Une rencontre entre deux maîtres du design naval
Johan Anker naît en 1871 en Norvège dans une famille d'entrepreneurs et d'hommes politiques. Il se dirige naturellement vers l'ingénierie et l'architecture navale et rachète en 1897 un chantier à Vollen qu'il baptise Jensens Yard. Devant le petit succès qu'il rencontre, il noue en 1905, un partenariat avec Christian Jensen. L'homme est à la tête de son propre chantier naval, reconnu pour la qualité de ses constructions.
En 1905, les deux hommes co-fondent le chantier naval Anker & Jensen, qui se spécialise dans la conception et la construction de yachts. Ce chantier devient rapidement un acteur reconnu dans le milieu nautique scandinave, il est d'ailleurs le premier constructeur de bateaux de plaisance de Norvège à son époque. Le talent artistique d'Anker et l'exigence du savoir-faire de Jensen leur assurent une solide réputation si bien qu'Anker & Jensen devient l'un des principaux chantiers navals en Europe, construisant des voiliers de luxe pour des clients norvégiens et étrangers.
Une carrière olympique pour tester ses modèles
Outre la réputation du chantier, c'est sa participation aux Jeux olympiques de 1908, organisés en Grande-Bretagne, qui fait connaître Johan Anker à l'international. Sur Fram, un 8mR qu'il a dessiné et construit, il termine 4e de la régate. Il réitéra l'opération en 1911, pour la régate du Couronnement sur Rollo, un 12mR, et décrocha la médaille d'or, puis de nouveau en 1928 sur un 6mR, avec le roi norvégien Olav en tant qu'équipier. Avec le développement de compétitions internationales, les commandes de yachts de jauge internationales ont explosé.
Les deux hommes se séparent en 1915, sans doute que Jensen trouvait que ses talents de designer n'étaient pas assez reconnus en comparaison de son habileté dans la construction.
Anker développe plusieurs modèles de yachts, mais c'est surtout le Dragon, créé en 1929, qui va marquer sa carrière.
Le Dragon, un modèle qui traverse les époques
Le Dragon, conçu par Johan Anker, est un voilier monotype de 9 m devenu populaire dans le milieu des régates. Son design, bien que simple, est inspiré des voiliers de Classe J, et répond efficacement aux exigences des compétitions. Il voit le jour grâce au Royal Gothenburg Yacht Club en Suède, qui cherche un voilier plus accessible.
Ce bateau est sélectionné comme classe olympique pour la première fois en 1948 et ce, jusque 1972. Sa production et son utilisation perdurent aujourd'hui, bien que le bois ait été remplacé par le plastique. Si le Dragon a su s'imposer, c'est avant tout pour ses lignes élégantes et performantes, sa fiabilité et sa manœuvrabilité, qui répondent aux attentes des marins amateurs et professionnels.
Un design fonctionnel avant tout
Les conceptions de Johan Anker se distinguent par leur simplicité et leur efficacité. Plutôt que de chercher à impressionner par des designs ostentatoires, Anker privilégie des lignes épurées et une construction robuste. Sa philosophie repose sur l'idée que l'esthétique d'un yacht doit découler de sa fonctionnalité et de sa capacité à naviguer de manière efficace. Cette approche pragmatique continue d'influencer certains architectes navals aujourd'hui.
C'est en participant à de nombreuses régates internationales qu'il pouvait tester et ajuster ses conceptions en fonction de son expérience en mer. Cette double casquette de concepteur et de compétiteur a contribué à renforcer la pertinence de ses créations dans le monde de la voile.
Un impact mesuré sur l'architecture navale
Johan Anker a certes contribué à l'architecture navale, notamment avec le Dragon, mais son influence reste relativement limitée à ce modèle phare. Bien que ses conceptions soient respectées pour leur fonctionnalité et leur durabilité, elles n'ont pas nécessairement révolutionné l'industrie. Aujourd'hui, le nom d'Anker reste surtout associé au Dragon, un modèle qui continue de séduire les amateurs de voile classique. Johan Anker est décédé en octobre 1940, à l'âge de 69 ans, et a été enterré au cimetière civil occidental d'Oslo.