De femme de chambre à botaniste
Jeanne Barret nait le 27 juillet 1740 en Bourgogne. L'on ne sait que peu de choses de son enfance. Apparemment orpheline, elle commence à travailler jeune. Elle fait alors la rencontre de Philibert Commerson, botaniste et médecin, en 1764, qui l'embauche en tant que femme de chambre. Veuf, l'homme s'éprend de Jeanne et lui apprend les rudiments de son métier, partageant avec elle ses recherches sur les plantes. La jeune femme tombera d'ailleurs enceinte hors mariage, le couple devant alors déménager à Paris. Mais leur enfant mourra quelque temps plus tard.
Se déguiser en homme pour prendre part à l'expédition royale
En 1766, Commerson est invité à prendre part à l'expédition de Bougainville, premier tour du monde organisé par la Marine royale sous le commandement de Louis-Antoine de Bougainville. Le botaniste est chargé d'étudier la faune locale à chacune des escales. Apparemment de santé fragile, Commerson invoque la possibilité d'être accompagné par Jeanne, qui lui servira d'infirmière. Mais à cette époque, les femmes sont interdites sur les bateaux de "Sa Majesté". On lui accorde cependant de disposer d'un valet.
C'est ainsi que Jeanne Barret va se travestir en homme pour embarquer à bord de l'Étoile, l'un des deux bateaux de l'expédition avec la Boudeuse. L'on ne sait pas si Commerson était au courant de la supercherie, mais il l'est probable au vu de la liaison qu'entretenait les deux amants. D'autres sources indiquent d'ailleurs que Jeanne prit part au voyage pour ne pas être séparée de l'homme qu'elle aime.
La jeune femme se coupe les cheveux, se bande la poitrine, porte des vêtements larges et prend le nom de Jean Baré, jouant le rôle de valet du naturaliste. Le 1e février 1767, les deux amants embarquent au port de Rochefort. Fort heureusement, Commerson dispose de sa propre cabine avec cabinet de toilette privé, laissé généreusement par le capitaine du bateau, pour qu'il puisse stocker tout son matériel. La jeune femme bénéficie ainsi de plus d'intimité.
Pour ne pas se faire prendre, Jeanne redouble de travail à bord du navire. À chaque escale, le duo fait son travail de botaniste, étudiant, répertoriant et classant chaque spécimen rencontré.
Démasquée à Tahiti
Deux ans passent avant que Jeanne ne se fasse prendre lors d'une escale à Tahiti en 1769. Là encore, les témoignages divergent. Si certains racontent que les suspicions ont débuté dès le départ, d'autres expliquent que c'est en débarquant sur l'île que la jeune femme fut démasquée par les habitants, criant qu'elle était une femme. La jeune femme expliqua alors au capitaine que Commerson n'était pas au courant de la supercherie pour le protéger.
Plus de 5 000 espèces récoltées
Le couple débarque finalement à l'Isle de France (aujourd'hui Maurice), accueillie par l'ami de Commerson, le botaniste Pierre Poivre. Tous deux y continuent leurs recherches botaniques jusqu'au décès de Commerson en 1773. Poivre étant rappelé à Paris, Jeanne se retrouve alors seule et sans ressources, de manière à ce qu'elle ne puisse rentrer en France. Elle fera d'ailleurs envoyer le résultat de ses recherches – près de 5 000 espèces de plantes dont 3 000, encore inconnues – à Paris.
Une reconnaissance royale
Elle ouvre un cabaret à Port-Louis et rencontre un officier de marine français qu'elle épousera en 1774. Le couple rentre en France, bouclant ainsi son tour du monde, certainement en 1775. Elle reçoit en 1776 l'héritage laissé par Commerson avant d'être honoré par Louis XVI qui reconnait ses mérites d'aide-botaniste et lui attribue une pension royale. Jeanne s'éteint en 1807.