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Un support pour la petite coupe de l'America
Le projet du catamaran Mer Agitée naît à l'occasion d'un projet de participation française à la petite coupe de l'America. Cet évènement, laboratoire de développement de la voile, qui a vu les prémices des multicoques volants actuels, se tient alors à Falmouth en Angleterre. Michel Desjoyeaux explique : "Nous avions besoin d'une plateforme pour pouvoir convoyer le bateau pour la petite Coupe de l'autre côté de la Manche. Le petit catamaran était levé entre les deux coques de la plateforme, et arrivé de l'autre côté, le catamaran Mer Agitée servait de support pour vivre à bord avec l'équipe. Le projet s'est malheureusement arrêté, mais on a continué à développer le bateau, pour faire notamment du suivi de course. Il a été mis en service en 2017."
Réemploi de bateaux de course
Le cahier des charges du catamaran était d'être léger pour être rapide et consommer peu. Il est donc construit comme un bateau de course, en carbone, pour un déplacement final de seulement 8 tonnes pour 18,28 mètres de long et uniquement 90 centimètres de tirant d'eau de coque. Il fait appel à un maximum de réemploi, comme le précise Michel Desjoyeaux : "Les flotteurs sont issus de Gitana 10, le mât est celui de Foncia 2010, les poutres sont un mât de Volvo raté, les safrans viennent aussi de Foncia. Les winches et les écoutes sont aussi de récup, et les voiles viennent de Macif."
Avancer à la voile comme au moteur
Nous embarquons à Concarneau pour un tour en mer avec Michel Desjoyeaux à bord du catamaran. Equipé de 2 moteurs hors-bord Suzuki, partenaire du projet, le voilier se manœuvre aisément pour quitter le quai. Avec 2 fois 300 chevaux couplés à des doubles hélices, le catamaran allie manœuvrabilité et vitesse. Nous le constatons rapidement en prenant la barre et la manette des gaz. L'accélération est franche, et avec seulement 8 tonnes à lancer, la vitesse maximale est vite atteinte. Si le bateau ne plane pas, étant données les carènes des flotteurs, il garde une assiette presque nulle, qui peut être corrigée avec les foils, qui servent aussi à amortir les effets de pilonnement du clapot.
La vitesse maximale au moteur est de 28 nœuds, mais il est généralement exploité autour de 20 nœuds en vitesse de croisière. A 15 nœuds, il consomme 3,9 litres par mille. Avec ses 2x500 litres de carburant, le catamaran Mer Agitée dispose de 5 heures d'autonomie en vitesse maximale et 50 heures à 10 nœuds.
Mais comme le rappelle le skipper : "Le moteur n'est pas le mode de propulsion principal. On doit faire 20 minutes de moteur pour 2 heures de voile. On avait voulu mettre des moteurs Inboard initialement, mais cela manquait de place dans les flotteurs. Nous avons fait le choix du hors-bord qui fonctionne en fait très bien pour le catamaran, et permet de le remonter hors de l'eau grâce à notre chaise basculante et au trim, contrairement à une ligne d'arbre qui peut prendre des chocs."
En effet, nous envoyons rapidement les voiles, et même si le vent est modéré, nous atteignons rapidement les Glénan, le bateau naviguant presque à la vitesse du vent. Michel Desjoyeaux insiste : "On est entre 15 et 20 nœuds rapidement . On a fait des pointes à 26 nœuds."
Un bateau efficace
Mangeant tranquillement dans le grand cockpit ouvert, à plus de15 nœuds, sans sentir le clapot, on comprend pourquoi le catamaran Mer Agitée est un support séduisant pour les départs et accompagnements de course. Avec une cuisine et deux cabines, il accueille facilement les équipes à bord et s'avère économe.
Ce sont 6 000 € qui ont été économisés en carburant sur le tour de Bretagne en 1 semaine en 2022, par rapport aux bateaux à moteur classiques. Si le style extérieur déroute, Michel Desjoyeaux conclut en citant le plus beau compliment entendu sur un ponton : "Il est très moche votre bateau, mais il a l'air très malin !"