Protection maritime
Elements clefs de défense des littoraux et des ports, les fortifications maritimes existent depuis des siècles. Si Vauban est le plus connu des experts en poliorcétique (l'art d'organiser l'attaque ou la défense lors du siège d'une ville, d'un lieu ou d'une place forte) chargé par le roi Louis XIV de mettre en place une série de défenses, il n'est pas le seul des artisans de ces nombreux forts et citadelles protégeant les arsenaux et autres points clefs des côtes de France.
Rappelons que la stratégie de Vauban, n'est pas de créer des forteresses imprenables mais des édifices dont la prise nécessiterait dix fois plus d'hommes (et donc d'efforts) aux assaillants qu'il n'y avait d'hommes à assaillir. C'est de là que sont apparus notamment les principes de défenses concentriques telles que le Fort de La Prée.
Le château d'if (1)
C'est au large de la cité phocéenne que François 1er fit ériger, entre 1524 et 1531, cette citadelle avec pour triple objectif la protection de Marseille, d'offrir un mouillage à la flotte royale et d'en couvrir les sorties depuis la ville voisine.
Successivement place forte, prison et lieu mythique (le compte de Monte-Cristo, Edmond Dantes, est désigné prisonnier du château dans le roman écrit en 1844 par Alexandre Dumas), le château d'If se rejoint en bateau, depuis le vieux port de Marseille.
Parmi les particularités remarquables du château d'If figurent les graffitis, laissés comme autant de témoins du passé à la fois par les prisonniers, les visiteurs et les militaires qui y sont passés. Certains sont de vraies œuvres d'art, d'autres de simples mémoires du passé. Évidemment, hors de question de laisser la marque de visites modernes dans ces murs séculaires. Un mur d'expression libre et un livre d'or ont, aujourd'hui, pris la place de ces écritures murales.
Le château du taureau (2)
En 1542, il devient nécessaire de protéger Morlaix, troisième port breton derrière Nantes et Saint-Malo. Grâce au chateau installé dans la baie, les bateaux assaillants se trouvent ainsi contraints de contourner la défense par l'ouest, où ils sont facilement atteints par l'artillerie en place.
Au XVIIème siècle, Vauban marque le château du Taureau avec des travaux qui s'étalent durant 45 années. L'objectif est d'ériger un fort plus solide et plus grand. L'édifice a une forme oblongue qui épouse celle du rocher. Il mesure 60 mètres de long, 12 mètres de large et 12 mètres de haut pour une surface bâtie de 1 450 m2. On y trouve 11 casemates chacune équipée d'un canon. Le lieu abrite également des logements pour les soldats et les officiers, ainsi que deux cachots, une cantine, une cuisine, une chapelle et des latrines.
Avant même que ne soient achevées les grandes transformations de Vauban, la défense de Morlaix devient moins prioritaire et le lieu est converti en prison. Pour l'anecdote, s'il était possible d'être emprisonné pour à peu près toutes les raisons (libertinage, une mésalliance, la folie, un goût immodéré pour l'alcool ou le jeu), les frais d'incarcération sont couverts par les familles. Et lorsqu'elles ne paient pas… les prisonniers sont relâchés !
Au cours de la seconde guerre mondiale, le fort est pris par les Allemands qui y installent un système de défense contre l'aviation (DCA). La paix revenue, c'est en 1960 que l'Association du Centre Nautique de la Baie de Morlaix y installe une école de voile qui a accueilli jusqu'à 250 stagiaires simultanément.
Le château n'est accessible qu'en bateau, quel que soit le coefficient de marée. Le site ne dispose ni de toilettes, ni d'eau courante et les animaux n'y sont pas admis.
La citadelle de port louis (3)
La citadelle de Port-Louis est espagnole de construction. C'est au XVIIe siècle que les Français ont modifié la citadelle fermant l'accès à la rade de Lorient.
François II, duc de Bretagne projeta pour la première fois en 1486 de construire un bastion pour protéger la stratégique rade bretonne. C'est finalement en 1591, un siècle plus tard, que les Espagnols, conduits par Cristobal de Rojas, vont démarrer la construction de ce fort, sur une pointe rocheuse à l'entrée de la rade. Les travaux vont s'étaler sur près de deux siècles, car c'est en 1664, au moment de l'implantation de la Compagnie des Indes à Port-Louis que les travaux de construction sont définitivement achevés.
Demeurée ouvrage militaire jusqu'en 2007, la citadelle de Port-Louis sera prise et occupée par les troupes d'occupation au cours de la seconde guerre mondiale. Depuis lors, elle est affectée à la surveillance du trafic maritime. Et, surtout, elle est devenue l'une des composantes du Musée de la Marine, présentant la collection de la compagnie des Indes ainsi qu'une passionnante partie consacrée au sauvetage en mer.
Située à terre, la Citadelle de Port Louis se visite toute l'année durant.
Le petit langoustier (4)
Le fort du petit langoustier est sans doute l'une des plus modestes forteresses des côtes françaises. Il a été construit au XVIIe siècle dans l'urgence par Richelieu dans le but de protéger Toulon des flottes ennemies, en même temps que d'autres forts. Cette situation permettait de croiser les feux dans la passe, empêchant les vaisseaux ennemis d'y entrer.
C'est aujourd'hui une association, Les amis du Petit Langoustier – Fort en mer à Porquerolles, qui gère la restauration du fort et ses - rares - ouvertures au public. D'autant plus rare que le site est difficile d'accès et que les rénovations se font au fil des possibilités des membres, bénévoles, de la structure.
