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Malgré son destin tragique, le Pourquoi Pas ? 4 a marqué l'histoire des missions polaires, sous le commandement de Jean-Baptiste Charcot. Il a alimenté les rêves de générations de marins et d'explorateurs et nous inspire encore.
La course vers les pôles
A la fin du dix-neuvième et au début vingtième siècle, les grandes nations alimentent la course vers les pôles. Tout est à découvrir dans ces régions vierges. Les explorateurs et scientifiques y trouvent des terrains de jeux fantastiques, le prestige et la gloire.
En France, Jean-Baptiste Charcot, médecin, officier de la Marine française et grand sportif se lance dans l'aventure. Après avoir réalisé plusieurs expéditions, notamment en Antarctique, avec différents bateaux, il entreprend la construction du navire qui ne le quittera plus : son quatrième Pourquoi Pas ?
Un navire d'exploration polaire sur mesure
Ce Pourquoi Pas ? est le quatrième navire baptisé ainsi par le commandant Charcot. Il aurait eu coutume de dire aux sceptiques qui, dans sa jeunesse, doutaient qu'il devienne un explorateur polaire : pourquoi pas ?
Le navire est construit à Saint-Malo, sur les plans de François Gautier, et en s'appuyant sur la grande expérience de Charcot en matière d'exploration maritime dans des conditions extrêmes. Pour être durable en milieu polaire, le bateau est construit entièrement en chêne, sauf les petits fonds en orme. Il est également renforcé tous les mètres par des diagonales d'acier qui lient les membrures. La proue est habillée de métal et le vaigrage, calfaté, crée une double coque.
Le navire qui en résulte mesure environ 57 mètres. C'est un trois-mâts barque, équipé d'un moteur compound deux cylindres d'une puissance de 500 CV. Le Pourquoi Pas ? 4 comporte trois laboratoires et une bibliothèque. Il jauge 449 tonneaux et embarque 34 hommes d'équipage, ainsi que quelques scientifiques.
Une destinée mouvementée
Le Pourquoi Pas ? commence sa vie en qualité de navire d'exploration polaire, selon l'objectif du commandant Charcot. Il effectue une première mission en 1908 sur la péninsule antarctique, près de l'île Petermann. Lors de ce voyage, une nouvelle terre est découverte, elle s'appellera la terre de Charcot. Néanmoins, l'expédition n'est pas de tout repos et une grande partie de l'équipage, dont le commandant Charcot, souffrira du scorbut.
Après cette mission, le Pourquoi Pas ? commence une nouvelle vie en qualité de navire-école pour la Marine française. Puis, il renoue avec les missions de recherche scientifique dans l'Atlantique Nord après la guerre.
Le Pourquoi Pas ? effectuera aussi une mission de recherche cruciale pour retrouver l'hydravion du norvégien Roald Amundsen. Ce dernier était lui-même à la recherche du dirigeable d'un général italien, Umberto Nobile, parti survoler le pôle Nord. Cependant, si l'expédition du général Nobile est retrouvée, celle de Roald Amundsen, qui comptait plusieurs personnes, dont l'officier de marine et aviateur français Albert Cavelier de Cuverville, est portée disparue et ne sera jamais retrouvée. Seuls un flotteur de l'hydravion et un réservoir, ainsi qu'un radeau de fortune, sont retrouvés près de la côte de norvégienne de Tromsø.
Enfin, à partir de 1925, le navire réalisera de très nombreuses missions vers l'Arctique. Il en profitera pour servir de soutien logistique aux expéditions de Paul-Emile Victor au Groenland.
Au retour d'une de ces expéditions, en septembre 1936, le Pourquoi Pas ? 4 est pris dans une violente tempête. Il s'échoue sur les récifs de la côte ouest de l'Islande. Lors du naufrage, l'ensemble de l'équipage, ainsi que le commandant Charcot, périssent en mer, à l'exception du maître-timonier Eugène Gonidec qui parvient à atteindre la côte.
Une inspiration pour les arts et la recherche
Le Pourquoi Pas ? nous questionne encore aujourd'hui. En effet, la relève est assurée par le nouveau navire de recherche océanographique, co-financé par la Marine nationale et l'Ifremer, appelé du même nom. Ce dernier mène des missions scientifiques sur l'ensemble des mers du globe.
Le Pourquoi Pas ? a également inspiré l'imaginaire maritime collectif. Le voilier du Commandant Charcot a été peint et représenté par de grands peintres de marine, à l'image de Marin Marie.