En 1876, Jules Verne fait naviguer le Saint-Michel II, un voilier de 9 mètres qui lui offre 18 mois de plaisance et l'inspire pour ses récits d'aventures. Détruit en 1911, son héritage est ravivé 100 ans plus tard grâce à un projet de reconstruction ambitieux. Un hommage à son histoire et à la vision de son créateur.
Derniers échos du Saint-Michel II de Jules Verne
Comme nous l'avons vu dans un précédent article, le Saint-Michel II a servi à faire voguer Jules Verne pendant près de 28 mois, période durant laquelle il a puisé une inspiration précieuse pour ses récits, notamment pour la rédaction de Vingt mille lieues sous les mers. De 1878 à 1892, il change alors de main pour être utilisé comme bateau-pilote à Saint-Nazaire, avant d'attirer l'attention de Maurice Henry-Couannier, un passionné de navigation qui le rebaptise Cattleya et lui offre une seconde vie en tant que yacht de plaisance. En 1901, le bateau est ensuite cédé à l'administration pénitentiaire de Belle-Île. Malheureusement, son histoire s'achève en 1911, lorsque, victime des tempêtes du temps, il est détruit.
Un projet de "conservation intégrée"
En 2005, pour célébrer le centenaire de la mort de Jules Verne, l'association "La Cale 2 l'Île" se donne pour mission de reconstruire le Saint-Michel II. Sous la direction de Catherine Cogis, alors présidente de l'association, un comité de soutien est constitué, attirant des personnalités telles qu'Erik Orsenna, académicien et navigateur qui est choisit comme parrain, ainsi que Béatrice Berge, journaliste pour le magazine Thalassa, qui devient la marraine du nouveau Saint-Michel.
Ce projet de reconstruction s'appuie sur la philosophie de la "conservation intégrée", promue par le Conseil de l'Europe. Il vise à allier patrimoine nautique et développement durable. Les objectifs sont clairs : redonner vie à l'histoire du voilier et à celle de son charpentier, Abel Lemarchand ; utiliser des techniques traditionnelles tout en intégrant des méthodes modernes adaptées ; valoriser les savoir-faire artisanaux et humains. L'association aspire également à promouvoir la navigation pédagogique sur l'estuaire de la Loire et à organiser des classes du patrimoine pour sensibiliser les jeunes générations à la navigation.
La reconstruction : un travail collectif
Entre 2005 et 2011, le projet mobilise une multitude de bénévoles, charpentiers de marine et étudiants.
L'architecte naval Anton Laekens, en collaboration avec l'École Nationale Supérieure d'Architecture de Nantes, redresse les plans déformés du bateau. Finalement, c'est François Vivier qui finalise les dessins pour la reconstruction. Les charpentiers Boris Proutzakof et Laurent Ménard prennent en charge la construction en utilisant des matériaux traditionnels tels que le chêne, le doussié et le pin d'Oregon. Près de 150 personnes s'investissent dans ce projet, soit environ 25 000 heures de travail, dont 8 000 heures de bénévolat.
Le retour d'un symbole nautique
La première mise à l'eau du Saint-Michel II a lieu en 2009, en présence de nombreuses personnalités dont Jean-Marc Ayrault, maire de Nantes. Après une semaine de tests sur la Loire, la réplique du cotre-pilote de 13,60 mètres retourne à son hangar pour peaufiner ses aménagements. Le baptême du bateau a lieu en 2011, scellant ainsi une aventure humaine collective, 100 ans après la destruction du modèle original ayant appartenu à Jules Verne.
Depuis sa reconstruction, le Saint-Michel II a parcouru de nombreux milles, retraçant les expéditions maritimes réalisées par Jules Verne sur les côtes européennes, de la Manche à la Mer du Nord. Il participe à de nombreux événements nautiques, des Fêtes de Brest aux Grandes Régates de Port Navalo, en passant par des manifestations solidaires.
Le Saint-Michel II, nommé d'après le fils unique de Jules Verne, demeure ainsi un symbole vivant du patrimoine nautique français et de l'esprit d'aventure qui a animé Jules Verne. Grâce à cette initiative, son héritage perdure et continue d'inspirer les générations en quête d'aventure et d'exploration des mers. En 2012, le bateau a été labellisé Bateau d'Intérêt Patrimonial.