Il ne s'agit pas, ici, d'une restauration comme les autres. Les artisans qui œuvrent à remettre ce fort dans son état d'origine - ou presque - veillent à le faire en usant de valeurs importantes à cette époque. Le fort étant dépourvu d'électricité, d'eau et de télécommunications, c'est sans ces capacités techniques que les travaux sont réalisés. Au programme donc, mortier à l'ancienne, pierres de construction utilisées à l'époque. Et, surtout, utilisation du moins de fonds publics que possible, pour réduire à la fois l'impact écologique et économique de cette restauration.
Le bail de 40 ans établi au bénéfice de l'association permet de se projeter dans une phase de travaux longs et rigoureux, qui visent à remettre le fort dans son état initial, utilisant l'ensemble des méthodes de l'époque de construction. Il vise, aussi, à étudier et réduire autant que possible les impacts des modes de vie moderne, notamment au moyen du recyclage de l'eau et des déchets éventuels.
Le fort n'est que rarement ouvert à la visite, son approche est compliquée et dangereuse et le respect dû à celles et ceux qui y œuvrent en font un lieu à regarder, à admirer et à saluer de loin, depuis la Méditerranée.
Le fort de la Conchée (5)
C'est en baie de Saint-Malo que Vauban a construit ce fort-ilôt de la Conchée. Etonnante, la construction recouvre la quasi-totalité du rocher éponyme. C'est pour contrer les attaques anglaises que Vauban démarre la construction du fort en 1692.
L'endroit est idéal. Ne dépassant guère de plus de 5 à 6 mètres par fortes marées, le rocher est situé tout proche de la fosse aux Normands, un banc de sable lisse et sans rocher, idéal pour ancrer les navires corsaires qui allaient servir les intérêts plus ou moins légitimes de la couronne française d'alors.
En 1730, l'ouvrage tel qu'il se présente actuellement est achevé. Laissé à l'abandon après sa démilitarisation en 1889, le fort a servi de cible aux tirailleurs allemands qui, durant la guerre, occupaient la Cité Corsaire. Les libérateurs de Saint-Malo n'ont eu qu'à achever le travail commencé par l'occupant, en bombardant à leur tour le fort lors de la libération de la cité, en 1944.
Classé Monument Historique en 1984, le fort est en perpétuelle rénovation et reconstruction. Battu par les violents courants de la Manche, il se situe à l'embouchure sud du passage de la déroute, un courant violent longeant le Cotentin. C'est, d'ailleurs, la mer qui, en 1820, a causé le plus de dégâts au fort de toute son histoire.
Depuis 1989, le fort est propriété commune d'une vingtaine de personnes, rassemblées autour de la "compagnie des amis de la Conchée" qui travaillent, sous la supervision d'un architecte des monuments historiques, à le maintenir en état.
Le fort se visite lors des journées du patrimoine. Le débarquement y est particulièrement dangereux. Le seul mouillage présent au pied de la forteresse sert aux restaurateurs qui gagnent, chaque week-end, la Conchée.
Fort Boyard (6)
Sans doute le plus connu des forts de France, en raison de l'émission télévisée éponyme, Fort Boyard est situé sur les côtes charentaises. L'objectif est de protéger Rochefort des attaques venant, notamment des voisins Anglais.
A une heure de navigation de La Rochelle, Fort Boyard n'est accessible qu'en bateau.
En 1666, alors que les travaux de construction de l'arsenal de Rochefort sont achevés, il est envisagé de construire un fort qui en protégera l'accès. Le projet, confié à Vauban, fera dire à l'architecte lui-même au roi Louis XIV "Sire, il serait plus facile de saisir la Lune avec les dents que de tenter en cet endroit pareille besogne".
C'est finalement en 1841 que le fort tel qu'il existe aujourd'hui est construit, après de nombreux atermoiements à la fois politiques, financiers et militaires. Construit trop tardivement, il ne servira pas pour défendre la côte, mais uniquement de prison.
Abandonné dans les années 1920, le fort est acheté à la fin des années 80 par Jacques Antoine, producteur de jeux télévisés et devient, après plusieurs années de réparation et de remise en état, le lieu de tournage de l'émission "Fort Boyard" dans sa version française. C'est aussi un endroit de tournage de nombreux films (Le Repos du guerrier, Liberté-Oléron…).
Le fort se visite, hors des jours de tournage.
Fort des Îles Saint-Marcouf (7)
Les Îles Saint-Marcouf forment un archipel situé à l'est du Cotentin, dans le département de la Manche (50). Au coeur de la baie de Seine, il a été occupé par les Anglais dès 1795. Sa situation stratégique permettait aux occupants de perturber tout le commerce en provenance ou à destination de Cherbourg, de Rouen et des villes environnantes, ayant un impact allant jusqu'à Paris, capitale de la France.
En 1800, l'empereur Napoléon 1er fit engager le premier sous-marin de guerre, le Nautilus. C'est en 1802, avec la signature de la paix d'Amiens que les Anglais ont restitué à la France ces territoires.
C'est sur l'île du large qu'est construit le fort qui nous intéresse. Interdit d'accès car à l'état d'abandon, il constitue la seconde île de l'archipel, après l'Île de Terre, une réserve ornithologique de 3,40 hectares, elle aussi interdite de débarquement.
L'île du large est classée monument historique depuis 2017. Ainsi, chaque été, des associations interviennent sur place pour tenter de contrer les outrages du temps, remontant murailles, contreforts et digues, avec le soutien de l'État, d'entreprise et des collectivités locales.