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La Neptune est une barque du Léman à voiles latines. Elle a été patiemment restaurée et fait la fierté des genevois. Il ne s'agit pas seulement d'un joli bateau amarré à "3 jets de pierre" du fameux jet d'eau. C'est surtout un patrimoine vivant. Les membres de la fondation chargée de sa préservation ont à coeur de le remettre en état à chaque fois que c'est nécessaire, de naviguer à bord et surtout de former des équipages aux techniques de la navigation d'époque.
Une belle finesse de formes
Avec ses antennes qui culminent à 27 mètres, la Neptune se repère de loin. Elle est amarrée arrière à quai, une posture qui souligne ses formes étonnantes. Elle est étroite à la flottaison, tandis que ses bordés très inclinés lui assurent à la fois une belle assise sur l'eau et une grande capacité de charge. Le plus étonnant est le marchepied, nommé apousti, qui déborde de part et d'autre de la coque. Il forme une sorte de galerie qui élance encore la silhouette du bateau.
Des sorties d'équipage
Durant la belle saison, la Neptune assure des sorties à la voile ou au moteur. En complément, les membres bénévoles de l'équipage, les bacounis se retrouvent chaque semaine pour une navigation d'entrainement, suivie d'un pique-nique sur le lac. C'est l'une de ces sorties qu'il nous a été donné de partager.
Un poste pour les bacounis
Dans le poste d'équipage, une grande table occupe toute la partie centrale. Elle est adossée aux épontilles qui soutiennent les barrots de pont. Un poêle à bois voisine avec la pompe de cale monumentale. La hauteur est mesurée, mais l'espace est bien dégagé et une grande affiche reprend les plans du bateau avec la terminologie suisse des pièces qui le constituent.
Passeurs de savoir !
Un à un, les bacounis, arrivent à bord. Ils viennent se former pour renforcer l'équipage qui compte en moyenne une cinquantaine de membres, dont un tiers de femmes. Après un rapide briefing, chacun vaque à gréer les voiles et à passer les écoutes. C'est à peine si l'on entend les moteurs et déjà le bateau passe au pied du jet d'eau pour gagner le lac. Le temps est superbe et il y a du monde sur l'eau !
Sous voiles cap sur le Mont Blanc
En équilibre sur le beaupré, un équipier endraille le foc. Le Grand Voilier et le Trinquet, noms suisses qui correspondraient à la grand-voile et à la misaine, montent aux mâts et les quelques 300 m² de toile se gonflent au vent léger de cette fin de journée. Tout est efficace, à sa place et la Neptune trace sa route sur les eaux du lac, comme elle le fait depuis 117 ans ! Les verres sortent, les victuailles aussi et c'est à la nuit tombée que nous passons à nouveau entre les digues du port, cap sur les lumières de la ville.
Une histoire gravée dans la pierre !
Le bateau a été construit en 1904 au chantier naval de Locum, à une époque où l'on comptait une bonne centaine de barques sur le lac… La Neptune transportait 120 tonnes de pierres en pontée jusqu'à son désarmement en 1968. Délaissée, la Neptune se dégrade et finit par couler dans le port. Elle est remise à flot et rachetée par l'État de Genève en 1971. Rénovée une première fois, sa gestion est confiée à la Fondation Neptune.
Reconstruite plusieurs fois
Le but premier était de permettre au bateau de re-naviguer et quelques entorses aux règles de l'art ont été commises lors de sa remise en état. Elle a néanmoins permis de maintenir le bateau à flot et d'assurer des sorties de groupes. Pourtant en 2005, la Neptune n'en peut plus et pour son centenaire, c'est une véritable reconstruction qu'il faut envisager. La quille est remplacée ainsi que 90 % des membrures.
Des solutions pour un patrimoine durable
Les charpentiers bretons appelés en renfort pensaient initialement reconstruire selon les méthodes traditionnelles, en assemblant les bois à l'aide de carvelles, des pointes forgées et galvanisées de section carrée. Or, ces clous géants sont pratiquement impossibles à démonter. Pour permettre les inévitables réparations à venir, la fondation a insisté pour que les assemblages soient réalisés à l'aide de tire-fonds en acier inoxydable, afin de permettre un démontage sans casse des pièces qui seraient à remplacer.
Une attention aux générations à venir
Cette précaution est à l'image de la vision d'avenir que la Fondation Neptune défend. Consciente qu'un bateau en bois a une durée de vie limitée et que les générations à venir auront encore à intervenir, elle a choisi de faire en sorte que cela puisse se faire dans les meilleurs conditions. La qualité du travail est époustouflante ! En 2021, l'intégralité du pont a été remplacé. Pour un amateur de bateaux traditionnels et de travail du bois, le résultat est une pure merveille !
La qualité suisse
Les charpentiers ont déployé tout leur savoir-faire et réalisé des assemblages parfaits, en particulier en ce qui concerne les pièces encochées, ces bois qui relient les hiloires et les bancalards des apoustis. Autant de noms locaux qui désignent respectivement les supports et la galerie extérieur du bateau. Ainsi remise à neuf, la Neptune a pu reprendre du service en juin 2021.
Les efforts constants des membres de la fondation font de la Neptune un exemple de ce que l'on peut réaliser pour conserver et faire vivre un bateau d'intérêt patrimonial.
Caractéristiques :
- Longueur : 27,30 m
- Largeur : coque : 7,46 m - hors-tout : 8,62 m
- Tirant d'eau : 1,60 m
- Déplacement : 70 tonnes
- Voilure : 288 m² (Grand voilier : 125 m² ; Trinquet : 125 m² ; Foc : 38 m2)