Le bateau, Jeff ne connaît pas trop. Mais en construire un de ses mains ne lui fait pas peur. Il trouve donc sur internet les plans gratuits d'un petit runabout de 14 pieds, 4,30 m. Et il se lance.
Des plans succincts
Les plans datent des années 60, ils sont issus d'une revue anglaise, avec un mode d'emploi très succinct. La première difficulté consiste à convertir toutes les données impériales en métriques. Puis, Jeff fait imprimer le plan en grand format pour dessiner les couples. Malgré la piètre qualité et le peu de précision des plans, il reporte les angles en les mesurant simplement avec un rapporteur. Les derniers ajustements seront faits à l'œil.
Une construction traditionnelle
Ce petit runabout se construit à l'envers sur une structure en bois. Avec peu de connaissance en construction navale, Jeff va combiner plusieurs modes d'assemblage pour son bateau. La structure en pin est collée avec de la colle PU. Les bordés en contreplaqué marine seront vissés à la vis inox, mais aussi collés à la colle polyuréthane. Puis l'ensemble sera stratifié avec du roving de fibres de verre et de la résine époxy. Des joints congés à l'époxy complètent le tout. Un ensemble un peu hétéroclite au niveau des assemblages, mais qui a l'avantage d'être solide.
Cintré à l'étuve
Les formes de ce bateau ne posent pas trop de problèmes, sauf au niveau de l'étrave. En effet, à cet endroit, les plats-bords doivent être cintrés en 3 dimensions. Après en avoir cassé deux, Jeff décide de les étuver. Avec un cuiseur vapeur électrique qu'il enferme sous une bâche, il réalise une étuve dans laquelle ses bordés restent 45 minutes. Ensuite, il les présente sur le bateau, en les positionnant avec des presses et des sangles. Au matin, le bois a pris la forme et peut être collé.
Bordé en contre-plaqué marine de 10 mm
La coque est en contreplaqué marine. Comme Jeff n'a pas de gabarit, il présente ces plaques de 10 mm directement sur la coque, trace approximativement les découpes, et les ajuste ensuite avec une ponceuse à bande. Puis, ces plaques sont vissées à la vis inox. Ce sont pas moins de 900 vis qui seront utilisées pour ce bateau ! La coque est au final recouverte d'un roving, stratifié à l'époxy à l'extérieur, ce qui masque les vis. Une couche d'époxy à l'intérieur vient terminer la coque.
C'est au niveau de la finition que Jeff va s'arracher les cheveux, car poncer l'époxy est délicat. Il consomme bon nombre de disques de ponceuse, pour un résultat insuffisant au goût de cet amateur.
Une construction rapide en 5 mois
Pour cette construction, Jeff a utilisé son garage de 6 mètres de long. Le retournement du bateau s'est fait dehors, avec l'aide de 3 amis. Jeff travaille vite, très vite. La construction s'est déroulée en 5 mois, en travaillant soir et weekend. Mais il avoue que durant cette période il ne s'est jamais couché avant 2h du matin. Sa femme lui a d'ailleurs dit très gentiment une fois le bateau terminé : "Je n'ai pas beaucoup profité de toi depuis 5 mois…"
Un volant et 4 places assises
Jeff a apporté quelques modifications au plan, au niveau des aménagements. En effet, d'origine, le bateau est motorisé en hors-bord à barre franche. Jeff décide de mettre un volant, avec 4 places face à la route. Il modifie donc les banquettes et réalise les coussins lui-même, en empruntant la machine à coudre d'une voisine.
Un budget limité
Côté budget, le bateau motorisé lui a couté 4 000 €. Pour le moteur, Jeff cherchait un hors-bord au look rétro, assorti à la forme de son bateau. Il a trouvé, au fin fond de l'Ariège, à 250 €, un Evinrude datant de 1968, développant 60 ch en 4 cylindres, 2 temps. Stocké sous une bâche, le moteur n'était pas bloqué. Avec un ami, il a refait le circuit électrique, nettoyé et graissé, et le moteur est reparti !
Pas de problème d'homologation
Ce moteur n'a pas de trim, et le bateau avec son réservoir de 70 litres sous le pont avant a un peu le nez dans l'eau. Jeff a ajouté des ailettes pour aider le déjaugeage. Mis à part le bruit et la consommation, et la pollution, Jeff est très heureux de sa construction. Il peut naviguer en famille à 4 personnes, même si le bateau est homologué pour 6. Sur le plan administratif, il n'a pas rencontré de problème pour faire homologuer son bateau en construction amateur. Il a juste constitué un dossier, envoyé le plan, des factures de matériaux et des photos de la construction. Seule contrainte, il ne peut pas le vendre dans les 5 premières années.
Naviguer juste pour le plaisir
Maintenant, le bateau navigue régulièrement sur la Saône et sur une retenue de la Loire. Mais déjà, d'autres projets se dessinent pour cet amateur naturellement doué de ses mains.