant dans l'association, j'ai eu à cœur d'agir sur ce sujet et de redonner vie à des bateaux abandonnés. En travaillant avec Passe-Coque, j'ai appris que la Fédération Française des Ports de Plaisance estime que dans 10 ans, nous serons moitié moins de plaisanciers à naviguer. Il fallait donc trouver un moyen de revaloriser ces coques sans forcément les destiner à la navigation.
J'ai rencontré plein d'acteurs de l'Économie Sociale et Solidaire sur tout le territoire morbihannais, j'ai bien saisi la problématique du logement, de la pollution, de la préservation du littoral. L'idée d'un bateau-cabane me faisait rêver, c'est atypique et c'est au croisement de tout ce qui m'intéresse : l'économie sociale et solidaire, l'écologie et le nautisme. J'ai donc décidé de me lancer.
Comment as-tu fait pour trouver des ressources et passer de l'idée à la réalisation ?
D'abord je me suis beaucoup inspiré de ce qui se faisait déjà : je me suis rapproché de l'entreprise Bathô à côté de Nantes, pionnière dans la transformation d'un voilier en habitat terrien. Malheureusement la société dépose le bilan, car son modèle économique n'est plus viable. Mais les conseils qu'ils m'ont partagés m'ont permis d'affiner mon projet. C'est notamment le coût du transport qui avait plombé les finances de Bathô, et ils m'ont permis en me faisant part de leur expérience de contourner ce problème. Il fallait que le bateau-cabane soit transportable à moindre coût en ne dépassant pas les 2,50 mètres de large.
Pour avoir plus de chances de réussite, j'ai suivi une formation via l'Union des Couveuses et la Colloc de Lorient, et j'ai été accompagné par Studio Endémique et son fondateur, Maxime Konansky, qui grâce à ses compétences de dessinateur industriel a pu m'aider dans le design et la réalisation des plans du prototype.
Ensuite j'ai énormément parlé du projet via le réseau de l'association Passe-Coque, des pitchs dans des festivals, des tables rondes, et j'ai ainsi pu recruter des bénévoles qui m'ont aidé tout au long de la mise en œuvre. Cela a également donné de la visibilité au projet qui a reçu des prix et des financements lors de différents évènements. Décrocher le prix des initiatives maritimes du Festival des Aventuriers de la Mer avant que le premier Hublow soit sorti du chantier, ça nous a donné un sacré coup de pouce !
Enfin c'est grâce à Passe-Coque, qui a mis à disposition son chantier, ses outils et ses savoir-faire, que j'ai pu construire le premier Hublow, en moins de 3 mois, avec une quinzaine de bénévoles qui m'ont aidé à le poncer, à l'assembler, à le peindre et à l'aménager pour qu'il puisse être exposé aux Fêtes Maritimes de Brest en début juillet 2024.
Maintenant que Hublow est lancé, quelles sont les prochaines étapes ?
On en a construit un, mais il faut construire les autres, pour créer les premiers villages de Hublow ! Nous cherchons un local pour pouvoir sortir - dans l'idéal - une dizaine de bateaux-cabanes sur la première année. J'aimerais me lancer dans d'autres défis comme celui-ci, et permettre à d'autres de faire comme moi, d'allier leurs compétences autour de projets en lien avec le nautisme et l'économie sociale et solidaire, donc je suis en train de monter une coopérative qui mettrait à disposition un tiers-lieu autour du nautisme et des transitions, pour héberger des projets, avec un atelier pour concevoir des bateaux et des prototypes d'habitats, avec aussi des locaux pour proposer des formations à un nautisme plus low-tech, et des séminaires dédiés à l'écologie et la préservation du littoral pour les entreprises. C'est au sein de ce tiers-lieu, qui serait un véritable chantier naval dédié à la Low Tech et à l'écoconstruction, que nous pourrions construire les autres Hublow, et mener à terme les projets qui nous font rêver et préservent notre environnement.