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Pour dessiner la nouvelle bâche de son voilier Nils 2, un Tina de 1968, Antoine a réfléchi longuement. Il partage avec nous ce long processus.
Je cherchais des solutions qui répondaient à mes objetcifs :
- Légèreté : Si la bâche est trop lourde, vous ne la garderez pas à bord. Vous avez l'impression de plomber votre bateau avec un élément inutile. Du coup, vous la laissez au port d'attache, en attendant le retour du bateau l'hiver suivant. Vous n'utiliserez donc cette protection que pour les grandes périodes d'hivernage, mais pas pour les courtes durées, alors que le voilier est sous le feu du soleil et des mouettes…
- Encombrement : Si la bâche est trop grosse en volume, il est inimaginable de mobiliser un coffre entièrement pour une "voile" qui ne "sert à rien". Vous la laisserez aussi au port dans ce cas.
- Facilité d'installation : Si la mise en place est trop compliquée, si l'installation est trop longue, vous allez baisser les bras bien avant d'avoir sorti le sac du coffre. Surtout s'il s'agit une courte période de stand-by.
Tout cela est bien dommage, car un bateau protégé par une bâche - une fois rincé, vieillit beaucoup moins vite. Tout est mieux avec une couverture au-dessus de son bateau : protection du teck, des vernis, ventilation avec les hublots qui peuvent rester entrouverts et attaque en tout genre de mouette et autre vent de sable…
Une vieille bâche beaucoup trop lourde
En achetant mon Tina de 1968, j'ai hérité d'une bâche de protection datant d'une bonne quinzaine d'années. Le sac était plus gros qu'un grand spi, mais non compactable. En plus, le poids de cette bâche était inimaginable : une bonne trentaine de kilos. Je ne l'ai jamais pesée, mais je devais m'y prendre à deux fois pour la présenter sur le pont. Le gros tissu de coton était renforcé aux points de frottement par de la bâche en plastique, histoire de bien alourdir le tout. Aucune flexibilité dans la mise en place, car le tissu n'est absolument pas extensible, et zéro étanchéité.
Un vrai tissu outdoor léger
À force de regarder les tentes de montagne et le matériel de bivouac moderne, je me suis mis à rêver d'une autre solution que ce gros tas de coton. J'ai trouvé chez Serge Ferrari le tissu idéal : le Stamoid Smart 1. Une solidité extraordinaire, un poids divisé au moins par trois, une élasticité permettant de la flexibilité au montage et une étanchéité parfaite - hors coutures. En couleur beige - sable - parfaitement "classic", voilà le Nils 2 paré pour affronter les tempêtes d'hiver.
Un maître voilier professionnel
Pour réaliser ce projet, j'ai appelé Olivier Martin de Seanergie Nautic sur le port de Hyères. Olivier est un maître-voilier polyvalent, qui reste un grand spécialiste des couvertures de voiliers classiques : Ikra, France… Il est aussi à l'origine du taud de soleil de Nils 2. J'ai dessiné le taud de mes rêves et Olivier a re-interprèté les dessins pour les rendre réalisables.
Installation sous la bôme, mais à quelle hauteur ?
Nous nous sommes posé la question de la hauteur de la bâche au-dessus du pont. Une installation au-dessus des filières crée trop de frottements sur les têtes de chandelier, et trop de fardage global. Cela ne permet pas non plus de laisser des pare-battage à poste.
J'ai donc tranché pour une bâche qui arrive sur la filière intermédiaire. Cela permet de tendre le taud avant qu'il ne retombe sur la fargue, car avec une fargue en teck verni, il est impossible de tendre des élastiques dessus. Une petite bavette parcourue d'un élastique assure la protection finale avec la coque, sans que celle-ci ne vienne battre au vent, ce qui est un désastre pour la peinture !
La bâche étant réalisée en une seule pièce, il faut aussi décider du nombre de zip perpendiculaires : bas étai, mât, écoute de grand-voile. Il faut aussi penser à une porte d'entrée zippée, comme celle d'une tente, pour venir visiter le bateau bâché. Je n'y avais pas pensé et elle n'existe pas sur le Nils 2 !
Enfin la dernière question qu'il faut se poser, c'est la sortie des amarres, à l'avant et à l'arrière. Ayant fait réaliser la bâche pendant l'hiver, alors que le bateau est au sec sur un ber, j'ai complètement oublié ce point et les amarres soulèvent la bavette au niveau des chaumards. C'est une modification qu'il va falloir reprendre, mais qui reste réalisable.
Et à l'usage ?
J'ai été étonné de la facilité de mise en place due à la légèreté du tissu. Une fois la bâche sortie du sac et étalée sur le pont, nous avons mis environ un quart d'heure à deux pour la placer et la tendre, et cela sans acrobaties périlleuses à l'extérieur des filières. Pour gagner du temps, je devrais marquer l'avant et l'arrière d'un pochoir ou d'une couleur.
Au final, le projet est magnifique. Toutes les petites astuces d'Oliver Martin permettent de la maintenir tendue comme une tente, ce qui a l'avantage d'éviter qu'elle ne batte. Et surtout de rendre le projet très élégant, n'est-ce pas cela le plus important ?